« Les plateformes ne peuvent plus se cacher », a tancé Thierry Breton face à la presse française, ce lundi 16 octobre. Après une semaine marquée par ses échanges publics sur la modération de X (ex-Twitter) avec Elon Musk, le commissaire européen au marché intérieur voulait marquer le coup.
Et pour cause, le conflit entre Israël et le Hamas a mené plus tôt que prévu à un test grandeur nature du Digital Services Act (DSA), le règlement européen de régulation des grandes plateformes en ligne. Entré en vigueur le 25 août dernier, il permet notamment à l'Union européenne de demander des comptes aux plus grands réseaux sociaux, comme X, Facebook et Instagram, TikTok ou encore YouTube.
Des questions avant les sanctions
L'institution a immédiatement utilisé ses nouveaux pouvoirs après les premiers attentats. Les équipes dédiées du DSA ont posé des « questions précises » aux dirigeants des plateformes sur les moyens mis en œuvre pour gérer la modération des échanges autour du conflit. Elon Musk (X), Mark Zuckerberg (Meta) ou encore Sundar Pichai (pour YouTube) avaient ainsi un délai de 24 heures pour répondre.
« Nous avons demandé une réponse en urgence. Tout le monde doit être en état d'alerte. Il y aura un avant et un après octobre 2023 », a justifié Thierry Breton.
Concrètement, l'UE attend des mesures suffisantes pour « faire face à la recrudescence des propos illégaux ». « Grâce au DSA, nous leur disons de façon claire leur responsabilité en Europe qui est désormais encadrée par la loi », a insisté le commissaire au marché intérieur. Suite à ces « premières apostrophes », les spécialistes de l'UE vont analyser les réponses. Dans le cas de X, ils ont déjà décelé certains manquements.
« X va dans le bon sens sur certains points, mais d'autres restent insuffisants. C'est pourquoi nous lançons une enquête approfondie avec des questions plus techniques », a précisé Thierry Breton.
Toujours selon ce dernier, la PDG de X, Linda Yaccarino a fait une réponse assez détaillée sur l'augmentation des moyens de modération - bien qu'Elon Musk a supprimé des milliers de postes de modérateurs dès sa prise de pouvoir -, et indiqué la suppression de centaines de comptes pro-Hamas. Mais d'autres points coincent.
Y aura-t-il un temps des sanctions ?
Pour l'instant, les initiatives européennes se limitent à ce jeu de questions-réponses, et donc à une dimension déclarative. Mais si besoin, les institutions peuvent lancer des audits, un cas de figure que n'exclut pas le Commissaire, malgré un appel à la collaboration : « Les plateformes connaissent les sanctions, et notre ambition est qu'elles fonctionnent comme on veut, sans que nous n'ayons à sanctionner ».
Au cas où la collaboration échouerait, le texte prévoit plusieurs outils pour sanctionner. Problème : le Comité des Etats membres, chargé d'orchestrer les sanctions, n'est toujours pas en place. Les Etats ont jusqu'à la mi-février pour nommer leur constituant, et à l'heure actuelle, seuls deux pays, l'Italie et la Hongrie, ont nommé leur représentant. Cette instance devra ensuite établir un code de conduite, qui servira de guide de base aux plateformes. En attendant, les équipes du DSA devront se contenter du « name and shame », et d'intégrer les manquements sanctionnables au dossier des plateformes concernées.
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