Tousse en quarantaine ?

ÉDITO. Et si le confinement imposé aux millions d'habitants des grandes villes chinoises venait à s'étendre au monde entier ? Même si on n'imagine pas Paris, Londres et New York soumises au même régime que Wuhan et Pékin, les images de ces villes-fantômes alimentent les peurs. Par Philippe Mabille, directeur de la Rédaction.
Philippe Mabille
Des médecins diffusent un spray antiseptique sur une femme rapatriée de Chine en Indonésie, le 2 février 2020.
Des médecins diffusent un spray antiseptique sur une femme rapatriée de Chine en Indonésie, le 2 février 2020. (Crédits : Antara Foto/ Reuters)

Annulation du salon mondial du mobile de Barcelone, report du grand prix de Formule 1 en Chine, inquiétudes pour les JO de Tokyo... la crise provoquée depuis l'apparition du coronavirus en Chine est en train de virer à la psychose. Et si le confinement imposé aux millions d'habitants des grandes villes chinoises venait à s'étendre au monde entier ? Même si on n'imagine pas Paris, Londres et New York soumises au même régime que Wuhan et Pékin, les images de ces villes-fantômes alimentent les peurs. Peurs alimentées, aussi, par les accusations faites à la Chine de sous-estimer l'ampleur de l'épidémie, dont le bilan vient d'être drastiquement revu à la hausse en 24h seulement, après que les autorités ont décidé de changer leurs méthodes de comptabilisation.

Pour l'heure, les mesures drastiques prises par les autorités de Pékin et la fermeture des liaisons aériennes avec la Chine semblent malgré tout efficaces et en passe d'inverser la courbe des contaminations, mais la situation reste « très grave » selon l'OMS qui craint la contagion dans la trentaine de pays (dont la France) où le virus s'est manifesté.

Un impact encore difficile à mesurer

Interrogé sur un éventuel impact de l'épidémie sur le groupe de luxe LVMH, un secteur particulièrement exposé vu l'importance de la Chine dans ses ventes, Bernard Arnault avait fait une réponse prudente :

"Si ça dure deux mois, deux mois et demi, ça ne sera pas terrible. Si ça devait durer deux ans, ce serait une autre histoire".

Et de fait, toute la question est bien de savoir si le pic de la crise du Covid-19, nom officiel donné par l'OMS au virus pour éviter de stigmatiser la Chine, sera bien atteint début mars comme le pensent les plus optimistes. Auquel cas la crise n'aura que des effets limités sur l'économie mondiale. D'après Standard & Poor's, "à ce stade, la perte de croissance en zone euro et au Royaume-Uni en 2020 serait de 0,1 à 0,2%, via la baisse des exportations et des investissements des entreprises dues au ralentissement probable de la Chine" (avec une croissance abaissée à 5% contre 5.7% avant l'épidémie).

Lire aussi : Que le coronavirus déborde sur la saison été : la grosse crainte des compagnies aériennes


Mais si la crise devait durer au-delà de mars, alors là, ce Covid-19 sera un véritable "cygne noir" pour l'économie mondiale avec des effets catastrophiques qu'aucun économiste, de même qu'aucun médecin sérieux ne peut se risquer à prédire. La seule référence historique en terme de mortalité est la grippe espagnole de 1919 et ses 50 millions de morts, à une époque où la mondialisation était bien moins développée.

Aux troubles économiques, s'ajoute la crise politique

Concernant l'économie, la référence est la crise du SRAS en 2003 qui avait amputé la croissance du PIB européen sur 1 seul trimestre et celle des exportations sur 2 trimestres. Mais en 2020, l'économie européenne dépend trois fois plus de l'économie chinoise, via la demande et les chaînes de valeur. L'impact est donc potentiellement bien plus destructeur.


Pour l'instant, les conséquences négatives concernent surtout le tourisme et le luxe. Malgré quelques toussotements, les bourses mondiales n'ont pas encore été infectées et continuent même de culminer à des records. Certains voient même un impact positif sur la consommation à venir grâce à la forte baisse des cours du pétrole qui pourrait soutenir le pouvoir d'achat des ménages.

Surtout, on s'interroge sur les leçons politiques d'une crise dans une Chine coupable d'avoir imposé le silence aux médecins qui ont tenté d'alerter sur la gravité du virus, à l'image du malheureux docteur Li. Certains font le parallèle avec la crise de Tchernobyl dans l'ex-URSS dont Gorbatchev lui-même a dit que l'accident nucléaire, dont la gravité a été minorée par l'administration locale, a provoqué la Glastnost et donc la chute de l'empire soviétique. La Chine de Xi Jinping n'en est pas là, mais qui sait, ce coronavirus sera peut-être mortel aussi pour le parti communiste chinois.

Philippe Mabille

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Commentaires 3
à écrit le 13/02/2020 à 14:50
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La ville serait elle un problème ?

à écrit le 13/02/2020 à 12:50
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Pauvre peuple déjà surexploité par son pays dans le seul nom des riches du monde le voilà maintenant victime de cette hyper-productivité pour les riches du monde le nuage brun asiatique n'étant du qu'à cela. Nous sommes tous chinois.

le 14/02/2020 à 4:08
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Parle pour toi citoyen, parle pour toi.

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