La crise de l’énergie dope les renouvelables partout dans le monde, pointe un rapport

Depuis fin 2021, l’envolée des cours du gaz a stimulé la demande en énergies renouvelables, devenues rentables par rapport aux combustibles fossiles, souligne le réseau mondial de promotion des énergies renouvelables REN21 dans son rapport annuel. Mais l’équation économique reste défavorable à leur déploiement rapide. La faute à une nette augmentation des subventions au gaz et au pétrole, là aussi en réponse à la crise.
Marine Godelier
(Crédits : ANDREW BOYERS)

Fini le temps des énergies renouvelables chères et subventionnées ? Alors que le coût des éoliennes et autres panneaux photovoltaïques a connu une baisse drastique ces dix dernières années, la crise du gaz de 2022 aurait encore accéléré la tendance. Jusqu'à inverser l'équation économique, en rendant ces sources de production d'électricité bas carbone largement rentables en comparaison des combustibles fossiles, en France comme ailleurs.

C'est en tout cas ce qu'affirme le réseau mondial des énergies renouvelables REN21 dans un premier module de son rapport annuel, publié ce jeudi. En se concentrant sur les quatre secteurs les plus énergivores (le bâtiment, l'industrie, les transports et l'agriculture), cette communauté de plus de 4.000 experts favorables au déploiement de ces infrastructures pointe leur « utilisation accrue » depuis 2020.

« Aujourd'hui, on observe vraiment un intérêt particulier. Les solutions renouvelables ont été reconnues comme stables, fiables, avec un bénéfice économique et plus seulement climatique », affirme sa directrice exécutive, Rana Adib.

Dans une interview accordée récemment à La Tribune, l'ancien PDG d'EDF, Pierre Gadonneix, expliquait lui aussi que « les prix de l'éolien et du solaire ont beaucoup baissé et deviennent compétitifs ».

Preuve en est : les contrats privés d'achat d'électricité (PPA), qui permettent aux utilisateurs de fixer des tarifs d'électricité à long terme, ont augmenté de 21% rien qu'en Europe en 2022, dépassant par un record de six fois la croissance de la capacité installée d'énergie renouvelable par services publics cette année-là, souligne Rana Adib.

+10% de pompes à chaleur en un an

Et pour cause, au même moment, les prix de l'énergie ont grimpé en flèche pour atteindre leurs plus hauts niveaux depuis 2008, dopés par la flambée des cours du gaz consécutive au Covid-19 et à la guerre en Ukraine.

Résultat : dans le secteur des bâtiments, par exemple, la recherche d'un approvisionnement énergétique fiable et moins coûteux a poussé les consommateurs à accélérer le passage des chaudières à gaz aux pompes à chaleur électriques, faisant de 2022 une année record pour les installations de ces dernières (en croissance de 10% sur un an). L'électrification des transports, quant à elle, a augmenté de 54% entre 2021 et 2022, pointe le rapport. Et pour ce qui est de l'industrie, « celle-ci se tourne largement vers des alternatives non fossiles et explore des options de relocalisation, alors que l'explosion des prix de l'énergie a un impact direct sur la production », ajoute Rana Adib.

Réponse politique forte

Reste que le marché ne suffit pas : l'élaboration des politiques de réponse à la crise s'est aussi « avérée être un moteur majeur de l'adoption accrue des énergies renouvelables dans les secteurs de la demande », font valoir les experts. Et de citer l'annonce par les États-Unis de la fameuse loi sur la réduction de l'inflation (IRA) de 500 milliards de dollars, qui prévoit de nouvelles dépenses, des crédits d'impôt et des incitations pour les secteurs énergivores. Mais aussi le plan REPowerEU de la Commission européenne, conçu pour « réduire rapidement [la] dépendance [de l'UE] aux combustibles fossiles russes », en augmentant la consommation finale totale d'énergie d'ici 2030 à 45% (contre un objectif 40% jusqu'alors).

« Avec ces plans, les gouvernements reconnaissent l'importance cruciale de ces infrastructures pour répondre à la crise, avec des considérations de création d'emploi et de réindustrialisation », se félicite ainsi la directrice exécutive de REN21.

Ailleurs dans le monde, la Chine a publié son quatorzième plan quinquennal, et devrait contribuer à près de la moitié de tous les nouveaux ajouts de capacité d'énergie renouvelable dans le monde au cours de la période 2022-2027. Autre annonce marquante : en janvier 2023, l'Inde a exposé « l'un des plans les plus complets au monde » pour l'hydrogène renouvelable, comprenant un programme de subventions de 2,3 milliards de dollars pour l'industrie et les transports, poursuit le rapport.

Les subventions aux énergies fossiles augmentent

Cependant, ce tableau reste loin d'être parfait, estiment les auteurs. Car de nombreux gouvernements ont, en même temps, répondu aux crises de manière plus « court-termiste », regrette Rana Adib. « Pour diversifier les ressources en combustibles fossiles, l'augmentation de l'exploration par les cinq majors pétrolières et gazières a été encouragée », ajoute-t-elle. Dans l'Union européenne, par exemple, de nombreux investissements ont permis de remplacer le gaz russe par du gaz naturel liquéfié (GNL) acheminé par bateaux, avec la multiplication de contrats avec différents pays producteurs et la construction de terminaux méthaniers pour le réceptionner sur les côtes.

« De nombreux dirigeants continuent de subventionner les fossiles, et d'envoyer des signaux contraires avec le développement d'infrastructures de GNL ou de champs gaziers, soi-disant nécessaires face à la crise », déplore ainsi Rana Adib.

Concrètement, le soutien public aux énergies fossiles de 51 pays parmi les plus avancés de la planète est passé de 362 milliards de dollars à 697 milliards en un an du fait de la hausse des prix de l'énergie, pointait en août 2022 une étude de l'OCDE. Si bien qu'au global, les énergies renouvelables ne sont toujours « pas en mesure de concurrencer équitablement les combustibles fossiles fortement subventionnés », note le réseau REN21. Lequel formule une demande claire : réduire massivement les fonds publics alloués à l'utilisation de gaz, de pétrole et de charbon dans le monde.

Marine Godelier

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Commentaires 16
à écrit le 31/03/2023 à 11:24
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Précipitations vers les renouvelables, c'est une bonne chose pour la R&D. Mais pas forcement pour les industrialisations variées, notamment si des solutions non matures sont choisies dans cette précipitation. Au final, c'est l'efficience qui compte...

le 31/03/2023 à 15:50
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minages et fortifications en grand nombre depuis la dérouillée I-K-L

à écrit le 30/03/2023 à 20:38
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Macron qui annonce le plan de sobriété de l' eau cet été. OH MAIS QUELLE SURPRISE JE SUIS TELLEMENT ÉTONNÉE ! Où j'ai mis mon post où j'annonçais l'eau comme prochaine psyop pour les normies ?

à écrit le 30/03/2023 à 15:40
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Quelle crise de l' énergie? Celle causée par la guerre d' Ukraine organisée à dessein par la tribu des néoconservateurs fous us/ue?! Il n'y a pas de crise de l' énergie, il y a trop de médias subventionnés dans le seul intérê...

le 30/03/2023 à 16:51
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Il y a tropde borné et climato-sceptique surtout en Fra nce comme vous …. Moi quand je regarde mon jardin depuis 20 ans je vois bien que ça évolue : cerisier framboisier pommier poirier meurent , disparaissent alors qu’ Olivier et abricotier sont ...

le 30/03/2023 à 17:24
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"On parle du réchauffement anthropique cad du à l' homme, pas de celui cyclique qui nous concerne. Votre ..bornage est-il seulement surdoué et feint? Du reste au prévoit un épisode de fort refroidissement dans dix ans, 10 ....

le 30/03/2023 à 19:39
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@Jiju Je n' ai rien d' un borné même pour vous faire plaisir. Pourquoi? Je réfute le réchauffement climatique anthropique cad du à l' activité humaine qui est une des plus grosses escroquerie de l' histoire écrite par les ...

le 30/03/2023 à 19:49
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J’encourage les lecteurs comme je l’ai fait à se saisir du bouquin de Steven Koonin, Climat, la part d’incertitude – Ed l’artilleur. Oui nous sommes dans une période de réchauffement tout le monde est d’accord, elle a débuté il y a quelque 18000 ans ...

à écrit le 30/03/2023 à 14:36
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Oui on voit ineficacité des centrales photovaliques en Egypte la quatriemme centrale au Monde photo produise moins que 4Twh/an en meme temps deux reacteurs nucleaires de 1GWth produisent autour de 20Twh/an.On voir que les renouvables certent à vraim...

le 30/03/2023 à 16:55
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C est drôle vous êtes bien les seuls irréductibles français a le penser.. qu’à d je vous en Europe l essor général des alternatifs : Espagne et Danemark 40% de renouvelables ds le mix énergétique … en Fait la solution est dans le mix Renouvelable et ...

le 31/03/2023 à 11:20
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Quelle mixte. Denamark fait quoi avec l'électricité absolument rien. l'Economie de Denamark est autour de l'economie d'un village chinois ou brésilien.Qu'est-ce qu'ils font qu'est-ce qu'ils produisent rien ils travaillent en Allemagne en fait. Haha c...

à écrit le 30/03/2023 à 13:53
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On peut déjà dire que le mot "doper" n'est pas bien venue dans la suite des évènements ! Car en principe, c'est l'aspect financier qui est toujours en première ligne ! ;-)

à écrit le 30/03/2023 à 13:31
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Les enr sont intermittentes et ne peuvent pas fonctionner sans une centrale à gaz ou à charbon.

à écrit le 30/03/2023 à 12:54
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Cela fait 20 ans que les promoteurs de l'éolien et du solaire expliquent que ces énergies sont très peu coûteuses et concurrentielles, tout en demandant que les subventions continuent à leur être accordées sous différentes formes. Avec la hausse de p...

à écrit le 30/03/2023 à 11:26
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Il faut tenir mon général, vous avez raison faites du renouvelable, ouvrez des mines, coulez du béton... montez des smart grids et des smarts system... C'est bien en fait, grosso modo personne n'a compris les causes du problème. Ça ne sert à ri...

à écrit le 30/03/2023 à 9:30
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Le renouvelable ne fonctionne qui s'il est adossé à des centrales pilotables. Derrière chaque éolienne se planque des centrales à gaz ou au charbon. C'est le cas en Bretagne avec une centrale gaz de 450MW. Pas très médiatiquement correct..

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