« Fast furniture » : quels sont les grands changements en cours ?

OPINION. Alors que la consommation de masse a longtemps été le modèle de notre société, favorisant l'usage de courte durée et l'accumulation des biens, l'urgence écologique semble rebattre les cartes. Par Alban Lemaire, cofondateur de Airnest.
(Crédits : DR)

En quête de modes de consommation plus responsables, respectueux de leur santé et de leur environnement, de plus en plus de consommateurs se détournent de ce modèle de croissance économique, touchant notamment la manière dont ils se meublent. Et pour cause !

L'industrie du meuble a un impact fort sur notre environnement, en témoigne les chiffres européens : 11 millions de tonnes de meubles - objets de décoration et accessoires - continuent d'être mises au rebut chaque année tant par les consommateurs eux-mêmes que les enseignes d'ameublement à bas prix. Un constat alarmant certes, mais ce serait oublier le changement de paradigme à l'oeuvre et l'essor du mouvement du « slow furniture ». Allons-nous vers la fin d'un modèle ?

La « Fast Furniture », un concept aux contours bien connus

Loin d'être une nouveauté, la Fast Furniture est la conséquence de l'avènement de grandes enseignes de l'industrie low cost et de son corollaire, la production ainsi que l'importation de produits à coûts considérablement réduits. Une solution qui est loin d'être la panacée ! Poussées par la nécessité de démocratiser l'accès aux biens de consommation de la vie courante en résulte, l'hyperproduction et l'hyperconsommation. De l'obsolescence programmée des produits aux promotions à gogo, c'est tout un cycle de la « fast » consommation et production qui a infusé l'ensemble de l'industrie des produits de grande consommation. Et le marché de l'ameublement n'est pas en reste !

La mécanique est identique à celle de la Fast Fashion : des prix réduits grâce à la délocalisation de la production et de la main d'oeuvre, des collections invariablement renouvelées qui poussent à consommer à l'excès et des produits qui ne sont pas pensés pour une utilisation dans la durée. Le résultat est sans appel : ce sont 1,5 million de tonnes de meubles qui sont jetées chaque année en France, dont une partie significative finissent sur les trottoirs ou dans des décharges sauvages (1)! Efforçons-nous cependant d'être alarmants sans être alarmistes,  les comportements d'achats des Français n'ont pas fini d'évoluer, en rupture avec la surconsommation de produits neufs.

Un modèle à bout de souffle ?

Si l'objectif de l'ameublement bon marché était initialement de permettre à tout un chacun d'équiper son logement sans se ruiner, il s'accompagne d'arbitrages malheureux. Pour preuve, certaines entreprises d'ameublement ont exclusivement recours aux dérivés de bois, car moins onéreux. Un modèle économique avantageux mais finalement dispendieux côté consommateurs puisque la fragilité inhérente à ces produits réduit considérablement leur durée de vie et oblige leur renouvellement régulier ! Un paramètre largement pris en compte puisque nombreux sont les consommateurs  à se détourner de ces meubles "morts avant l'heure" et néfastes pour l'environnement. Pour preuve, 80% d'entre eux font du recours à des matériaux naturels un critère d'achat, selon une étude réalisée par Sociovision en partenariat avec l'Ameublement Français en 2021. Ce changement est finalement le produit de mutations profondes vers une société plus durable, non sans lien avec la montée de l'écoresponsabilité ! Une exigence client dont de nombreuses entreprises du secteur se sont saisies. L'essor des plateformes de revente, des labels et certifications ainsi que du modèle de la location appliqué aux biens mobiliers en est la preuve. Un changement de paradigme qu'il nous faut saluer puisque seule l'action collective permet un véritable passage à l'échelle.

Dès lors, à l'heure où le nomadisme des jeunes s'accélère, impulsé par les évolutions du marché du travail (opportunités de télétravail, tendance croissante au job hopping...), la tentation de la Fast Furniture reste encore forte. Il importe donc de changer le cœur du modèle et de rappeler que des solutions existent, permettant de réconcilier pouvoir d'achat et ameublement de qualité, telles que la location de mobilier ou l'achat de produits de seconde main. Être esthète et écoresponsable, c'est possible !

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(1) European Environmental Bureau, 2017

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