Haine en ligne : le gouvernement veut mettre les réseaux sociaux devant leurs responsabilités

Après le meurtre de l'enseignant Samuel Paty, le gouvernement va proposer de nouvelles dispositions pour lutter contre la haine en ligne. La députée de Paris et porte-parole LREM Laetitia Avia, déjà à l'origine d'une loi sur le sujet retoquée cet été par le Conseil constitutionnel, veut notamment instaurer un "permis Internet" ou encore la création d'un délit de "mise en danger d'autrui par la publication de données personnelles". Explications.
Anaïs Cherif
Les nouvelles dispositions seront intégrées dans la loi contre la lutte des séparatismes, qui doit être présentée le 9 décembre pour un passage devant l'Assemblée nationale en janvier.
Les nouvelles dispositions seront intégrées dans la loi contre la lutte des séparatismes, qui doit être présentée le 9 décembre pour un passage devant l'Assemblée nationale en janvier. (Crédits : Dado Ruvic)

Nouvelle tentative. Le gouvernement va proposer de nouvelles dispositions pour lutter contre la propagation des contenus haineux sur Internet. Alors que la très controversée "loi Avia" a été censurée par le Conseil constitutionnel en juin dernier car jugée incompatible avec la liberté d'expression, l'épineuse question de la modération des réseaux sociaux est revenue dans le débat public suite au meurtre du professeur Samuel Paty par un terroriste à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines) le 16 octobre.

Les nouvelles dispositions seront intégrées dans la loi contre la lutte des séparatismes, qui doit être présentée le 9 décembre pour un passage devant l'Assemblée nationale en janvier. La principale nouveauté : la mesure phare de la loi Avia, qui imposait la suppression des contenus jugés litigieux en 24 heures, est définitivement enterrée, a affirmé Laetitia Avia dans un entretien accordé à l'Obs ce lundi. La députée de Paris et porte-parole LREM dit désormais vouloir s'attacher "au processus qui mène au retrait, avec une exigence et une vigilance beaucoup plus forte".

C'est pourquoi le gouvernement souhaite renforcer les obligations de modération qui incombent aux plateformes comme Facebook, Twitter ou encore YouTube, pour que leurs moyens "humains, techniques et financiers soient bien proportionnels à leur activité", selon la députée. "On veut que les plateformes fassent plus attention à ce qu'il se passe sur leurs outils. Et, concrètement, qu'elles recrutent des milliers de modérateurs", chiffre Laetitia Avia auprès de l'Obs.

Vers des obligations de transparence pour les réseaux sociaux

La question de la modération des contenus pour ces plateformes ressemble à un véritable jeu d'équilibriste. Les géants américains sont légalement considérés comme des hébergeurs, et réfutent le statut d'éditeur et les responsabilités qui vont avec. Conséquence : si les réseaux sociaux suppriment trop de messages de façon arbitraire, ils sont accusés de censure et d'atteinte à la liberté d'expression. Au contraire, s'ils laissent des messages à caractère haineux se propager, ils sont accusés de laxisme.

Le gouvernement veut donc les inciter à plus de transparence quant à leurs pratiques de modération, jugées trop opaques. Une obligation de transparence sur les retraits automatiques de contenus par algorithmes devrait être instaurée. "Je ne suis pas contre la pratique, mais il faut savoir ce qui est retiré. Est-ce qu'il s'agit des pires contenus, des plus atroces, des plus terroristes, des plus illégaux ? Si oui, alors il faut une information systématique des autorités" afin que celles-ci puissent sanctionner les auteurs de propos litigieux, affirme Laetitia Avia.

Pour tenter d'avoir plus de poids face aux géants de la tech, le gouvernement souhaite porter le débat au niveau européen dans le cadre du Digital Services Act, qui sera présenté par la Commission européenne le 2 décembre.

Sensibiliser les jeunes avec un "permis Internet"

La députée a également confirmé la création d'un délit de mise en danger d'autrui par la publication de données personnelles. Le Premier ministre Jean Castex avait annoncé cette disposition au lendemain de l'assassinat de Samuel Paty, alors que son nom et l'adresse du collège où il travaillait avaient été divulguées sur les réseaux sociaux.

Alors que le gouvernement opte pour une stratégie articulée en trois axes, "réguler, sanctionner et protéger", le dernier volet concernera la sensibilisation. Laetitia Avia propose ainsi la création d'un "permis Internet" pour les collégiens. Il s'agirait d'un examen inspiré de "l'attestation scolaire de sécurité routière qui permettrait de sensibiliser dès le plus jeune âge à l'usage des réseaux sociaux".

Anaïs Cherif

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 6
à écrit le 03/11/2020 à 14:20
Signaler
Que veut dire: "Le gouvernement veut mettre les réseaux sociaux devant leurs responsabilités" si ce n'est qu'elle n'a rien fait jusque là et se déresponsabilise!

à écrit le 03/11/2020 à 7:36
Signaler
... et ainsi commença la fin de la liberté d'expression et le triomphe de la novlangue bien-pensante universelle...

à écrit le 02/11/2020 à 19:43
Signaler
Les réseaux sociaux sont une caisse de résonance pour les rumeurs. Pas la source. Ils ont sans doute un côté desinhibant. Il est plus facile d’aller dans le sens de la foule. Mais bon, c’est pareil avec les commentaires.

à écrit le 02/11/2020 à 18:02
Signaler
Et en ce qui concerne la haine à la télé ? Toujours rien ? Parce qu'en ce moment il faut voir comme ils nous parlent... "délit de "mise en danger d'autrui par la publication de données personnelles"" On se demande vraiment pour qui elle fait ...

à écrit le 02/11/2020 à 17:58
Signaler
On ne peut qu'approuver la formulation. Il faut créer un délit de responsabilité des fournisseurs de réseaux sociaux sur lesquels on insulte et provoque haine et violence. A eux de donner les responsables s'ils veulent s'en exempter. L'anonymat sur ...

le 03/11/2020 à 12:57
Signaler
Et toi ,ton nom c'est 19 ?

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.