Diversification, éthique, régulateurs : les défis des géants du Net pour 2019

Compenser la baisse des ventes d'iPhone, lutter contre les fake news pour Facebook, ou encore réduire sa dépendance à la pub pour Google... Tour d'horizon des défis qui attendent les géants du Net pour 2019.
Anaïs Cherif
Google, filiale d'Alphabet, a réalisé un chiffre d'affaires record de 137 milliards de dollars en 2018 pour un bénéfice net de 31 milliards de dollars.
Google, filiale d'Alphabet, a réalisé un chiffre d'affaires record de 137 milliards de dollars en 2018 pour un bénéfice net de 31 milliards de dollars. (Crédits : DR)

■ Fin durable de l'euphorie pour Apple ?

Lors des trois derniers mois de l'année 2018, Apple a enregistré un chiffre d'affaires de 84,3 milliards de dollars (-5%). Le bénéfice net, près de 20 milliards de dollars, est en léger repli (-0,5%). Une anomalie pour la firme à la pomme croquée, qui a l'habitude de faire croître régulièrement son bénéfice.

Ces résultats jugés décevants sont attribués à la baisse des ventes d'iPhone, alors que les fêtes de fin d'année tirent traditionnellement les achats pour cette période. L'iPhone, la vache-à-lait d'Apple, a généré 52 milliards de dollars (-15% sur un an) entre septembre et décembre. La baisse des ventes s'est particulièrement ressentie sur l'énorme marché chinois, où le groupe a vu son chiffre d'affaires total dégringoler de 27% à 13,16 milliards de dollars.

Si les résultats d'Apple restent extraordinaires, ils marquent pour beaucoup d'analystes la fin d'un cycle et les limites d'une stratégie axée sur l'éternelle montée en gamme et en prix. Apple est repassé sous les 1.000 milliards de dollars de valorisation boursière et a perdu -pour quelques semaines- sa place de première capitalisation mondiale. Alors que l'iPhone génère plus de la moitié du chiffre d'affaires d'Apple, la firme de Tim Cook doit réduire sa dépendance à son produit phare en misant davantage sur sa division services (iTunes, Apple Music, Apple Pay...). Celle-ci a enregistré une progression de 19% de son chiffre d'affaires, à 10,9 milliards de dollars. Les services représentent désormais 13% du chiffre d'affaires d'Apple, mais restent marginaux.

Lire aussi : Ventes d'iPhone : Apple est-il victime de ses prix prohibitifs ?

■ Google en pleine forme et de plus en plus dépensier

Contrairement à Apple, Google n'a montré aucun signe d'essoufflement en 2018. Alphabet, sa maison-mère, a enregistré un chiffre d'affaires de 137 milliards de dollars sur l'année - contre 111 milliards l'an dernier. La firme de Mountain View présente un bénéfice net de 31 milliards de dollars, plus du double de celui réalisé en 2017.

Le seul point noir pour Google est sa grande dépendance à la publicité, qui génère encore plus de 80% de ses revenus. Or, la firme est de plus en plus concurrencée par Facebook et désormais Amazon, qui progresse très vite depuis un an sur ce secteur. Rien de grave dans l'immédiat, car le marché de la publicité devrait continuer à croître selon les experts, et Google d'en profiter largement.

Mais le géant commence à penser de plus en plus sérieusement à se créer des relais de croissance. C'est pourquoi Google a accéléré sa diversification en 2018, et devrait encore amplifier le mouvement cette année. Les dépenses du groupe ont explosé à 25,14 milliards de dollars l'an dernier (+30% sur un an), faisant baisser les marges de 24% en 2017 à 21% en 2018.

Ces dépenses sont notamment réalisées dans de nouveaux data centers afin de rattraper son retard dans le cloud sur Amazon, numéro un mondial, et Microsoft. Le géant de Mountain View dépense également énormément pour développer de nouvelles solutions d'intelligence artificielle sur la base du machine learning et soutenir sa stratégie de diversification dans les contenus musicaux et vidéo via YouTube.

| Lire aussi : Google : des résultats records et une soif intacte de conquête du monde

■ Cerné par les polémiques et les régulateurs, Facebook mise sur WhatsApp et Messenger

2018 aura été une année noire pour Facebook en terme d'image... Mais côté finances, tous les indicateurs sont restés bons. Le plus grand réseau social au monde a enregistré un chiffre d'affaires de 55,83 milliards de dollars (+37% sur un an, meilleur qu'anticipé). Le bénéfice net est aussi en forte hausse (+39%) à 22,1 milliards de dollars. La plateforme vu son nombre d'utilisateurs mensuels actifs grimper de 9% sur un an, à 2,32 milliards, des chiffres également supérieurs aux attentes.

Mais ces résultats sont en trompe-l'œil. Pour 2019, le réseau social doit faire face à des défis à la fois éthiques et financiers. Mark Zuckerberg est désormais cerné par les régulateurs du monde entier, à la fois sur la question des données personnelles et sur le sujet très sensible des fake news, notamment en France, en Europe avec la perspective des élections européennes, et en Australie où le gouvernement veut lui faire "prendre ses responsabilités".

Le défi est aussi financier car le groupe anticipe un ralentissement de la croissance de Facebook en 2019. Il mise donc sur ses relais de croissance, qui sont ses applications à succès Instagram, dont les annonceurs raffolent, et WhatsApp, qui reste à monétiser. Mark Zuckerberg a même annoncé qu'il réfléchissait à fusionner les trois entités... ce qui pourrait engendrer une nouvelle levée de bouclier de la part des utilisateurs.

■ Amazon sous la menace de l'Antitrust américain

La firme de Seattle a vu son chiffre d'affaires gonfler de 31% à 232,9 milliards de dollars en 2018, pour un bénéfice net de 10,1 milliards de dollars - soit plus du triple de celui réalisé en 2017. Comme toujours, le groupe de Jeff Bezos a été dopé par sa division cloud, baptisée Amazon Web Services (AWS). Pionnier dans l'informatique dématérialisée, Amazon est numéro un mondial dans ce secteur très porteur, avec un chiffre d'affaires généré de 25,7 milliards de dollars (+47% sur un an).

L'ogre du e-commerce se renforce également dans la publicité en ligne, et commence à empiéter sur les plates-bandes du duopole Google/Facebook. Il confirme sa forte croissance dans le domaine, avec des revenus de 3,4 milliards de dollars lors du dernier trimestre - soit près du double réalisé à la même période en 2017.

Connu pour ses emplettes, Amazon a continué sa diversification à tout-va dans le cloud, la maison intelligente, la santé, et son expansion dans les pays émergents, à l'image de l'Inde. En 2019, il devrait remettre le couvert... tout en se méfiant des velléités de l'antitrust américain, saisi par Donald Trump. En Europe aussi, Amazon est dans le viseur des autorités de régulation. En septembre dernier, la Commission européenne a lancé une enquête pour déterminer si Amazon abuse de sa position dominante.

| Lire aussi : Publicité : Amazon peut-il s'imposer face à Google et Facebook ?

■ Twitter en quête "d'assainissement"

Après avoir perdu de l'argent pendant plus de dix ans, Twitter vient de boucler sa première année complète de profitabilité. Le site de micro-blogging a enregistré un chiffre d'affaires de 3,04 milliards de dollars (+25% sur un an) en 2018, tiré par la hausse de ses revenus publicitaires. Il a présenté un bénéfice net de 1,20 milliard de dollars, contre une perte de 108 millions un an plus tôt.

Lire aussi : Première année de rentabilité : Twitter récolte les bénéfices de sa lutte "anti-trolls"

Une ombre au tableau persiste : Twitter accuse une baisse du nombre d'utilisateurs mensuels actifs - un des critères particulièrement scrutés par les analystes - avec 321 millions d'usagers, contre 330 millions en 2017 (-3%). Ce fléchissement est imputé à sa lutte "anti-trolls", ayant entraîné des vagues de suppressions de comptes douteux l'année dernière. Pour 2019, le Pdg de Twitter, Jack Dorsey, a annoncé vouloir amplifier cette stratégie "d'assainissement" de la plateforme à long terme - quitte à perdre des utilisateurs dans l'immédiat.

Anaïs Cherif

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Commentaires 6
à écrit le 13/02/2019 à 9:13
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Dire que ça fait dix ans que les utilisateurs de Twitter n'arrêtaient pas d'avertir les responsables de celle-ci de cette invasion... Où quand les consommateurs sont plus visionnaires que les propriétaires d'outils de production.

à écrit le 12/02/2019 à 20:31
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Un autre défi pour les gafa: payer leurs impôts comme les autres.

à écrit le 12/02/2019 à 11:15
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voir récent article du Financial Times sur les GAFA qui s'efforcent d'enjoliver la présentation de leurs comptes : Tech titans try to dazzle with jargon, but just lack substance, Financial Times, 08/02/2019.

à écrit le 12/02/2019 à 9:46
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Concernant Facebook, imaginons un scénario selon lequel ce réseau fonctionnerait sans utilisateurs. C'est tout à fait possible: que des faux comptes et une intelligence artificielle qui inventerait des échanges. Nous aurions une entreprise totalement...

à écrit le 12/02/2019 à 9:06
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Les Gafa et leurs montagnes de fric font baver le bon peuple. Qu'ils commencent par payer les impôts qu'ils doivent. Comme le bon peuple.

le 12/02/2019 à 9:32
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le mioeux est d essayer de s en passer..... facebook et amazone ne sont pas indispensables.... google c'est un peu plus compliqué... mais on peut avoir qwant comme navigateur par défaut sur son ordi.....et son téléphone

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