Le Big Data face au défi de la confiance

Le Big data est entouré de règles légales. Mais la question de la confiance entre le consommateur et l'entreprise est primordiale. Le sujet est sensible, y compris chez les jeunes. Par Elias Baltassis Boston Consulting Group (BCG) et Carol Umhoefer, partner DLA piper

 Le Big Data est une nouvelle terre de conquête pour les entreprises. La croissance exponentielle des données dont elles disposent sur leurs clients et sur leur environnement commercial et marketing, est de nature à leur offrir des perspectives de développement spectaculaires et peut aussi leur permettre de réinventer leur business model. C'est la raison pour laquelle un nombre croissant d'entreprises se dotent des moyens technologiques et humains pour explorer cet univers complexe dont les principales composantes sont les données elles-mêmes, les moyens technologiques qui permettent de les stocker, de les traiter et de les analyser finement et des process et méthodes d'analyse qui permettent de passer de l'ère de l'observation du comportement des consommateurs à celle de la prévision et de l'anticipation des actes d'achat.

Le terrain sensible des données personnelles

Pour une bonne part, le Big Data concerne des données collectées par les entreprises auprès de leurs clients, donc des informations relatives à des personnes physiques que ces dernières livrent à chaque interaction commerciale avec l'entreprise, qu'il s'agisse de l'utilisation de cartes de crédit, des navigations sur Internet, d'informations relevées par des objets connectés, de données liées à l'utilisation de moyens de communication mobiles. Or le public est de plus en plus sensible à la façon dont sont collectées et exploitées ces données personnelles.

Des évènements récents, impliquant des organisations publiques comme le NSA ou des entreprises, victimes de vols de données, ont encore accentué la vigilance de l'opinion quant au respect de la vie privée. Certes, la protection des données personnelles fait l'objet d'un environnement juridique et réglementaire touffu, d'une interprétation parfois malaisée et en constante évolution. En France, c'est la loi Informatique et Libertés de 1978 qui fait office de garde-fou, et la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) qui est fondée à imposer des sanctions financières. Au sein de l'Union Européenne, c'est la directive de 1995 qui s'impose aux pays membres. Mais un nouveau règlement est en préparation depuis plusieurs années, qui sera probablement plus contraignant pour les acteurs du Big Data que les textes précédents.

Des obligations légales pour protéger les citoyens-consommateurs

On connaît les grands principes imposés par les législateurs : le responsable du traitement des données doit être identifié ; les finalités du traitement doivent être précises et ne sont pas malléables ; la collecte des données doit être licite et loyale ; le consentement des personnes dont l'entreprise souhaite utiliser les informations doit être libre et éclairé ; la conservation des données doit être limitée dans le temps ; le détenteur des données doit en assurer la sécurité, sachant que des obligations particulières en matière de traitement des données personnelles s'imposent aux entreprises des secteurs bancaire et des télécommunications.

Telles sont, brièvement résumées, les principales obligations légales et réglementaires qui s'imposent aux acteurs du Big Data en matière de protection des données personnelles et qui constituent un ensemble de règles et d'obligations au sein desquelles les entreprises doivent trouver leur chemin.

 Une question de confiance...

Au delà de la loi, c'est la confiance entre les consommateurs et les entreprises qui fera la différence

Même si le respect des lois et règlements s'impose à tous, il s'inscrit dans un cadre plus large, celui du lien de confiance qui unit l'entreprise à ses clients. Il est long à se tisser, il est prompt à se rompre. Qu'un client ait le sentiment que ces données personnelles sont utilisées de façon non transparente, pour des finalités mal précisées et hors de son contrôle, et l'entreprise y risque sa réputation.

Les jeunes sont tout aussi sensibles à l'utilisation de leurs données personnelles

On a cru pendant longtemps, que la sensibilité à la protection des données personnelles et donc la réticence à leur exploitation, étaient surtout exprimées par les classes d'âge les plus anciennes, et notamment par les baby boomers, alors que les jeunes générations y auraient été relativement indifférentes si ce n'est favorables. Une étude réalisée par le BCG dans vingt pays, portant sur 10 000 consommateurs, montre le contraire. L'inquiétude latente sur l'utilisation des données personnelles traverse les âges et les continents. Dans la plupart des pays étudiés, 75% des personnes interrogées considèrent que le caractère privé des données personnelles est un sujet de première importance. Ce sont évidemment les informations à caractère financier qui sont considérées comme les plus sensibles, mais aussi celles concernant la santé, les enfants, les télécommunications et la géolocalisation.

Un juste échange de valeurs

Dans ce contexte, la perception de la façon dont l'entreprise collecte et utilise les données de ses clients peut faire la différence entre deux sociétés d'un même secteur, si les pratiques de l'une sont considérées comme moins « loyales » que celles de son concurrent. La confiance est donc un élément essentiel des stratégies de Big Data. Elle peut prendre la forme d'un juste échange de valeur entre le client qui confie ses données personnelles à l'entreprise et cette dernière qui va les traiter et les exploiter. C'est à chaque entreprise de déterminer les termes de cet échange, mais les garanties de confidentialité et de sécurité des données, le transparence sur les traitements dont elles font l'objet, le contrôle par les consommateurs de leur utilisation, en font clairement partie.

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Commentaires 4
à écrit le 19/12/2014 à 6:09
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puisque de toute manière on peut faire ce qu'on veut des données collectées sans contrepouvoir ou compensation mesurée? Il suffit d'une bonne coopération entre corporatisme et pouvoir politique. Le crony-capitalisme (ou socialisme) se porte bien, pas...

à écrit le 12/12/2014 à 14:49
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article intéressant mais "big data" se dit méga-données dans la langue française.

à écrit le 12/12/2014 à 14:02
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Le Big Data, ce sont des quantités faramineuses de données, pour traiter des volumes qui seraient par exemple plusieurs centaines ou milliers de fois ceux de la sécu et des retraites réunis. Arrêtez de nous bassiner avec du 'Big Data' à toutes les sa...

le 13/12/2014 à 17:29
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Il y a les majors du net (Google, Amazon, Facebook...) ou des telecoms (Vodafone, Orange...) qui capturent au quotidien usages et déplacements. En général ces entreprises sont globales et non strictement nationales.

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