« Animal hybride à trois pieds », le président de la CCI Paris Île-de-France à l’heure du bilan

Amorcée dès 2013 et accélérée en 2018, la réduction des crédits alloués au réseau des chambres de commerce et d'industrie a impacté ses missions d'accompagnement des entreprises, d'enseignement supérieur et d'événementiel. Président de la chambre francilienne jusqu'à fin 2021, Didier Kling témoigne de coups de butoirs réguliers de la part de Bercy.
César Armand
Elu président de la chambre de commerce et d'industrie de la région-capitale le 1er décembre 2016, Didier Kling rendra son tablier fin 2021.
Elu président de la chambre de commerce et d'industrie de la région-capitale le 1er décembre 2016, Didier Kling rendra son tablier fin 2021. (Crédits : F. Daburon/CCI Paris IDF)

Réforme des chambres de commerce et d'industrie, grève dans les transports, crise des "Gilets jaunes" et Covid-19. Élu président de la CCI Paris Île-de-France le 1er décembre 2016, Didier Kling a fait face à de multiples soubresauts économiques, politiques et sociaux. A l'heure du bilan - son mandat s'achevant fin 2021 -, l'expert-comptable de profession est fier d'avoir su transformer son établissement public en "animal hybride à trois pieds" : les missions de service public, c'est-à-dire l'accompagnement des entreprises, les missions d'intérêt général comme l'enseignement supérieur, et l'événementiel, la chambre étant actionnaire de la société immobilière du palais des congrès, de la holding Viparis et de Comexposium.

"A chaque loi de finances, on nous a pris quelque chose"

Malgré leurs trois pieds, les dotations d'Etat de l'ensemble des chambres de commerce et d'industrie ont, elles, été divisées par trois. De 330 millions d'euros le 1er janvier 2013, elles devraient atteindre les 110 millions d 'euros le 1er janvier 2022. De 600 postes dans les fonctions supports, il en reste 447 dans un groupement d'intérêt économique. De la même façon que chacune des huit chambres départementales - Paris, Seine-et-Marne, Yvelines, Essonne, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne et Val-d'Oise -, a perdu un tiers de ses effectifs, passant de 120 à 80 salariés.

"A chaque projet de loi de finances, on nous a pris quelque chose", résume Didier Kling. "Nous ne pouvons pas avoir une seule chambre pour toute la région, nous devons rester un service public de proximité comme La Poste. Un chef d'entreprise ne peut pas se permettre de faire trois heures de route", ajoute-t-il.

La réduction des crédits décrétée par le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire en juillet 2018 a en effet conduit à une réorganisation en profondeur de la CCI francilienne. En matière d'appui et d'accompagnement des entreprises, les conseillers généralistes continuent de leur rendre visite et de prendre de leurs nouvelles, alors que les spécialistes ont été répartis en onze domaines d'activités stratégiques.

Par exemple, lorsqu'une entreprise de Seine-Saint-Denis rencontre des problèmes de financement, elle doit se tourner vers la chambre de commerce et d'industrie du 92. Autre exemple, l'industrie est désormais rattachée au Val-d'Oise. "Nous pilotons toutes les opérations de mise en valeur, comme emmener les professionnels à Bondoufle dans l'Essonne en visite au centre de formation CampusFab, vitrine de l'industrie de demain", expliquait, en janvier 2020 le président de la CCI 95, Pierre Kuchly, à La Tribune.

Lire aussi 8 mnCCI 2/4 : les conséquences de la réforme en Hauts-de-France, Île-de-France, et Auvergne-Rhône-Alpes

"Bercy s'est sans doute posé la question de supprimer les CCI"

"Nous sommes devenus un opérateur de l'Etat", lâche aujourd'hui Didier Kling. "Ce serait encore plus clair si le président de la CCI était désigné au Journal officiel. Il faut rappeler que la légitimité des chambres tient à l'élection de ses membres", poursuit le président de la chambre de commerce et d'industrie de Paris Île-de-France.

Si désormais Didier Kling se demande tout haut si "Bercy s'est sans doute posé la question de supprimer les CCI", le président de la chambre de région-capitale a été mobilisé dans la gestion de la crise économique et sanitaire dès mars 2020. Représentant 820.000 sociétés franciliennes, il a déployé une centaine de collaborateurs pour répondre aux appels des chefs d'entreprise. Chaque coup de téléphone durait en moyenne quinze minutes, le temps que le patron s'épanche sur sa situation avant d'être aidé dans ses démarches.

En face, malgré la suppression de 70% des effectifs de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte), "nous avons découvert une administration très réactive", se souvient Didier Kling. Ce dernier est d'ailleurs toujours en lien avec le ministère du Travail pour résoudre des problèmes juridiques et de droit du travail liées à deux rapports parlementaires.

Le premier signé de l'ancien ministre et eurodéputé Jean Arthuis préconise l'instauration d'un Erasmus de l'apprentissage. "Quel contrat ? Quelles prestations sociales ?", s'interroge le président de la CCI. De la même façon que le député Jean-Noel Barrot, missionné par le Premier ministre Jean Castex pour faciliter le rebond économique des territoires post-Covid, plaide pour davantage d'échanges de personnel entre entreprises"Le prêt peut poser des problèmes de convention collective", pointe le président de la chambre de commerce et d'industrie de Paris Île-de-France.

La formation et l'événementiel, deux autres piliers solides

Conjointement à l'enseignement supérieur, la formation constitue d'ailleurs le deuxième grand pilier des CCIEn 2018, la chambre francilienne avait 19 écoles, majoritairement à l'équilibre, formant 60.000 personnes. Depuis, chacune a monté une structure juridique pour ouvrir son capital et établir un business plan sur au moins trois ans. Certains ont pris le statut de société anonyme, d'autres vont se lancer dans des travaux. "Nous allons reprendre les négociations avec les acteurs privés", se contente de dire Didier Kling.

Dernière mission et non des moindres: les événements. A l'arrêt complet pendant plus d'un an, les congrès et salons reprennent progressivement. Leur numérisation va "aller encore plus loin" en parallèle d'une réduction des surfaces de stand qui va "s'accélérer", prédit le président de la chambre de la région-capitale. "Les acteurs vont tous évoluer, notamment en tenant informés leurs visiteurs tout au long de l'année, via des abonnements", conclut Didier Kling.

César Armand

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.