
Avec l'apparition du vaccin contre le Covid19, l'espoir d'un retour à une activité normale se précise. Cependant, les cicatrices de la crise sanitaire sont là pour durer. La stratégie du « coûte que coûte » qui a guidé le choix d'une large majorité de gouvernements pendant la crise sanitaire a fait que les dettes des États ont tout simplement explosé. L'endettement supplémentaire dû à la crise s'élève collectivement à 1.500 milliards d'euros pour les pays européens, la plupart ayant un déficit budgétaire de l'ordre de 10%. En 2020, l'endettement de l'Italie devrait passer de 135% à 160% PIB.
Avec le rétablissement de l'activité à son niveau pré-pandémique et le retour des marchés du travail à l'équilibre, tôt ou tard, les taux d'intérêt vont remonter. Les gouvernements devront dépenser des montants de plus en plus importants pour les charges de la dette. Autrement dit, tôt ou tard, d'une manière ou d'une autre, comme pour toute dette privée, il faudra, sinon la rembourser puisqu'elle ressemble de plus en plus à une dette perpétuelle, du moins diminuer les dépenses au fur et à mesure de l'augmentation de la charge d'intérêt pour faire face aux traites.
A moins que le génie administratif français n'ait la tentation de trouver une des solutions miracles auxquelles il nous a pathétiquement habitués par le passé.
Une augmentation de 1.350 milliards d'euros
Lorsque la Banque centrale européenne (BCE) a procédé à ses achats massifs d'actifs pour soutenir les économies pendant la pandémie, elle a récupéré une grande partie des dettes des États les plus dépensiers d'Europe. Son bilan, déjà en surpoids suite à la crise de 2010-2012, a dernièrement augmenté d'environ 1.350 milliards et devrait augmenter davantage au fur et à mesure de la poursuite des achats d'actifs qui devraient durer jusqu'en 2022. En conséquence, une annulation de la dette des États européens reviendrait à un défaut souverain sur un créancier public supposé compréhensif contrairement aux créanciers privés qui s'en plaindraient. En effet, il suffirait que la BCE enregistre la perte à son bilan par un simple jeu d'écriture, puis on pourrait repartir dans la joie et la bonne humeur pour des nouvelles dépenses, la BCE ne pouvant faire faillite.
Même sans considérer le problème éthique d'un défaut ou son côté illégal - point bien développé par Agnès-Bénassy Quéré, l'économiste en Chef du DG Trésor dans un Billet du Trésor du 1er Décembre - bien que les gouvernements ne sont au-dessus ni de l'un ni de l'autre, cette solution miracle pose néanmoins un problème macroéconomique.
L'annulation de dettes à l'actif de la banque centrale est la version moderne du bon vieux procédé consistant à rogner la valeur de la monnaie (en mixant du métal vil dans le métal précieux dont étaient faites les pièces de monnaie) et qui a toujours par le passé provoqué de l'inflation et des émeutes, le gouvernement passant pour un faux monnayeur. Dans les pays où la gestion du bilan de la Banque centrale est douteuse, on observe une forte corrélation entre l'inflation et la monnaie centrale.
Ainsi, l'hyperinflation que le Zimbabwe a connu de 2003-2008 est la conséquence de pertes énormes sur ses opérations quasi-fiscales, similaire à une annulation des dettes publiques au bilan. En 2008, Ulrich Klüh and Peter Stella, deux experts du FMI, ont étudié l'expérience de certains pays en voie de développement et montré que la dégradation du bilan de la Banque Centrale est systématiquement associé à une forte inflation. Depuis le lancement de son programme d'achat d'actifs en 2014, la BCE affirme que si l'inflation se manifestait, elle réduirait en urgence la base monétaire, en vendant des obligations. Mais si ces obligations se sont évaporées entre temps par la grâce de l'annulation des dettes, la BCE ne pourra qu'augmenter les taux d'intérêt de court terme, une mesure largement insuffisante s'il fallait restreindre la base monétaire.
La réputation, l'actif le plus important
Enfin, l'actif le plus important de toute banque, qu'il s'agisse de banques commerciales ou de la Banque Centrale, c'est sa réputation. Pour une banque commerciale, la bonne réputation reflète la confiance dans la stabilité de l'institution et la protection des dépôts. Pour une Banque Centrale comme la BCE, la bonne réputation reflète la confiance dans la valeur de la monnaie et la stabilité des prix. L'euro fort a fait l'objet de fortes critiques par ceux qui le rendait responsable de la perte de la compétitivité française. En réalité, ils savaient très bien que l'euro fort n'était en rien la cause mais le révélateur du manque de compétitivité français (avec le même euro les Allemands sont fortement exportateurs) et auraient voulu qu'un euro faible compense cette faiblesse de la productivité et ces surcoûts dont on connait parfaitement l'origine.
La longue force de l'euro, entièrement basée sur la force passée du Deutschemark et des performances allemandes, a rendu lointain les affres d'avoir une monnaie dépréciée que personne ne veut détenir. Cependant, une fois le cycle infernal enclenché, la fuite vers d'autre monnaies deviendrait auto-réalisatrice. La gestion impeccable jusque-là de son bilan par la BCE en ligne avec son objectif constitutionnel de stabilité des prix lui a permis de bâtir et maintenir sa crédibilité. Cependant elle n'est pas éternelle et durera autant que le maintien de cette ligne.
Les partisans de l'annulation des dettes ont peut-être un objectif de mutualisation caché. En effet pour les gouvernements les plus endettés, le coût de l'inflation serait bien moindre que le bénéfice de l'annulation des dettes. Ainsi, il y aurait un transfert du coût des dettes du Sud vers le Nord. Il va sans dire que la probabilité que les pays du Nord acceptent ce procédé est nulle. Un passage en force conduirait à coup sûr à un éclatement de la zone euro et à la constitution d'une zone Nord traditionnelle et d'une zone Sud créative. D'ailleurs, une sortie simple de l'Allemagne est possible. La dette italienne ou française auprès de la Banque Centrale n'est pas vraiment détenue par la BCE mais par les Banque Centrales nationales qui sont des filiales de la BCE. Si défaut il y a, alors les pertes seront encaissées directement par les filiales et enregistrées au niveau national. La Bundesbank pourrait reprendre ses activités sans devoir subir les pertes des autres.
La conséquence du "coûte que coûte"
Ainsi, le principe de réalité impose de ne pas rêver à une annulation de la dette mais au contraire à un long passage à la caisse, conséquence du « coûte que coûte ». Il est cependant à craindre que le gouvernement envisage de transmettre à la jeunesse actuelle la dette telle quelle, sans réellement envisager de commencer à la réduire, s'estimant suffisamment vertueux de ne pas l'aggraver, pas vraiment un cadeau pour la jeune génération.
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a le à :
enfin des gens qui ont un cerveau ( ou ont eu un cours de compta de base, voire un peu plus)..........
c'est tres curieux, mais personne ne s'est jamais demande pourquoi on trouvait l'argent sous le pied d'un cheval alors que les anciens pensaient le contraire ( surtout ceux qui ont eu la republique de Weimar, qui apporta joie et bonne humeur a l'ensemble de l'europe a sa chute.)
un bts compta sait ce qu'est ' une provision pour risque et charge' ( euh oui, avec des pays comme la france et li'talie, vaut mieux provisionner, d'autant qu'ils annoncent avant ce qu'il va se passer) et quelles en sont les consequences en fonction des scenari; pareil au niveau bancaire, pareil au niveau agrege........
des abrutis expliquent le contraire et que bienetndu ca n'aura aucune consequence, pas plus que maduro ( le copain a melenchon et hamon) ou mugabe n'en n'ont eu avec leur papier cul '21eme siecle'
si les banques centrales ont ete mises independantes, c'est precisement pour eviter que les politiciens verreux ne fassent financer leurs incompetences ' par personne via la planche a billets'
vous voulez du hitler?
parfait faites tourner les scenari, et vous allez l'avoir
quand on voit le drame de ces italiens ( peu nombreux) ruines par la faillite de monte paschi ( de memoire), on se dit qu'a l'echelle du pays et du continenent, le resultat est couru d'avance a 100%
Actuellement seules les banques privées ont la prérogative de diffuser de la monnaie dans l’économie, et quand elles le font, ce n’est que par une dette (économie monétaire de production à monnaie dette endogène). La condition de la dette est forcément la rentabilité de l’emprunteur, ce qui, les 3/4 du temps relève forcément de l’extraction et donc la pollution (entropie). Nous polluons donc notre monde au nom de la rentabilité financière.
Si au contraire je souhaite créer une activité qui réparerait la nature et préserverait les communs (néguentropie), ces activités réputées insolvables par les banques ne seraient pas financées, bien qu’elles soient essentielles et urgentes.
Le dilemme de ce système est que nous ne faisons que créer une dette interminable par roulement de dette d’agent en agent. C’est-à-dire que les agents ne peuvent se désendetter que grâce à l’endettement d’autres agents qui eux même se désendetteront à leur tour que grâce à l’endettement des agents qui se suivent. Créant ainsi une vague interminable de dette qui, forcément, deviendra exponentiellement de plus en plus haute, car à chaque agent il convient d’ajouter l’usure bancaire et la plus-value de l’entreprise. Mais comme une dette ne se rembourse que par le fruit de l’extraction (matière première = production de marchandises = Chiffre d’affaires = remboursement de la dette), nous pouvons affirmer que « la dette c’est de l’extraction à rebours ». Nous nous obligeons donc à faire des trous de plus en plus profonds dans la nature de sorte à combler des trous de plus en plus grands sur nos feuilles de comptabilité. C’est dans ce piège que nous sommes. Nous nous contraignons éternellement à une servitude pour dette, et la planète à l’extraction de ses ressources naturelles. Le tout dans un contexte où nous ne savons plus quoi inventer pour faire perdurer le modèle capitaliste que nous en sommes obligés de façon assez inconsciente à produire du « bluff ». L’obsolescence programmée fait partie de ce bluff.
Utilisons alors la « monnaie magique ». Créons un organisme de niveau banque de premier rang dédiée au climat. Cette banque aurait la prérogative de créer une monnaie qui ne serait pas une dette mais un don.
Ce don monétaire serait fléché vers les projets de la transition écologique (sociaux et humanitaire aussi). Ce serait le chiffre d’affaires d’entreprises dédiées à cela. Au moment de sa création cet argent n’appartiendrait à personne… Ce qui veut dire que personne n’aurait à le perdre dans des dépenses à fonds perdus dans des projets insolvables (comme la transition par exemple). En revanche, des entreprises auraient à le gagner en vendant des prestations.
non?
vous connaissez hitler? non, he ben vous allez apprendre a le connaitre car vous ne connaissiez pas fischer
Défaut
Inflation
Guerre
=> une grosse inflation paraît un moindre mal
Mais il ne faut pas effaroucher les marchés financiers qui font confiance à l'Europe en 'plaçant' leur argent à taux négatif, preuve de la Confiance actuelle dans l'ensemble européen. Donc on devrait Sanctuariser cette dette des États en interne à la BCE, sans surtout jouer à l'annuler !
- tout d'abord la notion de dettes, mérite quelques précisions. Less déficits liés au soutien à l'économie pendant la période covid, ont été pris en charge par les banques centrales des pays de l'Union européenne, qui ont crédité le compte des états pour financer ces déficits. C'est donc de la création monétaire, (monnaie hélicoptère), par une monétisation des dettes publiques. Ceci, en respectant les règles de la BCE, mises en place en 2008 par M. Draghi. Or les banques centrales appartiennent à 100 % aux États. La Banque de France, à titre d'exemple, doit rendre des comptes à l'état, si on tient compte du bilan consolidé de la Banque de France et de l'État, n'apparaît au passif de ce bilan que la dette qui n'est pas détenue par la banque centrale ; et la dette publque détenue par la Banque centrale c'est un prêt de l'État à lui-même.
Cette réalité n'est pas nouvelle, depuis la crise des "subprime" les pays occidentaux, ont financé une partie de leur deficit non pas par de la dette mais par de la création de monnaie.
Fin 2020 la taille du bilan de la BCE va atteindre 10 000 milliards d'euros soit une augmentation d'environ 50%en 1 an!
L'inquiétude qui doit naître de la situation actuelle est l'augmentation de la monnaie en circulation et pas de la dette,
qui en France, reste à un niveau identique d'il y a 10 ans soit environ 90% du PIB et non pas 120%.
Pour ses raisons, votre analyse sur la confiance de la monnaie et notamment de l'inflation me paraissent également fausse, surtout lorsque vous prenez l'exemple du Zimbabwe, pays que je respecte, mais pour lequel les conditions de son hyperinflation n'ont rien de comparable avec la situation de la France et de l'ensemble des pays de l'euroland.
Dommage que votre article dès le début de l'analyse traite de la dette sans avoir préciser la structure de celle ci.
Je crois que le but de cette article est encore de faire peur puisque cela vend.
L'avis sur la confiance dans l'euro et le transfert vers d'autres formes de monnaies semble plus inquiétant. Quand le peuple se rendra compte qu'on a enrichi les boursicoteurs avec la monnaie hélicoptère comme jamais au vu des cours exorbitants, et si une alternative existe, l'euro ne sera plus utilisé.
Un argument qui manque également serait le montant de la charge avec des taux d'intérêt plus élevés, une idée plus objective de sa soutenabilité apparaîtrait mais encore faut il vouloir être objectif.
Mais le dogme, LE DOGME, surtout ne pas penser à cela, c'est le mal....
Dans les années 30 à une augmentation de 40% de la masse monétaire on était certain d'avoir une inflation de même niveau, par le biais de l'augmentation du pouvoir d'achat et donc de la consommation de bien.
Aujourd'hui, la monnaie "hélicoptère", sera utilisée pour l'achat d'actifs patrimoniaux, et beaucoup moins pour l'achat de bien , ceci lorsque la confiance sera revenue sur les marchés c'est-à-dire après l'épisode covid.
Ce qui n'est pas sans problème, en effet on peut s'attendre à la création de bulles (mais pas d'inflation), notamment immobilière. L'augmenration des prix de l'immobilier observée depuis 2- 3 ans, s'est maintenue pendant la période covid, et sera d'une plus forte intensité après celle-ci. On peut egalement s'attendte à forte valorisation des actions en bourse après la période d'incertitude qui pèse actuellement sur les marchés. Etc...
Bien cordialement
Quand une banque (centrale ou commerciale) achète des euros ou des dollars, elle n'achète pas des sacs de billets. Elle achète des obligations souveraines émises dans ces monnaies, donc de la dette. Si on en venait à annuler cette dette, tous les détenteurs se débarrasseraient le plus vite possible de leurs titres émis dans cette même monnaie, conduisant à une dépréciation de la monnaie. Donc déjà une inflation importée.