Le commerce international est bon pour la planète

OPINION. La COP 28 intelligemment organisée à Dubaï fut l'occasion renouvelée de fustiger le commerce international que certains jugent prédateur de l'environnement. Pourtant, les traités de libre-échange sont un outil juridique propice à imposer un haut standard de normes sociales et environnementales. Par Me Hervé Guyader, avocat au barreau de Paris, docteur en Droit, président du Comité français pour le droit du commerce international (CFDCI).
(Crédits : DR)

Par un raccourci non dénué de sens, les opposants au commerce mondial jugent que cette dimension et les trajets au bilan carbone que cela implique sont dévastateurs pour l'environnement. Et ce n'est pas l'argument de confort jugé « petit-bourgeois » de la satisfaction à continuer à consommer des produits exotiques qui pourrait rééquilibrer le débat. Les slogans sont connus. Comment oser manger des mangues et boire du café quand nul n'ignore que cela revient à sacrifier glaciers et banquise ?

Avant que les questions environnementales ne prennent l'ampleur qu'on leur connaît, c'était la question du déséquilibre économique et du sacrifice des industries européennes qui nourrissait l'opposition frontale réservée au TTIP, célèbre traité transatlantique par lequel l'Europe, déjà honnie, chercha à s'acoquiner avec l'ogre américain. Les agriculteurs français auraient péri, les consommateurs français auraient été empoisonnés. C'était il y a 10 ans.

Des accords de libre-échange d'un nouveau type

À l'époque, depuis l'origine du GATT (General Agreement on Tarifs Trade), accord sur les tarifs douaniers, il n'était guère question que de taxes et droits de douane, en clair de gros sous. Les esprits ont considérablement évolué depuis. Les nouveaux accords s'emparent de questions bien plus vastes de propriété intellectuelle, de normes, concernent les services et les marchés publics, l'accès aux marchés intérieurs. Le CETA, traité conclu avec le Canada en 2017, prévoyait même dans son article 11 la mutuelle reconnaissance des qualifications professionnelles, créant ainsi une sorte de programme Erasmus transatlantique.

L'Europe vise ainsi à imposer ses normes, les plus élevées, à ses partenaires commerciaux en sorte de faire taire ceux qui continuent de décrire les traités comme des vecteurs de sacrifice de droits humains et sociaux imposés par les plus stipendiés et de canaux d'importations de produits dangereux ou empoisonnés si l'on souvient des tracts promettant aux français qu'ils mangeraient du saumon canadien bourré des pires toxines. Depuis, personne n'est mort. Autre exemple : les produits fabriqués en Chine doivent satisfaire les exigences de sécurité européenne s'ils veulent pouvoir être importés, ce qui assure un haussement qualitatif important.

L'intérêt de ces nouveaux accords est qu'il est désormais question de mutuelles reconnaissances d'indications géographiques protégées : 145 appellations européennes sont désormais protégées au Canada. Le chiffre est passé à 200 lors de la signature du traité avec le Japon en 2019 (JEFTA).

Mais il y a encore mieux.

L'intégration de standards environnementaux

La nouveauté consiste à réfléchir à l'intégration des normes environnementales strictes aux futurs partenariats commerciaux. Le droit du commerce international évolue en ce sens. Le droit français a, par exemple, érigé le devoir de vigilance des multinationales qui se voient imposer des cartographies de risques et autres plans de vigilance destinés à s'assurer que leurs sous-traitants étrangers respectent avec scrupule les normes sociales et environnementales européennes et françaises.

L'image des accords commerciaux réduits à de simples canaux favorisant les échanges sans autre cadre que l'intérêt financier est révolu. Il est désormais question d'éthique sans qu'il ne soit question de décroissance. Car l'Europe et la France auront besoin de croissance et d'argent pour faire face aux nombreux défis qui se présentent : la gestion du 4e âge, les dépenses de santé, la transition écologique...

Les nouveaux accords sont autant de possibilités offertes aux exportations françaises dans un souci de responsabilité et de croissance durable. C'est tout le sens de l'ambitieux plan « Osez l'export » lancé par le ministre Olivier Becht qui vise à passer de 150.000 entreprises exportatrices françaises à 200.000 à horizon 2030. Elles n'étaient que 125.000 il y a quatre ans, avant le Covid. La progression est déjà notable.

Il faudra, pour certains, oublier la détestation viscérale du monde des affaires, de l'argent décuplée par la dimension internationale pour accepter de regarder avec réalisme les exigences financières du monde de demain.

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Commentaires 4
à écrit le 27/12/2023 à 12:34
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Quand on veut se diriger vers la sobriété et obtenir plus de résilience, on oublie les innovations inutiles qui poussent, à l'aide de leur publicité, à une consommation qui n'a aucun sens !

à écrit le 24/12/2023 à 10:54
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Manifestement, vous n’avez jamais lu le bilan de la mondialisation dressé devant l’Assemblée Générale de l’ONU en 22septembre 2020, par le Président de la République française, un homme peu connu pour sa pensée souverainiste. On y trouve les affir...

à écrit le 23/12/2023 à 9:10
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"Car l'Europe et la France auront besoin de croissance et d'argent pour faire face aux nombreux défis qui se présentent : la gestion du 4e âge, les dépenses de santé, la transition écologique..." où il est dit en priorité qu'il faudra encore se souc...

à écrit le 23/12/2023 à 8:32
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Oui vous parlez de la théorie là, tandis que la pratique a généré 6 continents de plastiques aussi gros que le Luxembourg sur nos océans, les engrais génèrent des zones mortes un peu partout dans le monde qui elles aussi grossissent et se multiplient...

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