Industrie : la consommation d'hydrogène repart fortement en France, portée par la chimie

L'industrie française est de plus en plus assoiffée d'hydrogène : sa consommation a augmenté de +40% en 2021 (après une chute de -25% en 2020). Mais, à 0,6% de la consommation totale, cette énergie reste néanmoins encore peu utilisée dans les usines par rapport au gaz et à l'électricité. Si la consommation énergétique industrielle a, de façon globale, affiché une hausse en 2021, elle n'a pas atteint son niveau d'avant-crise. La facture a par contre explosé en raison de la flambée des prix de l'énergie, particulièrement du gaz.
L'hydrogène n’a représenté que 0,6% de la consommation énergétique de l'industrie en 2021, qui repose encore en grande majorité sur le gaz et l'électricité.
L'hydrogène n’a représenté que 0,6% de la consommation énergétique de l'industrie en 2021, qui repose encore en grande majorité sur le gaz et l'électricité. (Crédits : BENOIT TESSIER)

+40% en un an : la consommation d'hydrogène par l'industrie française a fait un bond en 2021. D'autant plus important qu'elle avait enregistré une baisse de -25% en 2020, année de la crise sanitaire, rapporte l'Insee dans une note intitulée « La facture énergétique augmente de 46% dans l'industrie en 2021 » parue mardi 13 décembre. L'enquête porte sur la consommation d'énergie des sites industriels de 20 salariés ou plus, hors industrie de l'énergie et artisanat commercial, mais y compris récupération.

0,6% de la consommation énergétique industrielle totale en 2021

Dans le détail, 95% de l'hydrogène est consommé dans le monde de la chimie, gros utilisateur de gaz naturel. Ce secteur a augmenté la part de l'hydrogène de 2% à 3% dans sa consommation énergétique en 2021. D'autres secteurs se tournent également vers l'hydrogène, comme l'électronique, l'agroalimentaire et la métallurgie, mais dans des proportions minimes puisque cet élément représentait moins de 0,2% de leur consommation énergétique en 2021, note l'institut de statistiques.

Reste que l'hydrogène n'a représenté que 0,6% de la consommation énergétique de l'industrie en 2021, qui repose encore en grande majorité sur le gaz et l'électricité.

Consommation énergétique France 2021 (hors matières premières)

[Répartition de la consommation énergétique française en 2021 (hors matières premières). Source: Insee. Cliquer pour agrandir le graphique]

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Plus d'énergie consommée en 2021 par l'industrie...

Au total, la consommation brute d'énergie dans l'industrie a augmenté de 7% en 2021, à 34,6 millions de tonnes d'équivalent-pétrole. Elle est toutefois restée inférieure à celle de 2019, avant la crise sanitaire, notamment dans la chimie et la métallurgie.

Outre l'hydrogène, l'Insee relève que la consommation de toutes les énergies a été en hausse en 2021, mais chacune dans des proportions sensiblement différentes.

Concernant l'électricité, elle a augmenté de +8% et a ainsi retrouvé son niveau d'avant-crise. Celle du gaz est plus modérée (+6%). Ces deux sources représentent la majorité de la consommation énergétique industrielle de la France : 35,4% pour le gaz et 34,9% pour l'électricité. Loin devant les produits pétroliers (10,4%), la vapeur (7,2%), le bois (6,1%), et les dérivés du charbon comme la houille, le coke ou le lignite (3,2%).

La combustion de renouvelables comme la biomasse et les boues d'épuration, et de non renouvelables comme les déchets de caoutchouc et plastiques a représenté pour sa part 2,2% de la consommation énergétique industrielle totale en France.

En incluant l'autoproduction de vapeur par les usines et établissements, le poids de la vapeur dans la consommation énergétique des usines en France est estimé à 15% par l'Insee.

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... et une facture qui explose

Qui dit augmentation de la consommation, dit aussi augmentation de la facture finale. Dans une proportion néanmoins bien plus élevée : +46% par rapport à 2020, à 17,1 milliards d'euros courants. Cela s'explique par la hausse des prix de l'énergie. Elle atteint son plus haut niveau depuis le suivi débuté en 2005 et dépasse le niveau enregistré les années suivant la crise de 2008. Par exemple, en 2021, une tonne d'équivalent pétrole (tep) coûte en moyenne 504 euros aux établissements industriels, soit 38% plus cher qu'en 2020 et 28% qu'en 2019.

En 2021, le prix de toutes les énergies a augmenté. Le prix du gaz a cru de 66% en 2021 alors qu'il connaissait une tendance à la baisse depuis 2013 (-6% en moyenne annuelle entre 2013 et 2020). Le prix de la vapeur s'envole également en 2021 (+71 %), tout comme celui des produits pétroliers (+50%), de l'hydrogène (+30%), de l'électricité (+21%), des combustibles minéraux solides (charbon et coke, +20%).

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VAUT-IL MIEUX IMPORTER MASSIVEMENT OU PRODUIRE LOCALEMENT DE L'HYDROGÈNE ?

L'hydrogène est très recherché pour le potentiel de décarbonation qu'il offre aux industries... à condition d'être lui-même produit à partir d'électricité renouvelable (solaire, éolienne ou hydroélectrique) ou décarbonée (nucléaire) car, aujourd'hui, il reste toujours massivement (95%) produit à partir d'énergies fossiles. « L'hydrogène est indispensable pour aller vers la neutralité carbone. Il fait partie des éléments de la solution. Mais pour cela, il doit être vraiment bas carbone. Sinon, il devient un élément du problème », avertissait en octobre Bertrand Charmaison, directeur d'I-Tésé, l'institut de recherche et d'études en économie de l'énergie du CEA.

Plusieurs pays (l'Allemagne, les Pays-Bas, la Belgique ou encore le Japon et la Corée du Sud) ont opté pour l'importation massive d'hydrogène décarboné plutôt que la production. Car, par manque de disponibilité foncière, entre autres, ils ne disposeront pas assez d'énergies renouvelables électriques compétitives pour produire suffisamment d'hydrogène par électrolyse de l'eau. A contrario, le Canada, le Chili, l'Australie, le Brésil, les pays du Moyen-Orient, du Maghreb ou encore la Namibie se positionnent déjà comme de grands exportateurs d'hydrogène vert. En Europe, l'Espagne et le Portugal réfléchissent également à cette stratégie. Tous présentent des géographies et/ou un climat propice pour produire de l'électricité à partir d'énergies renouvelables à très bas coûts.

Reste que cette vision d'un commerce longue distance de l'hydrogène ne fait pas l'unanimité, notamment pour des enjeux de souveraineté. La France, par exemple, défend une production locale grâce à des électrolyseurs alimentés, entre autres, par son parc nucléaire.

(Avec AFP)

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Commentaires 2
à écrit le 14/12/2022 à 12:03
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La production d’électricité ou d’hydrogène à l’étranger peut avoir un intérêt économique. Cependant, les risques géopolitiques restent très mal appréhendés. Notre capacité à conserver un accès aux ports du sud de l’Afrique reste très aléatoire en cas...

le 14/12/2022 à 14:42
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En Espagne et Grèce y a beaucoup de soleil (photovoltaïque), du vent sais pas. Vous pensez Afrique ? Les producteurs de gaz carboné qui feront de l'hydrogène pour continuer à recevoir de l'argent, vital ?

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