Télécoms : en Australie, le réseau cuivre ne suffit plus

Ces dernières années, Canberra a déployé un grand réseau Internet à très haut débit à travers le pays. Pour réduire les coûts, celui-ci ne repose pas, comme en France, sur un déploiement massif de la fibre jusqu’aux logements. Ce réseau utilise encore beaucoup le vieux réseau cuivre. Mais cette infrastructure s’avère insuffisante au regard de l’augmentation du trafic. L’Etat souhaite injecter 3,5 milliards de dollars australiens supplémentaires pour déployer davantage de fibre.
Pierre Manière
D’après le classement mondial des réseaux Internet dans le monde, l’Australie pointe à une piètre 62ème place, avec un débit de 25,65 Mb/s.
D’après le classement mondial des réseaux Internet dans le monde, l’Australie pointe à une piètre 62ème place, avec un débit de 25,65 Mb/s. (Crédits : ALESSANDRO BIANCHI)

Au début des années 2010, la décision de la France de déployer, à travers le plan France Très haut débit, un vaste réseau de fibre à travers le pays a parfois été critiqué. Ce choix, coûteux, fait désormais l'unanimité, surtout à l'heure où les besoins explosent. En témoigne la forte augmentation du trafic Internet, portée par le télétravail, pendant le confinement et la crise du coronavirus. La crise du Covid-19 et l'essor du travail à domicile, justement, ont révélé les insuffisances du réseau Internet fixe australien. Ses performances font, il est vrai, pâle figure. D'après le classement mondial des réseaux Internet dans le monde de la société britannique Cable, l'Australie pointe à une piètre 62ème place avec un débit de 25,65 Mb/s. Beaucoup d'Australiens fustigent aussi, dans plusieurs régions, des pannes et problèmes de connexion.

Conscient de ces problèmes, le gouvernement a décidé, ce mercredi, d'injecter 3,5 milliards de dollars australiens (2,11 milliards d'euros) dans son réseau en déployant davantage de fibre jusqu'au domicile. Le ministre en charge des télécoms, Paul Fletcher, a précisé que cet investissement sera porté par NBN Co, la société possédée par l'Etat qui déploie cette infrastructure. Elle permettra, aux dires du gouvernement, aux trois quarts des foyers et entreprises du pays de bénéficier d'un débit de 1 Gb/s d'ici à 2023. La veille, l'exécutif a aussi annoncé 1 milliard de dollars d'investissements, essentiellement pour favoriser l'accès des entreprises au très haut débit.

Ces dépenses suscitent toutefois des critiques. De fait, les problèmes du réseau australien résultent de décisions du gouvernement actuel, une coalition formée par le Parti libéral et le Parti national (conservateur). Pour réduire les coûts, ces derniers ont notamment choisi, à leur arrivée au pouvoir en 2013, de limiter le déploiement de la fibre. Plutôt que de miser, comme le voulait le gouvernement travailliste auparavant, sur un déploiement massif de la fibre, de bout en bout, jusqu'aux habitations, ils ont décidé de s'appuyer davantage, pour le raccordement final, sur le vieux réseau cuivre. Sous ce prisme, l'investissement annoncé mercredi ressemble à une volte-face.

« Il faut maintenant plus d'argent pour rattraper le retard »

L'annonce a provoqué l'ire de l'opposition travailliste. Dans un communiqué, une de ses portes-paroles, Michelle Rowland, s'est montrée très critique. « Après avoir dépensé 51 milliards de dollars pour un réseau de second rang et perdu sept ans, il s'avère que la fibre optique est ce dont les entreprises australiennes avaient besoin depuis le début », cingle-t-elle. In fine, « les contribuables australiens ont payé plus cher pour un réseau qui n'est pas à la hauteur, et il faut maintenant plus d'argent pour rattraper le retard ».

Quoi qu'il en soit, ce nouvel investissement apparaît d'autant plus nécessaire que le réseau de NBN Co risque d'être concurrencé, à terme, par la 5G. Certains opérateurs pourraient proposer des connexions Internet fixe ultra-rapides reposant sur cette technologie. Vus de France, les déboires du réseau national australien montrent l'importance, sur des chantiers aussi longs, aussi colossaux et aussi coûteux, de bénéficier d'une certaine continuité lorsque les gouvernements changent. Si le plan France très haut débit semble aussi bien engagé - plus de la moitié des foyers et entreprises ont aujourd'hui accès à la fibre -, c'est aussi parce que le projet, depuis son lancement en 2013 sous Nicolas Sarkozy, a été poursuivi par François Hollande, puis par Emmanuel Macron. Outre l'objectif du très haut débit pour tous (c'est-à-dire une connexion d'au moins 30 Mb/s) d'ici à 2022, le gouvernement vient d'annoncer la généralisation de la fibre sur tout le territoire à horizon 2025.

Pierre Manière

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