Quel avenir énergétique pour la France ? Les Français appelés à se prononcer

Le gouvernement a lancé ce jeudi une concertation pour permettre au grand public de s'exprimer sur l’avenir du bouquet énergétique du pays, alors que la France s'apprête à lancer un vaste nouveau programme nucléaire. Sur quoi porte exactement cette concertation ? Quelle différence avec le débat public sur les futurs réacteurs nucléaires ? Comment y participer ? Comment seront pris en compte les avis des citoyens ? Ce débat peut-il faire évoluer les grands objectifs énergétiques déjà présentés par Emmanuel Macron ? Éléments de réponse.
Juliette Raynal
(Crédits : Wikimedia Commons)

En février dernier, Emmanuel Macron a fait une promesse. Celle d'organiser une grande concertation publique pour solliciter l'avis des Français sur l'avenir énergétique du pays, au moment où il annonçait vouloir construire 6 nouveaux réacteurs de troisième génération (dits EPR), voire 14, et une cinquantaine de parcs éoliens en mer afin d'accélérer la décarbonation de notre économie.

Huit mois plus tard, le gouvernement donne enfin le coup d'envoi de cet exercice démocratique. Le ministère de la Transition énergétique espère « une appétence pour ce débat » alors que « l'énergie a rarement été autant au cœur de l'actualité depuis les années 1970 et le choc pétrolier ».

1 - Sur quoi porte précisément cette concertation ?

Cette concertation nationale s'inscrit dans le cadre de la révision de la stratégie de la France sur l'énergie et le climat, qui est en quelque sorte la feuille de route de notre pays pour parvenir à la neutralité carbone en 2050. Une échéance clef pour lutter contre le changement climatique.

Dans cette optique, la France entend à la fois diminuer sa consommation énergétique et décarboner son mix énergétique, c'est-à-dire les différentes sources d'énergies nécessaires pour répondre aux besoins de notre économie. Pour cela, elle mise sur le développement des énergies renouvelables et sur le nucléaire. « Pour atteindre ces objectifs, il faut opérer des changements structurels sur notre façon de consommer, de produire, de nous loger et de nous déplacer. Cela suppose un véritable débat de société », explique le ministère de la Transition énergétique.

Très concrètement, les Français sont invités à exprimer leurs avis sur trois grands thèmes :

  • « Comment adapter notre consommation pour atteindre l'objectif de neutralité carbone ? »
  • « Comment satisfaire nos besoins en électricité, et plus largement en énergie, tout en assurant la sortie de notre dépendance aux énergies fossiles »,
  • « Comment planifier, mettre en œuvre et financer notre transition énergétique?»

2 - Quelle est la différence entre cette concertation et le débat public sur le nouveau nucléaire ?

La concertation nationale sur l'avenir énergétique de la France est lancée ce jeudi 20 octobre tandis que le débat public sur le nouveau programme nucléaire doit débuter jeudi 27 octobre pour finir le 27 février prochain. Cette superposition suscite certaines critiques car, dans les deux cas, les Français sont invités à prendre position sur des sujets énergétiques. Ce qui pourrait conduire à des confusions, ou pire être contre-productif. Les deux exercices sont néanmoins différents.

▪️La concertation nationale sur le mix énergétique de la France est organisée par le gouvernement, qui a suivi certaines recommandations de la Commission nationale pour le débat public (CNDP), une autorité administrative indépendante. Cette concertation vise à recueillir les avis des citoyens pour définir le chemin que la France doit prendre pour atteindre la neutralité carbone.

▪️Le débat public sur le nouveau programme nucléaire est, quant à lui, organisé par la CNDP, qui a été saisi par EDF. L'électricien, bientôt à 100% dans les mains de l'État, est en effet dans l'obligation de saisir la CNDP avant de lancer la construction de nouveaux réacteurs nucléaires. Pour reprendre la métaphore, il s'agit ici pour les Français d'échanger sur le modèle de voiture à choisir pour arriver au bout du chemin.

« Ce sont deux exercices séparés, mais ces deux concertations sont liées l'une et l'autre. La concertation du gouvernement aborde le système énergétique. Or, pour s'exprimer sur ce mix énergétique, il est important de comprendre le programme nucléaire », expliquent les membres de la CNDP. « Il est utile de débattre sur les deux volets. L'information sur le programme [nucléaire, Ndlr] d'EDF peut avoir un impact sur l'avis et les choix qu'effectueront les citoyens pour le mix énergétique », précise-t-on.

3 - Quelle forme la concertation va-t-elle prendre ?

La concertation s'articule autour de deux grands axes.

▪️Le premier vise tous les publics et prend la forme d'une plateforme participative en ligne où chaque citoyen peut, dès à présent et jusqu'au 31 décembre prochain, déposer son avis en répondant à une série de questions sur la consommation, la production d'énergie et l'insertion des infrastructures sur le territoire. Ils peuvent ainsi se prononcer sur le décalage des consommations, les priorités à prendre en compte pour guider l'évolution du mix électrique, les pratiques de mobilités ou encore le développement de l'éolien et le rôle des collectivités dans la transition énergétique. Ce premier pilier se déclinera aussi par un « Tour de France », avec des réunions physiques organisées dans chaque région.

▪️Le deuxième pilier vise plus particulièrement les jeunes générations avec la formation d'un « Forum des jeunesses » prévue à la mi-janvier. Pendant quatre jours, 200 jeunes gens de 18 à 35 ans, sélectionnés par tirage au sort et panélisation, se réuniront pour donner leur avis. Ils seront accompagnés par plusieurs experts, notamment issus de l'Agence de la transition écologique (Ademe) et du gestionnaire du réseau de transport d'électricité RTE, pour être formés et débattre avant de délibérer.

« Une assemblée citoyenne composée uniquement de jeunes est vraiment quelque chose d'inédit et très adapté au contexte car on parle de décisions qui auront un impact sur le long terme, voire le très long terme », pointe la CNDP. « Nous avons préconisé que les jeunesses de France puissent être représentées. Nous serons très attentifs à la manière dont cette diversité est prise en compte dans l'élaboration de cet échantillon », ajoute encore l'autorité indépendante.

4 - Comment les avis des Français seront-ils pris en compte ?

À l'issue de cette concertation, les garants de la CNDP s'engagent à exploiter et analyser le corpus des données afin de restituer la parole des participants de manière neutre et impartiale. Cet exercice donnera lieu à deux rapports (un rapport d'étape et un rapport final) qui seront mis en ligne.

De son côté le gouvernement s'engage à publier un rapport de réponse qui sera présenté devant le parlement. Ce document devra permettre d'alimenter le débat parlementaire dans le cadre de l'examen du projet de loi sur la programmation sur l'énergie et le climat, attendu au deuxième semestre 2023.

« Ce n'est pas le public qui décide. Mais, le décideur s'engage à écouter les citoyens avant de prendre sa décision », rappelle le ministère de la Transition énergétique.

5 - Cette concertation peut-elle faire évoluer les grands objectifs énergétiques présentés en février dernier par Emmanuel Macron (le développement de 50 parcs éoliens en mer d'ici 2050, la construction de 6 nouveaux EPR, et la prolongation des réacteurs en service) ?

Non. Au ministère de la Transition énergétique, on explique que les grands axes brossés par le président de la République en février dernier, commencent déjà à être mis en œuvre. Cette mise en musique s'illustre par le projet de loi d'accélération des énergies renouvelables, qui doit être examiné au Sénat d'ici à la fin du mois, et celui permettant de faciliter le lancement des chantiers de nouveaux EPR, qui doit être présenté en conseil des ministres courant novembre.

« Cette feuille de route demeure, mais il y a la question du comment, c'est ça qui est au cœur de cette concertation et il faut définir plus précisément la manière dont on va détailler cette politique », explique le ministère de la Transition énergétique.

L'exercice consiste à comprendre comment la politique énergétique se déploie dans la vie quotidienne des Français afin de voir quelles sont les options préconisées par les citoyens.

Sur la plateforme en ligne, les questions concernant le mix électrique n'invitent donc pas le grand public à se prononcer sur la part que doit y prendre telle ou telle source d'énergie, comme le nucléaire, les éoliennes marines et terrestres, ou encore le solaire.

Juliette Raynal

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Commentaires 10
à écrit le 21/10/2022 à 22:03
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Avant de parle d'avenir, ça serait bien de solder le passé et l'EPR de Flamanville dont le délais de mise en route a été multiplié par , et le cout par 4.Et ce n'est toujours pas mis en servie.

à écrit le 21/10/2022 à 19:11
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Bonjour, Personnellement je suis pour une vraie concertation, un référendum au niveau nationale.... Sur le nucléaire, sûr l'éolien, sur le photovoltaïques.... Une vrais concertation sans appel...

à écrit le 21/10/2022 à 13:09
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C'est vrai que c'est important de bien former nos jeunes à avoir la bonne opinion, autrement le débat risquerait d'être ennuyeux. Bon, vous vous souvenez de coluche er de la différence entre la dictature et la démocratie...

à écrit le 21/10/2022 à 11:48
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Démarche démagogique sachant que nous n'avons pas les éléments objectifs pour nous prononcer .tant sur la consommation future que sur les moyens de production pour la satisfaire .

à écrit le 21/10/2022 à 10:37
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Nombreux sont contre les centrales de tout type, à charbon, gaz ou uranium (surtout près de chez soi), d'autres contre les éoliennes sur terre ou mer, ou contre les panneaux photovoltaïques, d'autres contre les barrages, mais tout le monde veut du co...

à écrit le 21/10/2022 à 8:35
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Sortez "les cahiers de doléances" qui nous ont coûté si cher, pour gagner du "temps présidentiel" en le faisant perdre aux Français !

à écrit le 20/10/2022 à 22:01
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Les Français risquent fort de se positionner sur le court terme alors que pour la fourniture d’énergie il faut se projeter sur les 50 prochaines années……

le 21/10/2022 à 8:42
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cela me parait evident que m macron et ces illusions Ferais tout son possible pour faire annuler la reprise du nucleaire pour cela il suffit de convoque le machin qu'il a mis en place pour les ecolos et leur demander de valide sa proposition com...

à écrit le 20/10/2022 à 19:07
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faudrait arreter de changer d'avis toutes les 5mn, ca coute tres cher; de toute facon le jour ou les ecolobobos reviennent au pouvoir ils vont te redemolir tout ca en rigolant comme l'ont fait royal duflot cosse et consors sous hollande........ces pe...

à écrit le 20/10/2022 à 18:51
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À la bougie au train où vont les choses!

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