Le fonds américain KKR dépose une nouvelle offre pour le rachat du géant Telecom Italia

L'offre ferme du fonds américain est un aboutissement après plusieurs mois de négociation avec le groupe de média français Vivendi, actuel actionnaire majoritaire de Telecom Italia. L'opérateur veut revendre son réseau fixe pour alléger une dette conséquente. Si l'opération va à son terme, le gouvernement nationaliste de Georgia Meloni espère influer sur les choix stratégiques de l'opérateur.
(Crédits : Stefano Rellandini)

Un aboutissement après plusieurs mois de tergiversation. Ce lundi, le fonds d'investissement américain KKR, associé au gouvernement italien dirigé par Giorgia Meloni, a soumis une offre ferme pour acquérir le réseau fixe de Telecom Italia (TIM). Le fonds d'investissement nord-américain a également remis une proposition, mais non contraignante, pour Sparkle, filiale de l'opérateur italien spécialisée dans les câbles sous-marins, en attendant une offre ferme « d'ici quatre à huit semaines ».

Le montant de l'offre varie toujours entre 20 et 23 milliards d'euros, sujet à certaines conditions, dont environ une dizaine de milliards d'euros de dette, a précisé à l'AFP une source financière proche du dossier. « 23 milliards d'euros pour le réseau semble un prix assez raisonnable, ce n'est pas bradé », estime Thomas Coudry, analyste du cabinet Bryan, Garnier & Co, auprès de l'AFP.

Le groupe français Vivendi, qui détient 23,75% de Telecom Italia, pourrait cependant contester cette vente lors d'une éventuelle assemblée générale des actionnaires appelée à se prononcer sur la transaction.

Un projet de longue date

Avec cette nouvelle offre, le fonds KKR concrétise ainsi son projet de longue date de s'emparer de l'infrastructure que Telecom Italia cherche à vendre pour réduire son énorme dette, alors que Rome compte prendre ultérieurement une participation jusqu'à 20% dans le réseau. L'offre de KKR pour le réseau court jusqu'au 8 novembre, mais n'exclut pas « une nouvelle prolongation jusqu'au 20 décembre », indique Telecom Italia, qui compte la soumettre « sans délai » au conseil d'administration.

Lire aussiTelecom Italia: l'accord entre Rome et le fonds KKR est une « nouvelle positive » juge Vivendi

Après des mois de suspense, TIM avait opté fin juin pour l'offre du fonds KKR et entamé des négociations exclusives avec lui. Mais l'offre de KKR reste éloignée des attentes de Vivendi, qui détient une part de 23,75% de Telecom Italia et avait estimé la valeur du réseau fixe à 31 milliards d'euros.

Si le gouvernement Meloni prévoit de débourser un montant maximum de 2,2 milliards d'euros, ce projet implique aussi le fonds d'infrastructure italien F2i, prêt à payer environ un milliard d'euros pour une participation de 10%. Au total, la participation des investisseurs italiens devrait atteindre quelque 30%, laissant la grande majorité à KKR.  L'Etat est déjà actionnaire de Telecom Italia à travers la part de 9,81% détenue par la Caisse des dépôts italienne.

Une première en Europe

En cas de succès de l'opération, cela marquera le grand retour de l'Etat italien dans un groupe considéré comme stratégique. Celui-ci a été privatisé en 1997 par le gouvernement de Romano Prodi. Le gouvernement nationaliste dirigé par Giorgia Meloni a également fait savoir qu'il comptait jouer « un rôle déterminant » dans la définition « des choix stratégiques » concernant le réseau de TIM. Jeudi 10 août, l'exécutif italien et le fonds d'investissement américain avaient conclu un accord concernant leur offre conjointe pour le rachat du réseau fixe de l'opérateur de Telecom Italia (TIM).  « Une nouvelle positive » avait jugé Vivendi. Une source proche du géant français des médias avait cependant prévenu :  « Une discussion est désormais indispensable pour trouver la meilleure solution pour l'entreprise et pour tous ses actionnaires, dont Vivendi continuera à représenter les intérêts avec la plus grande détermination ».

Une première tentative avortée

Une première tentative de KKR de prendre le contrôle de la totalité de Telecom Italia avait échoué en avril 2022, se heurtant, là aussi, au refus de Vivendi qui avait jugé son offre trop basse. Le fonds, qui avait alors proposé 10,8 milliards d'euros, est déjà actionnaire à hauteur de 37,5% de FiberCop, l'opérateur d'une partie du réseau de Telecom Italia. La cession de son réseau devrait permettre à Telecom Italia de diminuer son énorme dette, qui s'élève à 26,2 milliards d'euros.

Lire aussiRéseau fixe de Telecom Italia : KKR et la Caisse des dépôts italienne ont chacun rehaussé leur offre

Toutefois, le prix de 1,8 milliard d'euros payé par KKR pour sa part dans FiberCop devrait être déduit de la somme qu'encaissera l'opérateur italien. KKR s'est engagé à reprendre environ la moitié des quelque 40.000 salariés de l'opérateur en Italie, donnant ainsi des gages au gouvernement Meloni, soucieux de sauvegarder ces emplois, selon une source financière.

Une transaction qui laisse certains analystes perplexes

« En Europe, il y a un mouvement inverse : les opérateurs cherchent au contraire à garder leurs réseaux ou en racheter, pour faire valoir vis-à-vis de leur clientèle un atout de qualité, rester compétitifs et améliorer leur rentabilité », a commenté à l'AFP Sylvain Chevallier, associé au sein du cabinet BearingPoint.

« A court terme, la cession du réseau peut remédier à des problèmes d'endettement, mais à moyen terme il y a une question compliquée à résoudre: comment se différencier dans un marché très compétitif alors qu'on ne maîtrise plus le coût et la qualité de son infrastructure? », poursuit-il.

La transaction pourrait aussi comporter certains risques, préviennent les experts. « D'un point de vue industriel, pour un opérateur historique, son réseau est un actif clef et c'est dangereux de s'en séparer », a estimé auprès de l'AFP Thomas Coudry, analyste du cabinet Bryan, Garnier & Co.

(Avec AFP)

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.