E-commerce : comment les licornes de la French Tech cohabitent avec Amazon

DOSSIER E-COMMERCE. Cinq des 25 licornes françaises adressent le secteur de l'e-commerce. C'est la preuve que la French Tech arrive de façon répétée à se frayer un chemin sur ce marché pourtant largement dominé par Amazon. Pour réussir à cohabiter avec l'incontournable géant américain, les startups à succès françaises ont adopté deux types de stratégie. Certaines se positionnent sur les segments de marché délaissés par Amazon, tandis que les autres se positionnent comme fournisseurs d'outils pour se passer d'Amazon.
François Manens
(Crédits : DR)

Pour se faire une place dans le secteur du commerce en ligne, il faut réussir à cohabiter avec l'ogre incontournable Amazon. Une tâche loin d'être évidente, tant le géant américain affiche une large avance sur de nombreux plans. Une avance qu'il s'attache d'ailleurs à conserver, quitte à employer des pratiques aux limites des règles de la concurrence.

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Là où les acteurs historiques comme Fnac-Darty ou Cdiscount tentent de coexister avec Amazon sur le même créneau d'activité, les pépites de la French Tech essaient quant à elles d'aller sur des terrains encore inoccupés par l'entreprise de Jeff Bezos. Avec succès, puisqu'elles arrivent à convaincre les investisseurs du potentiel de leur activité. Résultat, 5 des 25 licornes (startups non cotées et valorisées au moins 1 milliard de dollars) de l'écosystème français ont réussi à trouver leur place dans l'e-commerce.

Pour atteindre ce seuil prestigieux, deux stratégies se distinguent. D'un côté ManoMano, Vestiaire Collective et Back Market se sont installés dans les niches délaissées par Amazon. De l'autre, Ankorstore et Mirakl affichent des ambitions encore plus grandes : fournir aux commerçants des outils pour se passer du géant américain.

S'engouffrer dans les espaces laissés par Amazon

Vestiaire Collective (2009), ManoMano (2013) et Back Market (2014) sont trois places de marchés (ou "marketplace" dans le jargon), c'est-à-dire des plateformes similaires à Amazon sur la forme, qui mettent en relation des vendeurs avec les clients finaux. Sauf que sur le fond, chacune d'entre elle a trouvé son succès dans un secteur délaissé ou pas encore monopolisé par le géant américain.

Vestiaire Collective organise l'achat et la vente de produits de luxe de seconde main entre particuliers. Autrement dit, la startup a numérisé un marché de l'occasion sur lequel Amazon ne s'est jamais lancé, mais qui était tout de même occupé par d'autres têtes de file comme eBay.

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Mais avec son positionnement relativement étroit - le vêtement et les accessoires de luxe - et de multiples levées de fonds, Vestiaire Collective a fini par creuser son trou. Pour la pépite française, la menace s'appelle plutôt Vinted, une plateforme lituanienne créée un an plus tôt, positionnée sur un spectre plus large de produits de seconde main, mais qui grignote des parts de marché dans le luxe.

De leur côté, les français de ManoMano mettent en relation sur leur plateforme des vendeurs de produits de bricolage avec les clients finaux. Plus technologique que les acteurs historiques du secteur (Leroy Merlin, Castorama...), mais doté d'une expertise métier plus pointue que Amazon et consorts, ManoMano a réussi à se construire une niche à part. Désormais, il doit garder son avance à la fois du côté technologique et du côté métier pour maintenir sa place de leader européen.

Enfin, Back Market a misé sur le marché du reconditionné, ces produits d'occasion réparés avant leur mise en vente. Un marché encore délaissé par Amazon, qui se contente de proposer une offre de produits d'occasion ou simplement déballés. La startup française agrège les offres de marques connues et celles de vendeurs indépendants pour les afficher aux clients.

Ankorstore et Mirakl veulent permettre la vie en ligne sans Amazon

Contrairement aux trois exemples précités, Mirakl et Ankorstore ne s'adressent pas aux clients finaux. Leurs cibles sont les commerçants, auprès desquels les deux champions français se présentent comme des outils pour se passer d'Amazon.

Une des grandes forces du géant américain est de proposer un catalogue de produits immense, et des volumes énormes qui lui permettent de tirer les prix à la baisse pour les clients. Pour des enseignes qui voudraient se lancer en ligne, ce problème de diversité du catalogue peut devenir un véritable frein.

C'est ici qu'intervient Ankorstore, qui a atteint le statut de licorne à la faveur d'une méga-levée de fonds de 250 millions d'euros le 10 janvier. La jeune pousse a construit une marketplace spécialisée dans l'achat en gros, sur laquelle les boutiques - en ligne ou non - peuvent acheter des produits à prix avantageux pour diversifier leur offre.

La startup ambitionne ainsi de "réinventer le marché du commerce de détail en uniformisant les règles du jeu, afin de permettre aux détaillants indépendants de prospérer et de rivaliser avec les géants du e-commerce et de la grande distribution".

L'entreprise s'imagine comme un contre-pouvoir, qui donnerait la possibilité aux petits commerces de proposer une large gamme de produits à des tarifs proches de ceux d'Amazon et des autres golgoths.

De son côté, Mirakl ne cache pas son positionnement comme alternative à Amazon, et elle en a même fait un argument de vente. Editrice d'un logiciel de création de marketplace, la licorne permet à n'importe quel commerce de créer sa propre plateforme de vente en ligne. Là où Ankorstore ambitionne de combler les différences sur l'offre de produit, Mirakl s'attèle à réduire l'écart technologique avec le géant du secteur.

Et pour cause : peu d'entreprises ont les moyens de construire une marketplace sur-mesure, qui fonctionnerait correctement, sans même parler de rivaliser avec Amazon. Mirakl offre donc tout un éventail d'outils - et un accompagnement plus ou moins poussé dans le développement - à ses clients pour créer une marketplace efficace.

Résultat : en à peine quelques mois, Mirakl peut accompagner une entreprise dans la création de sa propre place de marché. Sa technologie se trouve ainsi derrière les plateformes de Darty, Auchan, les Galeries Lafayette ou encore Leroy Merlin.

Sans parler de forcément battre Amazon, les deux licornes permettent à un relative large nombre d'acteurs de construire des alternatives viables et de ne pas devenir dépendantes de l'ogre de Seattle.

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François Manens

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