L'ambition dévorante d'Elon Musk ne rencontre pas, à ce jour, d'obstacle. Dans un entretien diffusé sur la chaîne américaine conservatrice FoxNews lundi 17 avril, le patron de Twitter a expliqué travailler à la création de sa propre intelligence artificielle. Objectif affiché, concurrencer les autres acteurs du secteur, accusés de ne pas inclure suffisamment de garde-fous.
« Je vais lancer quelque chose qui s'appelle Truth GPT ou une IA qui recherche la vérité maximale et qui essaie de comprendre la nature de l'univers », a détaillé Elon Musk.
Elon Musk multiplie les investissements
Le patron de Twitter, Tesla, SpaceX et Neuralink estime qu'il s'agit de la « meilleure voie » pour garantir la sécurité de l'humanité, car « une IA qui se soucie de comprendre l'univers ne risque pas d'anéantir les humains, parce que nous sommes une partie intéressante de l'univers. »
Cette IA idéale agirait selon lui un peu comme les humains, qui aspirent « à protéger l'habitat » des chimpanzés, alors qu'ils auraient la capacité de « tous les chasser et les tuer ».
Différents médias spécialisés avaient déjà rapporté depuis quelques semaines qu'Elon Musk investit dans le domaine de l'intelligence artificielle, à l'image d'autres géants du numériques. Selon leurs sources anonymes, il a récemment recruté Igor Babuschkin et Manuel Kroiss, tous deux passés par DeepMind, la branche d'IA d'Alphabet (maison mère de Google).
Il aurait aussi acheté quelque 10.000 processeurs graphiques, des ordinateurs nécessaires pour entraîner des modèles de langage, c'est-à-dire la fondation des systèmes d'IA générative. Elon Musk a également fondé en mars une nouvelle entreprise spécialisée dans ce domaine, baptisée X.AI et basée dans le Nevada.
Concurrencer OpenAI
Le document officiel d'enregistrement de X.AI, daté du 9 mars 2023, indique un seul directeur, Elon Musk et un secrétaire, Jared Birchall, un ex banquier de Morgan Stanley qui gère la fortune du multimilliardaire, selon le Financial Times.
« X » est un symbole mathématique que le patron de Tesla affectionne particulièrement. On le retrouve dans le prénom d'un de ses enfants, un garçon baptisé X Æ A- 12. Avant l'acquisition de Twitter il avait multiplié les allusions cryptiques à « X », sa vision d'une application à tout faire (messagerie, réseau social, services financiers...), comme WeChat en Chine.
Toujours selon le quotidien britannique, cette nouvelle entité, X.AI, a pour ambition directe de rivaliser avec OpenAI, la start-up californienne qui a conçu ChatGPT, une IA de dernière génération capable d'interagir avec les humains et de produire toutes sortes de textes sur demande. Le succès de cette interface depuis sa sortie fin novembre a lancé une véritable course à cette technologie à fort potentiel.
Les enquêtes sur ChatGPT se multiplient
Elon Musk a cofondé OpenAI en 2015, avant de quitter l'entreprise en 2018. Il a depuis critiqué la société, estimant notamment dans un tweet en décembre dernier qu'elle entraîne l'IA à être woke (terme désignant une frange de la gauche américaine), c'est-à-dire à « mentir » selon lui.
L'entrepreneur a pourtant signé le mois dernier un appel à faire une pause dans la recherche sur les IA de dernière génération. Les centaines de signataires évoquent différents risques liés à cette technologie, et s'interrogent en ces termes : « Est-il souhaitable de développer des esprits non humains qui pourraient au final nous dépasser en nombre et en intelligence, et nous remplacer ? ».
Récemment, plusieurs Etats ont annoncé l'ouverture d'enquêtes relatives à ChatGPT, dont l'Espagne et le Canada. En France, la Cnil a décidé d'ouvrir « une procédure de contrôle » pour instruire cinq plaintes contre le robot d'intelligence artificielle ChatGPT, dont celle déposée par le député Eric Bothorel, a indiqué l'autorité française de protection des données personnelles à l'AFP la semaine passée.
Interdiction en Italie
Par ailleurs, l'EDPB (Comité européen de la protection des données), qui est chargé de coordonner les autorités équivalentes à la Cnil des différents pays membres de l'UE, a annoncé la création d'un « groupe de travail dédié » pour favoriser la coopération européenne sur le sujet.
Cette initiative, explique l'organisme européen, a été prise suite à la décision de l'autorité italienne de bloquer ChatGPT en Italie tant que le robot conversationnel de la société américaine OpenAI n'aura pas pris des mesures de transparence et de protection des données des utilisateurs. L'EDPB veut aussi un échange d'informations entre autorités européennes sur les éventuelles actions qui pourraient être prises envers ChatGPT.
En France, le député Eric Bothorel (Renaissance) a porté plainte mercredi contre ChatGPT auprès de la Cnil pour de possibles infractions au Règlement général européen sur la protection des données (RGPD).
Chaque autorité nationale de protection des données peut décider souverainement d'interdire tel ou tel site non-européen dans son pays, si elle estime qu'il ne respecte pas le RGPD. Il n'existe pas d'autorité européenne centralisée dont l'avis s'impose mais seulement un principe collaboratif, a rappelé à l'AFP l'avocat spécialisé dans le numérique Eric Le Quellenec, du cabinet Simmons & Simmons.
(Avec AFP)
Sujets les + commentés