Réponse à la question de la reine Elisabeth II

Par Antoine Brunet, directeur d'AB Marchés.

Après 1992, 2008, nouvel "annus horribilis" pour la reine Élisabeth II. Celle-ci s'est en tout cas décidée à interpeller la London Stock Exchange (LSE) :  "Pourquoi donc personne n'a rien vu venir ? "

On le sait maintenant, c'est dès le printemps 2008 que les quatre pôles occidentaux sont entrés simultanément en récession franche. Mais il faudra attendre fin juillet 2008 pour que le consensus des économistes admette que Japon, Royaume-Uni et zone euro étaient entrés en récession franche et début septembre 2008 pour qu'il admette que les États-Unis aussi.

Qu'est-ce qui a donc aveuglé les économistes ? Ils ont tout d'abord sous-estimé les deux chocs successifs sur les matières premières. Le premier choc, qui porte le baril de 70 à 105 dollars (+ 50 %) entre fin juin 2007 et fin février 2008, relève d'un mécanisme cyclique lié à la mondialisation. Lorsque les pays occidentaux sont en fin de cycle parce que la dépense de leurs ménages finit par s'essouffler, cela n'est pas du tout le cas pour les pays émergents. Ceux-ci maintiennent encore une croissance très forte. Compte tenu d'un poids désormais de 50 % pour ces pays dans le PIB mondial, la croissance mondiale reste très forte et la surchauffe amorcée s'amplifie sur les matières premières. En 2007 comme en 2000, la hausse du baril intervient quand le ralentissement du G7 est déjà très amorcé...

Le deuxième choc est géopolitique : le baril passe de 105 à 145 dollars (+ 40 %) entre début avril et mi-juillet 2008. À compter d'avril, le président Bush a engagé une partie de poker visant à faire croire à l'Iran que se préparaient contre lui des frappes aériennes au moment des Jeux olympiques. La crainte de voir obstrué le détroit d'Ormuz a alors induit des achats de précaution sur le pétrole. L'Arabie Saoudite, parce qu'elle détestait l'idée des frappes, a par ailleurs fait monter le prix du baril pour en dissuader (avec succès) les Américains. La BCE enfin, craignant un baril durablement cher, a annoncé puis décidé une hausse de son taux, ce qui fit monter l'euro et ce qui accentua encore la hausse du baril.

Certes, dès que les États-Unis revinrent siéger le 15 juillet à la négociation avec l'Iran, le pétrole amorça une première vague de baisse, à laquelle succéda une deuxième en septembre, lorsque les investisseurs réalisèrent la récession dans les pays occidentaux.

Mais le mal était fait. La hausse prolongée de toutes les matières premières avait frappé le pouvoir d'achat et la consommation des ménages occidentaux. Et la baisse des ventes d'automobiles était enclenchée : courant 2008, - 22 % au Japon, - 26 % en Europe, - 37 % aux États-Unis.

Et les autorités chinoises auront aussi déconcerté les économistes. Ceux-ci savaient que la Chine était exposée à un ralentissement majeur en 2008 : consommation affaiblie par un très lourd effet richesse négatif, ralentissement prévisible des exportations vers les pays du G7...

Mais ils avaient cru les autorités lorsqu'elles répétaient que, pour stabiliser le chômage, elles ne laisseraient pas la croissance franchir le plancher de 8 %. Et ils tablaient sur un recours à l'arme budgétaire, ce dont elles avaient la capacité. Elles ont pourtant refusé cette option. Pourquoi ?

Sans doute parce qu'elles ont réalisé qu'elles avaient avantage à ce que la crise se prolonge et s'amplifie hors de leurs frontières. Dans un an, si la crise est toujours là, la Chine pourra démarcher les pays producteurs de matières premières et obtenir qu'ils acceptent enfin de lui vendre tel et tel gisement convoité, elle pourra démarcher aussi les pays occidentaux et obtenir qu'ils acceptent enfin de lui vendre telle et telle entreprise et son savoir-faire technologique. Parce qu'elle pense que la crise mondiale lui sera profitable sur le plan stratégique, la Chine a choisi d'écarter une relance budgétaire significative chez elle, relance qui tendrait à alléger et à écourter cette crise mondiale.

Ce sont ces trois données qui ont concouru à ce que les entreprises, au printemps 2008, révisent brutalement à la baisse leurs perspectives de croissance et de profits ainsi que leurs investissements et leurs stocks : le G7 bascule alors en récession franche et, lorsqu'à l'automne les investisseurs s'en aperçoivent, surgit une nouvelle crise de la Bourse et du crédit.
 

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Commentaire 1
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Comment peut on pondre un article comme ça sans aucunes sources pour accréditer telle ou telle affirmation, car l'article tente de dire, à mon sens, que cette crise est plus politique que financière en fin de compte ! Quoi qu'il en soit, cela m'élarg...

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