Cession du réseau de Telecom Italia : Vivendi met ses menaces à exécution et demande l'annulation de la vente au fonds KKR

Vivendi a annoncé, ce vendredi, avoir déposé un recours contre la cession au fonds d'investissements américain KKR du réseau Telecom Italia. Le groupe français, principal actionnaire de l'entreprise italienne, avait jugé début novembre que cette décision était illégale.
La perspective d'un maintien, dans l'immédiat, de la vente a pourtant donné des ailes au titre Telecom Italia, qui gagnait près de 4% à 0,273 euro en début d'après-midi à la Bourse de Milan.
La perspective d'un maintien, dans l'immédiat, de la vente a pourtant donné des ailes au titre Telecom Italia, qui gagnait près de 4% à 0,273 euro en début d'après-midi à la Bourse de Milan. (Crédits : YARA NARDI)

Le feuilleton de la vente de Telecom Italia est encore loin d'être terminé. Le mastodonte français des médias Vivendi a en effet mis ses menaces à exécution. Il s'est engagé ce vendredi dans une nouvelle bataille judiciaire en Italie, en déposant un recours contre la cession au fonds d'investissement américain KKR du réseau fixe de Telecom Italia.

Ce recours, déposé dans la matinée auprès du tribunal de Milan, vise « l'annulation » de la vente, mais sans demander « une suspension en urgence » de la transaction, a indiqué à l'AFP une source proche du dossier. En l'absence de demande de suspension, « l'opération de vente se poursuit, les contrats sont signés », a-t-elle expliqué.

La perspective d'un maintien, dans l'immédiat, de la vente a, à ce stade, donné des ailes au titre Telecom Italia. Il gagnait près de 4% à 0,273 euro en début d'après-midi à la Bourse de Milan. Interrogés par l'AFP, ni Vivendi, ni Telecom Italia n'ont souhaité commenter.

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Une cession jugée illégale

Principal actionnaire de Telecom Italia avec une part de 23,75%, Vivendi avait déjà jugé « illégale » la décision début novembre de son conseil d'administration de vendre son réseau fixe pour un montant pouvant atteindre 22 milliards d'euros. Le conseil d'administration de l'opérateur italien défiait ainsi ouvertement son principal actionnaire opposé à cette transaction. Onze administrateurs avaient voté en faveur de la cession, les trois autres ayant émis un avis négatif.

Vivendi avait alors immédiatement réagi, annonçant son intention « d'utiliser l'ensemble des moyens légaux à sa disposition » pour « contester » cette décision « illégale » qui « piétine », selon lui, les droits des actionnaires de Telecom Italia. Le groupe de Vincent Bolloré avait réclamé, en vain, la tenue d'une assemblée générale extraordinaire des actionnaires pour se prononcer sur l'offre de KKR.

« Cinq avis juridiques ont confirmé que la cession » du réseau aurait « nécessité une modification préalable des statuts de Telecom Italia, une décision relevant de la seule assemblée générale extraordinaire des actionnaires », avait assuré Vivendi.

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Le gouvernement italien a choisi son camp

Telecom Italia affirme, au contraire, que cette décision relevait de la seule responsabilité de son conseil d'administration, se basant sur trois avis juridiques. Dans le détail, l'offre de KKR valorise le réseau à 18,8 milliards d'euros, en excluant Sparkle, filiale spécialisée dans les câbles sous-marins, et le montant total de la transaction peut atteindre 22 milliards d'euros, sous certaines conditions. Mais cette transaction était restée nettement en dessous des attentes de Vivendi, qui misait sur 31 milliards d'euros.

De son côté, KKR s'était trouvé un allié de taille, le gouvernement italien, qui compte prendre une participation jusqu'à 20% dans le réseau fixe, pour peser sur les choix d'une infrastructure jugée stratégique. D'autant que l'Américain s'est engagé à reprendre environ la moitié des quelque 40.000 salariés de l'opérateur en Italie, donnant ainsi des gages au gouvernement, soucieux de sauvegarder ces emplois, selon une source financière. Une première tentative de prendre le contrôle de la totalité de Telecom Italia avait échoué en avril 2022, se heurtant, là aussi, au refus de Vivendi qui avait jugé son offre trop basse.

Si le projet se concrétise malgré la bataille judiciaire, Telecom Italia deviendra dès lors le premier grand opérateur en Europe à se séparer de son réseau fixe pour réduire sa lourde dette. La transaction devrait néanmoins être finalisée « entre fin mai et fin juillet » 2024, avait indiqué début novembre le PDG de Telecom Italia, Pietro Labriola, se déclarant « confiant » que la vente du réseau serait menée à terme.

Comme une impression de déjà-vu

Vivendi n'en est pas à son coup d'essai. Ce dernier et le groupe italien de télévision Mediaset se sont affrontés devant les tribunaux pendant près de cinq ans, à la suite d'une décision du groupe français, en 2016, de revenir sur un accord prévoyant le rachat du bouquet Mediaset Premium. Le groupe français s'était ensuite lancé dans un raid, jugé « hostile » par la famille Berlusconi, principal actionnaire de Mediaset, pour acquérir 28,8% du groupe italien.

Il a également contesté en justice en 2019 le projet de ce même groupe de fusionner ses activités italiennes et espagnoles au sein d'une holding européenne. Après ces longues turbulences, les deux géants européens des médias avaient enterré la hache de guerre en mai 2021, en annonçant « renoncer à tout litige ». Une bataille judiciaire de longue haleine qui risquerait de se reproduire pour Telecom Italia.

Vivendi étudie un projet de scission de ses activités

Le géant des médias et de l'édition Vivendi étudie un projet de scission de ses activités en plusieurs entités cotées, structurées notamment autour de Canal+, Havas et d'une société d'investissement incluant sa participation majoritaire dans le groupe Lagardère. Une annonce surprise qui intervient moins d'un mois après la prise de contrôle définitive de ce dernier.

« Le directoire de Vivendi a proposé au conseil de surveillance - ce que ce dernier a autorisé aujourd'hui - la possibilité d'étudier un projet de scission de la société en plusieurs entités, qui seraient chacune cotées en Bourse (...) », affirme Vivendi dans un communiqué, sans donner plus de détails sur le calendrier.

Mastodonte des médias, le groupe de Vincent Bolloré est notamment soutenu par le dynamisme de Canal+ et d'Havas qui ont affiché respectivement 1,5 milliard d'euros de chiffres d'affaires au troisième trimestre et 686 millions d'euros.

(Avec AFP)

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Commentaire 1
à écrit le 15/12/2023 à 18:22
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Ce qui est "légal" est-il dans l'intérêt de l'entreprise? On aurait pu se poser la même question pour certaines cessions, e, France. Il est vrai que, faute de rigueur dans la gestion de nos dépenses, nous en sommes réduits à vendre les bijoux de la c...

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