H2Med : le pipeline d'hydrogène entre Barcelone et Marseille sera étendu à l'Allemagne

Le projet de pipeline européen d'hydrogène reliant l'Espagne et la France via respectivement Barcelone et Marseille va finalement aller jusqu'en Allemagne. Baptisé « H2Med », cette infrastructure censée être opérationnelle en 2030 vise à développer l'emploi de l'hydrogène sur le continent. Elle devrait acheminer chaque année quelque deux millions de tonnes d'hydrogène vers la France, soit 10% des besoins estimés en hydrogène de l'UE.
Lancé officiellement début décembre, H2Med doit être opérationnel en 2030 et devrait coûter 2,5 milliards d'euros.
Lancé officiellement début décembre, H2Med doit être opérationnel en 2030 et devrait coûter 2,5 milliards d'euros. (Crédits : Dan Riedlhuber)

Portugal, Espagne, France et désormais Allemagne unis autour d'un projet commun de pipeline. Annoncé le 20 octobre dernier lors d'un sommet européen, il visait initialement à relier Barcelone et Marseille en sous-marin afin d'acheminer de l'hydrogène dit « vert » - car fabriqué à partir d'électricité renouvelable - depuis l'Espagne vers la France et le nord de l'UE. Mais ça, c'était avant.

« Nous avons décidé d'élargir le projet H2Med qui, grâce à des financements européens, lie le Portugal, l'Espagne et la France (...), à l'Allemagne qui sera partenaire de cette stratégie d'infrastructures en matière d'hydrogène », a déclaré Emmanuel Macron ce dimanche 22 janvier lors d'une conférence de presse commune avec le chancelier allemand Olaf Scholz. Tous deux étaient réunis pour célébrer le 60ème anniversaire du traité de réconciliation entre Paris et Berlin.

À Madrid, le ministère espagnol de l'énergie a confirmé l'accord conclu dimanche « pour l'adhésion de l'Allemagne à H2Med », qui fait suite « aux discussions entre les gouvernements espagnol, allemand, français et portugais, favorisées par leur vision profondément européenne ». L'accord « renforce la dimension paneuropéenne de H2Med » et permet à l'Espagne de « devenir une plaque tournante de l'énergie verte de la péninsule ibérique vers l'Europe centrale et du Nord », a ajouté le ministère dans un communiqué.

Lire aussiHydrogène : l'UE et le Japon en tête de l'innovation mondiale, les Etats-Unis à la traîne

Mise en service prévue en 2030

Lancé officiellement début décembre, H2Med doit être opérationnel en 2030 et devrait coûter 2,5 milliards d'euros. Outre le pipeline sous-marin, ce projet comprendra une interconnexion entre la ville portugaise de Celorico da Beira (nord-est) et la ville espagnole de Zamora (nord-ouest). Le gouvernement espagnol estime qu'il pourra acheminer chaque année quelque deux millions de tonnes d'hydrogène vers la France, soit 10% des besoins estimés en hydrogène de l'Union européenne.

Cela devrait permettre d'accélérer la décarbonation de l'industrie européenne, en lui donnant accès à une énergie propre produite à grande échelle. L'Espagne et le Portugal ont pour ambition de devenir des références mondiales en matière d'hydrogène vert, grâce à leurs nombreux parcs éoliens et photovoltaïques.

Lire aussiPipeline d'hydrogène entre Barcelone et Marseille : un projet sous-marin ambitieux mais risqué

L'idée de relier l'Espagne et la France par une infrastructure ne date pas d'hier. Dès 2013, un projet de gazoduc par les Pyrénées - appelé « MidCat » - émerge. Il est finalement abandonné en 2019 en raison de son manque d'intérêt économique, de l'opposition des écologistes et de celle de Paris. Le sujet est remis sur la table en juin suite à la guerre en Ukraine, comme solution pour se passer du gaz russe. Le Portugal et l'Espagne ont alors pressé la France de relancer ce projet, appuyés par l'Allemagne. Les quatre se mettent finalement d'accord en octobre sur un pipeline d'hydrogène plutôt qu'un gazoduc.

Lire aussiLa France cède : il y aura bien un gazoduc pour relier l'Espagne et l'Allemagne

Un projet inédit qui suscite des incertitudes

Le H2Med se heurte à plusieurs difficultés techniques, liées en partie à son caractère inédit. « Un "hydrogénoduc" sous-marin à cette profondeur, à cette distance, cela n'a jamais été fait », soulignait en décembre Gonzalo Escribano, expert du centre d'études espagnol "Real Instituto Elcano".

Pour José Ignacio Linares, professeur à l'université Pontificia Comillas de Madrid, l'un des principaux problèmes tient à la nature de l'hydrogène. Ce gaz est constitué de petites molécules susceptibles de s'échapper par les jointures du pipeline et, par ailleurs, extrêmement agressives - donc susceptibles d'entraîner des problèmes de corrosion. Reste que ces problèmes « ne sont pas insurmontables », indiquait cet ingénieur de formation. « Il suffit d'installer une membrane à l'intérieur du tuyau, une sorte de plastique, pour éviter que l'hydrogène ne s'échappe ou n'attaque » le métal.

Le véritable risque, pour les experts, porte sur la viabilité économique du projet. S'agissant d'une technologie balbutiante, « on ignore quand le marché de l'hydrogène vert prendra son essor, quand on sera en mesure d'en produire suffisamment pour l'exporter », expliquait Gonzalo Escribano. De quoi transformer la construction du H2Med en pari industriel. « Le problème, c'est que les délais de construction d'un pipeline sont tellement longs qu'on ne peut pas se permettre d'attendre. Sinon, on se retrouvera avec une importante production d'hydrogène qu'on ne pourra pas exporter », rappelait José Ignacio Linares.

Lire aussiInterconnexion gazière Espagne-France : Teréga veut rouvrir l'épineux dossier MidCat

(Avec AFP)

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 5
à écrit le 23/01/2023 à 21:36
Signaler
Très beau projet. L'ancienne carte des liaisons H2 européennes faisait exprès de ne pas relier l'Espagne et L'Allemagne. Le principal avantage du transport d'Hydrogène, c'est qu'il peut s'étendre sur des distances infinies (à l'échelle terrestre) et...

à écrit le 23/01/2023 à 15:22
Signaler
comment sera fabriqué cet hydrogène "vert"? ce projet est il en lien avec celui du gazoduc espagnol vers l'allemagne et via la france ? prévu pour transporter Du GN en provenance des USA

à écrit le 23/01/2023 à 11:48
Signaler
Il serait bcp plus écologique que l'Espagne et le Portugal exportent leur électricité verte et que l'hydrogène soit produit où il y aura la demande selon les besoins (qui sont imprévisibles). Transporter de l'électricité est plus efficace et plus éco...

à écrit le 23/01/2023 à 9:45
Signaler
Cela sera bien pire que de vivre dans l'enceinte d'une centrale nucléaire ou d'un dépôt de munition ! C'est sans autre intérêt que de faire appel à des gogos !

à écrit le 23/01/2023 à 9:44
Signaler
Après la dizaine de milliards d'euro de l'EPR, en pure perte, il n'y a pas de raison de s'arrêter en si bon chemin ! Dans un pipe, on peut tout faire passer. Mais ça doit bénéficier des investissements "verts"". Et du coup, "verdir" la macronie.

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.