Les grandes ambitions de Transition, le premier SPAC européen dédié à l'énergie

La transition énergétique voit naître son premier SPAC sur le Vieux continent. Quelles sont les ambitions de cette société baptisée Transition et pilotée par le fondateur de Direct Energie ? Comment fonctionnera-t-elle ? Quels sont les avantages d'un SPAC et les risques associés ? Explications.
Juliette Raynal
Alors que le marché des SPACs ne fait que s'éveiller en Europe, la place de Paris entend tirer son épingle du jeu, notamment face à Amsterdam qui, sur le Vieux Continent, attire aujourd'hui le plus grand nombre d'introductions de SPACs.
Alors que le marché des SPACs ne fait que s'éveiller en Europe, la place de Paris entend tirer son épingle du jeu, notamment face à Amsterdam qui, sur le Vieux Continent, attire aujourd'hui le plus grand nombre d'introductions de SPACs. (Crédits : DR)

"Transition", le premier SPAC européen dédié à la transition énergétique, fait ses premiers pas en Bourse. Après avoir finalisé une levée de 215 millions d'euros auprès d'investisseurs professionnels et institutionnels (80% basés en Europe et 20% aux États-Unis) vendredi dernier, le véhicule d'investissement cote depuis 9 h ce mardi 22 juin sur le compartiment professionnel du marché réglementé d'Euronext.

Comme les autres SPAC, cette société ne détient aujourd'hui aucun actif. En revanche, sa promesse est de faire émerger un champion européen de la transition énergétique.

"Un SPAC est souvent assimilé à une coquille vide car, au moment où il est présenté à la cotation sur le marché, il n'a pas d'actif, ni d'activité. C'est une holding qui a vocation à prendre des participations dans d'autres sociétés. Les fonds levés sur le marché servent à financer ces futures acquisitions", explique Sylvain Clavé, avocat directeur au sein du cabinet Cornet Vincent Ségurel.

Un SPAC d'entrepreneurs

Le succès de l'introduction en Bourse d'un SPAC repose donc, en très grande partie, sur le "beau profil" de ses sponsors. Dans le cas de "Transition", son PDG Xavier Caïtucoli, fondateur du fournisseur Direct Energie, tient à souligner qu'il s'agit "d'un SPAC d'entrepreneurs et non de financiers". Pour mener à bien son projet, il s'est entouré d'Erik Maris, fondateur d'une banque d'affaires, et de Fabrice Dumonteil, du fonds Eiffel Essentiel SLP.

"Ce qui va générer la confiance des investisseurs, c'est principalement l'image de marque des fondateursle fait qu'ils investissent eux-mêmes au capital du SPAC, le business plan qu'ils présentent, et les perspectives d'investissement", complète Sylvain Clavé.

La promesse de Transition? Faire l'acquisition, dans un délai de 24 mois au maximum, d'une société européenne de la transition énergétique, puis financer son développement en lui donnant accès aux marchés financiers pour en faire un grand énergéticien. "L'idée est d'aller le plus vite possible. Nous avons identifié une série de cibles potentielles. Maintenant nous allons devoir travailler avec elles", explique Xavier Caïtucoli.

Faire émerger de vrais énergéticiens

"Nous sommes entrés dans la phase 2 de la transition énergétique. Cette phase 2 va être totalement différente. Elle sera marquée par une accélération inouïe et par deux disruptions majeures. La première est de nature économique. Les efforts des dernières années nous ont permis d'atteindre 10% d'électricité renouvelable dans le mix mondial. Mais cela s'est fait à grands renforts de subventions publiques. Or, on ne peut pas aller plus loin sur les subventions. La seconde disruption est d'ordre technique : il faut que le nouveau mix électrique, où la part des énergies renouvelables sera prépondérante, apprenne à gérer seul son intermittence", expose Xavier Caïtucoli.

Selon l'entrepreneur, les acteurs des énergies renouvelables devront "se transformer pour être sur la vague de la transition". "Ils devront devenir de vrais énergéticiens", affirme-t-il. D'après lui, ces derniers devront notamment trouver de nouveaux débouchés et construire des capacités de stockage considérables.

Un besoin massif de capitaux

Mécaniquement, il y aura donc "un besoin massif de capitaux". Besoin auquel le SPAC peut justement répondre grâce à un accès facilité aux capitaux dans la durée, vante le PDG de Transition. "Le fait d'être coté représente un avantage considérable", et de donner en exemple la levée de fonds de 600 millions d'euros du producteur d'énergies renouvelables Neoen, en mars dernier.

Reste à convaincre la future cible d'opter pour une fusion avec Transition, plutôt que d'entrer elle-même en Bourse ou de se faire racheter par un concurrent.

"Pour l'entreprise cible, il y a plusieurs avantages, rappelle Sylvain Clavé. Le travail de validation par l'AMF a déjà été réalisé en amont par le SPAC en vue de sa propre cotationDans l'hypothèse où la cible serait absorbée suite à son acquisition, le SPAC propose finalement à cette dernière une cotation « clé en main ». En contrepartie, la société cible devra se soumettre aux règles contraignantes auxquelles est soumise toute société cotée", résume-t-il.

Transition rejoint les trois premiers SPACs cotés à la Bourse de Paris : 2MX organic (consommation durable) et Accor Acquisition Company (restauration, divertissement). Dans quelques jours, ce trio sera complété par DEE Tech, le premier SPAC français dédié à la Tech, dont les premiers échanges sur le marché sont attendus le vendredi 25 juin.

Risque de bulle et raréfaction des cibles

Alors que le marché des SPACs ne fait que s'éveiller en Europe, la place de Paris entend tirer son épingle du jeu, notamment face à Amsterdam qui, sur le Vieux Continent, attire aujourd'hui le plus grand nombre d'introductions de SPACs.

Mais l'Europe reste encore loin de l'euphorie observée à Wall Street autour des SPACs depuis deux ans. Alors que ce véhicule d'investissement est connu depuis une douzaine d'années, c'est un vent de folie qui traverse la Bourse américaine ces derniers mois. Au risque de l'overdose. L'an dernier, 248 SPACs se sont introduits à Wall Street pour un montant de 83 milliards de dollars, et 308 autres se bousculent au portillon depuis le début de l'année, pour un montant collecté proche de 100 milliards de dollars, selon les données du site SPAC Insider.

"C'est un marché qui paraît très spéculatif. Le marché présente des sociétés qui lèvent des centaines de millions d'euros sans posséder d'actifs. On peut donc raisonnablement s'interroger sur un risque de bulle", commente Sylvain Clavé.

Le mouvement est tel aux États-Unis, que les cibles, notamment dans la tech, deviennent rares et près d'un SPAC sur dix ne trouvent pas d'acquisitions à financer. En France, les montants levés par les SPACs sont séquestrés. Et, si la société ne trouve pas de cibles dans un délai de 24 mois, l'argent est restitué aux investisseurs.

Juliette Raynal

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Commentaires 2
à écrit le 22/06/2021 à 17:41
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L'unique ambition est de faire du fric plus que de l'écologie. Quant à sauver la planète, après eux le déluge... 😁

à écrit le 22/06/2021 à 16:54
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Le SPAC, c'est le moyen de "lever" de l'argent pour une activité future dont on ne connaît rien et dont on ne sait même pas si elle existera un jour...Imaginer alors qu'elle puisse être rentable nécessite dès lors une bonne dose d'optimisme, de folie...

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