Etendre le compagnonnage aux cols blancs !

Par Patrick Bertrand, directeur général de Cegid, et président de l'Association française des éditeurs de logiciels (Afdel).

La présentation faite à la fin 2008 par Eric Besson du Plan "France Numérique 2012", dont le point 3.4 a pour thème "Accroître les usages du numérique dans l'enseignement", ainsi que l'annonce, fin novembre 2008, du ministre de l'Education Xavier Darcos, de l'allocation d'une enveloppe de 3 millions d'euros pour équiper les écoles en technologies numériques, démontrent que la volonté politique est déterminante pour faire évoluer les mentalités.

Afin de sensibiliser l'ensemble des parties prenantes du système éducatif sur l'importance de l'intégration des technologies de l'information dans la formation des jeunes, le rapport d'Eric Besson rappelle que "la maîtrise des technologies usuelles de l'information et de la communication est l'une des sept composantes du socle commun de connaissances et de compétences pour les contenus disciplinaires".

Ce pas en avant est important ! Cependant cette démarche ne peut se réduire au simple équipement technologique des établissements d'enseignement. Faire entrer les TIC (technologies de l'information et de la communication) à l'école, c'est aussi et surtout former les jeunes à l'utilisation des technologies qu'ils auront demain entre les mains pour exercer une profession. Dans ce cadre, le rôle des entreprises est essentiel.

En démontrant l'enjeu des technologies comme levier de performance au c?ur de leur activité, les entreprises peuvent sensibiliser nos jeunes à l'importance de la maîtrise de ces technologies dans leur future vie professionnelle. En accueillant des étudiants en stage, les entreprises contribuent à leur apprendre un métier, certaines d'entre elles pouvant aller jusqu'à soutenir l'effort pédagogique des enseignants en mettant, notamment, à leur disposition les logiciels couramment utilisés dans les entreprises, et ce pour un apprentissage réel et concret.

Xavier Darcos soulignait, dans un récent entretien au Figaro, le divorce entre la société et l'école, du fait, entre autres, de la trop faible contribution des entreprises à l'enseignement. Par ailleurs, on constate un réel désenchantement lorsque la question, par exemple, de la finalité des apprentissages assurés par l'école est abordée. Mais dresser ces constats n'est plus suffisant aujourd'hui car il existe un consensus : tous les acteurs de la vie sociale et économique, y compris les milieux enseignants longtemps considérés comme réfractaires, s'accordent à reconnaître la nécessité d'impliquer les entreprises dans la formation de la jeunesse de notre pays.

Il est donc temps de passer aux actes ! Pour mener à bien sa mission, le système éducatif doit transmettre non seulement des savoirs génériques (lire, écrire, compter) et une culture générale (histoire, géographie, philosophie, littérature, sciences physiques, sciences du vivant...) mais il doit également sensibiliser les élèves et étudiants à la réalité du travail en entreprise. Parallèlement, les entreprises doivent, quant à elles, prendre conscience de leur rôle de "régulateur social" en contribuant activement aux actions du monde éducatif. Ainsi, il est nécessaire d'accélérer sur cette nouvelle voie de la coopération plus étroite entre écoles et entreprises, afin de faciliter l'intégration des jeunes. L'apprentissage des techniques est un levier de professionnalisation et il appartient à l'entreprise d'y contribuer largement par un partage de pratiques.

Fournir au système éducatif des outils professionnels, contribuer à la mise en ?uvre de processus d'acquisition pratique et participer plus largement à des projets d'apprentissage : toutes ces actions constituent des leviers incontournables pour un enseignement innovant.

Le compagnonnage a très tôt compris la richesse d'une approche commune et d'un partage de pratiques entre professionnels et enseignants. Le tour de France des Compagnons est une référence en matière d'apprentissage pour les métiers artisanaux. Mais pourquoi continuer de cantonner cette "bonne pratique" aux métiers manuels ? Et pourquoi ne pas l'étendre aux cols blancs ! Les principes de l'apprentissage ne doit donc pas se limiter à quelques métiers. D'autres moyens sont exploitables, tels que faire travailler les jeunes directement sur les logiciels qu'ils utiliseront demain, par exemple.

Les structures éducatives les plus en avance et les plus en adéquation avec cette démarche sont sans doute les IUT et les écoles qui préparent à un BTS, car ces derniers l'ont inscrit depuis longtemps dans la finalité même de leurs enseignements. Les écoles de commerce et de management ont également suivi cette voie, disposant, quant à elles, de moyens financiers plus conséquents pour s'équiper.

Il est essentiel que cette démarche se généralise à l'ensemble des établissements scolaires, du primaire au supérieur, et que d'exceptionnelle, la collaboration Entreprises-Education s'impose comme une évidence.

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