EDF n'est pas le seul à s'être laissé distancer dans les énergies renouvelables. Engie (Ex-GDF Suez), lui aussi, a accumulé un certain retard par rapport à ses grands concurrents européens. Pour revenir dans la course, l'énergéticien a présenté, ce mardi 18 mai, une feuille de route ambitieuse dans l'énergie solaire et l'éolien.
"Nous sommes à un moment charnière pour le monde de l'énergie avec de formidables opportunités qu'Engie doit, et va saisir", a fait valoir, lors d'une conférence de presse, Catherine MacGregor, directrice générale du groupe depuis le 1er janvier dernier. "Nous avons la chance d'entrer dans un nouveau cycle de croissance porté par la question climatique et une demande énergétique très robuste", a-t-elle ajouté.
Plus de 6 milliards dans les renouvelables
Dans le détail, Engie prévoit d'accélérer sa croissance annuelle de nouvelles capacités de production de renouvelables, en passant de 3 gigawatts (GW) actuellement, à 4 GW entre 2022 et 2025. Il vise ensuite un rythme de 6 GW par an entre 2026 et 2030. Cette cadence plus soutenue doit lui permettre d'arriver à une capacité totale installée de 50 GW en 2025, puis de 80 GW à l'horizon 2030, contre 31 GW aujourd'hui. Engie anticipe, par ailleurs, une montée en puissance de l'éolien offshore dès 2023.
Pour tenir ces objectifs, l'énergéticien va gonfler ses investissements. Alors qu'il prévoit 15 à 16 milliards d'investissements de croissance au cours des trois prochaines années, 40 à 45% de cette enveloppe sera consacrée aux capacités de production électrique à partir d'énergies renouvelables. Autrement dit, Engie devrait investir entre 6 et 7,2 milliards d'euros dans le solaire et l'éolien d'ici à 2023.
Derrière Enel et Iberdrola
Malgré cette nouvelle trajectoire, Engie restera derrière ses grands concurrents européens que sont l'italien Enel et l'espagnol Iberdrola. Le premier prévoit d'injecter 17 milliards d'euros d'ici à 2023 afin d'augmenter sa capacité de production en énergies renouvelables de 33% par rapport à 2020. Objectif : atteindre 60 GW, soit l'équivalent de 37 réacteurs nucléaires EPR. Dans un horizon plus lointain, en 2030, Enel promet d'investir quelque 70 milliards d'euros et ainsi gonfler sa capacité à 120 GW, soit le double de son objectif 2023.
De son côté, Iberdrola table sur un investissement dans la production d'énergies renouvelables supérieur à 35 milliards d'euros d'ici à 2025 afin d'atteindre une capacité de 60 GW. A plus long terme, en 2030, l'entreprise ibérique vise les 95 GW de capacité installée.
"Nos ambitions dans les renouvelables sont à la fois fortes et à la fois crédibles en termes de capacités à les réaliser", a justifié Catherine MacGregor, alors qu'Engie dispose aujourd'hui d'un portefeuille de projets de 56 GW, dont 26 GW en construction ou en développement avancé, donc "bien dérisqués", selon les propos de la dirigeante.
A la pointe de l'hydrogène
Cette accélération d'Engie dans le solaire et l'éolien intervient à un moment où de nombreux nouveaux acteurs s'invitent dans la course aux renouvelables. Depuis quelques mois, les majors pétrolières européennes multiplient les investissements dans l'énergie solaire photovoltaïque et l'éolien terrestre et offshore. Ces investissements restent minoritaires dans leurs dépenses totales, mais ces entreprises conservent, malgré la crise, des capacités d'investissement considérables.
Outre le solaire et l'éolien, Engie prévoit aussi d'investir massivement dans la production d'hydrogène bas carbone. Précurseur dans ce domaine, avec la création d'un département dédié dès 2018, l'énergéticien entend conserver une position forte et vise une capacité de production d'hydrogène vert de 4 GW en 2030. A ce même horizon, il souhaite gérer plus de 100 stations de ravitaillement.
"Le message clé c'est que toutes les activités d'Engie vont bénéficier de l'essor de l'hydrogène. [...] Nous comptons aujourd'hui 70 projets d'hydrogène vert identifiés", s'est félicitée Catherine MacGregor.
Neutralité carbone en 2045
Engie mise notamment sur la production d'hydrogène propre pour la décarbonation du gaz et pour contribuer à réduire les émissions de secteurs difficiles à décarboner. Le groupe annonce d'ailleurs s'engager sur un objectif de neutralité carbone en 2045 sur l'ensemble de ses émissions, directes et indirectes.
En février dernier, Engie avait notamment annoncé sa sortie définitive du charbon en Europe d'ici à 2025, et en 2027 dans le monde. Le groupe compte encore aujourd'hui dix centrales à charbon. Quatre vont être fermées, quatre autres seront reconverties tandis que les deux dernières seront cédées. Les cessions sont très critiquées par les ONG car elles sont synonymes de poursuite de l'activité liée au charbon, aux mains d'autres propriétaires, parfois moins regardants sur les questions climatiques.
Préparatifs en cours pour la cession de Bright
En parallèle, Engie prépare la cession de Bright, une entité qui regroupe les deux tiers de ses activités de services, employant 74.000 collaborateurs à travers une dizaine de pays. Elle doit rassembler les activités d'installations électriques, de chauffage, de ventilation et de climatisation ainsi que les services liés à l'information et la communication.
Plusieurs scénarios de sortie sont étudiés (notamment la possibilité de garder une participation), mais la principale hypothèse de travail est aujourd'hui la vente complète du capital de cette entité à l'horizon 2023.
"Bright est un projet significatif. Je vous confirme qu'il est en bonne voie. Le processus de consultation du personnel a débuté et devrait se terminer à la fin du deuxième trimestre", a indiqué la directrice générale.
"La mise en place d'une gestion indépendante de Bright au sein d'Engie au 1er juillet 2021 est une priorité", précise le groupe dans un communiqué. La phase de marketing devrait débuter dans la foulée avec pour objectif de créer, un nom (Bright étant un nom de code), un logo et une identité propre à cette nouvelle entreprise.
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