La France et l'Espagne s'écharpent toujours sur la question d'un gazoduc au travers des Pyrénées

Emmanuel Macron a exprimé sa ferme opposition à la relance du projet de gazoduc MidCat. Abandonnée depuis 2019, cette idée est pourtant défendue par l'Espagne mais aussi le Portugal et l'Allemagne qui la voit comme une solution pour réduire la dépendance de l'UE au gaz russe. Pour Madrid, la question relève d'un « intérêt européen ».
Le projet de gazoduc MidCat permettrait à l'Espagne et au Portugal d'acheminer du gaz vers l'Europe centrale en passant par la France.
Le projet de gazoduc MidCat permettrait à l'Espagne et au Portugal d'acheminer du gaz vers l'Europe centrale en passant par la France. (Crédits : Hannibal Hanschke)

En pleine crise de l'énergie, le projet MidCat - abréviation de Midi (sud de la France) et de Catalogne (nord-est de l'Espagne), les deux régions qu'il connecterait - revient régulièrement dans les conversations. Ce gazoduc permettrait à l'Espagne et au Portugal d'acheminer du gaz, provenant sous forme de GNL des États-Unis ou du Qatar, vers l'Europe centrale en passant par la France.

Lancée en 2013, l'idée a été depuis abandonnée en 2019 en raison de son impact environnemental et d'un intérêt économique alors jugé limité. Mais, depuis juin, l'Espagne plaide pour la relancer. Le Portugal et l'Allemagne ont depuis apporté leur soutien. « Je veux de nouveau souligner que je soutiens beaucoup une telle connexion », a réaffirmé fin août le chancelier allemand Olaf Scholz.

Lire aussiL'Allemagne pousse pour un gazoduc entre l'Espagne et la France

Paris pas convaincu

Une position que ne partage pas la France. Interrogé ce lundi 5 septembre sur le sujet, le président français a estimé que le besoin d'une telle infrastructure n'était « pas évident ».

« Je ne comprends pas le problème à court terme qu'on essaye de résoudre (...). Je ne comprends pas pourquoi on sauterait comme des cabris des Pyrénées sur ce sujet pour expliquer que ça résoudrait le problème gazier : c'est faux », estime Emmanuel Macron.

Le chef de l'État a mis en avant les « oppositions environnementales » à cette infrastructure, « qui ne sont pas sans fondement », et affirmé qu'il n'y avait « pas un besoin de l'Espagne d'exporter ses capacités gazières vers la France » puisque la péninsule utilise actuellement les gazoducs la reliant à la France pour « importer » du gaz.

Les propos d'Emmanuel Macron, et notamment la référence aux « cabris des Pyrénées », ont provoqué des réactions agacées en Espagne. Le quotidien catalan La Vanguardia a ainsi évoqué des « mots antipathiques » et estimé que le président français « n'aimait pas l'amitié renforcée entre l'Espagne et l'Allemagne ».

Lire aussiGazoduc entre l'Espagne et l'Allemagne : pourquoi la France traîne des pieds

Madrid continue de défendre MidCat

Au lendemain des propos du président français, la ministre de la Transition écologique espagnole a tenu à rappeler la position de son pays. Le MidCat ne relève pas des seules « relations bilatérales » entre Paris et Madrid, a estimé Teresa Ribera sur la radio Onda Cero. « Par conséquent, le débat (sur son utilité) ne peut donc pas être clos par les déclarations d'un seul pays », a-t-elle poursuivi. Et de préciser que la construction d'un nouveau gazoduc entre la France et l'Espagne est un projet « d'intérêt européen » que Madrid va continuer à défendre.

Les défenseurs de MidCat avancent aussi l'atout selon lequel le pipeline serait en mesure de transporter, dans le futur, de l'hydrogène vert en Europe. Un argument balayé par Emmanuel Macron. « Tous les experts aujourd'hui le disent : il est faux de dire qu'un gazoduc pourra demain transporter de l'hydrogène, ça supposera des nouveaux travaux très lourds », a-t-il affirmé.

Le président français a néanmoins ajouté que si Olaf Scholz ou le président du gouvernement espagnol Pedro Sanchez venaient à lui démontrer le contraire, il serait « prêt à revoir [sa] position ».

Lire aussiL'Allemagne, l'Espagne et le Portugal soutiennent le projet d'un gazoduc reliant le sud à l'Europe centrale

Trop peu d'intérêts pour la France

Les arguments côté français à la défaveur de MidCat sont variés. « Un tel projet mettrait de nombreuses années à être opérationnel, le temps des études et des travaux pour ce type d'infrastructures étant toujours de plusieurs années, et ne répondrait donc pas à la crise actuelle », faisait-on valoir il y a quelques jours au ministère de la Transition énergétique.

La France ne trouverait en outre pas forcément son intérêt dans la construction d'un vaste pipeline permettant à la péninsule ibérique de vendre son gaz en Europe centrale. L'Hexagone dispose en plus d'un terminal de regazéification à Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône) qui lui permet d'importer de larges quantités de GNL sans avoir besoin d'un nouveau gazoduc. Et le gouvernement prévoit de construire un quatrième terminal méthanier au Havre.

Lire aussiInterconnexion gazière Espagne-France : Teréga veut rouvrir l'épineux dossier MidCat

(Avec AFP)

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 2
à écrit le 07/09/2022 à 13:02
Signaler
Bonjour, Bon sans être spécialiste des circulation d'énergie en Europe... Je constate que si c'est du gaz qui arrive par bateau, pourquoi pas aller en France, ou en Pologne voie en Allemagne, pour la livraison.... Donc si ce projet n'as pas d'autr...

le 14/09/2022 à 20:24
Signaler
Je partage cette analyse. De plus la France est un état souverain qui est maître des infrastructures construites sur son sol et ce quel que soit un pseudo intérêt supérieur Européen.

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.