Réduction du déficit public : le FMI torpille l’objectif de la France pour 2027

Alors que le gouvernement prévoit de faire passer le déficit public en dessous de 3% du PIB en 2027, le Fonds monétaire international (FMI) table sur un déficit de 4,3%. Après le carton rouge du Haut conseil des finances publiques (HCFÏP), c'est un nouveau camouflet pour le gouvernement, qui vient de mette jour son programme de stabilité envoyé à Bruxelles.
Grégoire Normand
Thomas Cazenave (Comptes publics) et Bruno Le Maire (Economie) dans les couloirs de Bercy.
Thomas Cazenave (Comptes publics) et Bruno Le Maire (Economie) dans les couloirs de Bercy. (Crédits : Reuters)

Article publié le 17/04 à 17h35 et mis à jour le 18/04 à 15h45

Mauvaises nouvelles en cascade pour le gouvernement. Après des déficits plus élevés que prévus en 2023 et 2024, le Fonds monétaire international (FMI) et le Haut conseil des finances publiques (HCFP) ont déjà étrillé les nouvelles prévisions de l'exécutif pour les années suivantes. La trajectoire du déficit public jusqu'en 2027 est connue depuis une semaine mais le détail du programme de stabilité a été dévoilé ce mercredi 17 avril en conseil des ministres par Thomas Cazenave, ministre délégué aux Comptes publics. En déplacement à Washington, Bruno Le Maire doit assister aux réunions de printemps de la Banque mondiale et du FMI. Ce « Pstab », comme les spécialistes l'appellent, définit la méthode et le calendrier du gouvernement pour revenir sous le seuil des 3% de déficit d'ici 2027.

Le nouveau « Pstab » prévoit un redressement du déficit à 4,1% en 2025, 3,6% en 2026 et finalement 2,9% en 2027. Parallèlement, la dette stagnerait de 112,3% du PIB cette année à 112% en 2027, mais avec un coût qui passerait de 46,3 milliards en 2024 à 72,3 milliards d'euros en 2027. « Ce programme de stabilité doit nous permettre d'aller vers le plein emploi et de faire des réformes structurelles », a déclaré la porte-parole du gouvernement Prisca Thévenot, à l'issue du conseil des ministres. « Le programme de stabilité présenté aujourd'hui est sûr, cohérent et responsable », a-t-elle assuré face aux journalistes. En pleine tempête budgétaire, le gouvernement cherche la parade pour éviter de nouvelles critiques. Mais les récentes dissensions entre le ministre de l'Economie Bruno Le Maire et le chef de l'Etat Emmanuel Macron montrent que le gouvernement navigue en eaux troubles.

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Un déficit à 4,3% en 2027, prévoit le FMI

Le gouvernement a déjà annoncé 10 milliards d'euros de coupes budgétaires par décret en février dernier et 10 milliards d'euros à trouver de nouveau cette année. S'agissant de 2025, l'exécutif a annoncé 20 milliards d'euros d'économies pour parvenir à son objectif. Mais déjà, le Fonds monétaire international (FMI) met en doute les projections de l'exécutif. Dans son rapport annuel sur les finances publiques qui fait référence ( le « Fiscal monitor »), le FMI table sur un déficit de 4,9% en 2024 et 2025, 4,4% en 2026 et 4,3% en 2027, au-dessus donc de la limite de 3% fixée par le Pacte de stabilité, contrairement à l'engagement du gouvernement français de passer au-dessous (2,9%).

Parmi les grandes puissances de la zone euro, seule l'Espagne afficherait également un déficit supérieur à 3% (3,3%) en 2027. Mais il resterait tout de même bien inférieur à celui de l'Hexagone. Concernant la dette rapportée au produit intérieur brut (PIB), elle passerait de 110,6% en 2023 à 114% en 2027. Là encore, le scénario du gouvernement semble bien optimiste aux yeux des économistes du FMI.

S'agissant de l'activité, le FMI a dégradé sa prévision de croissance pour 2024 à 0,7% (contre 1% en janvier) et 1,4% en 2025 (contre 1,7% en janvier). De son côté, l'exécutif parie sur une croissance de 1% en 2024. Puis 1,4% de croissance en 2025, 1,7% en 2026 et 1,8% en 2027. Interrogé par La Tribune, le FMI indique que « ses projections sont basées sur les informations et données disponibles au 30 mars » et «n 'incluent pas les annonces récentes du gouvernement ».

Face au trou d'air des recettes publiques, le gouvernement Attal doit lancer une mission sur la taxation des rentes qui pourrait viser les superprofits des énergéticiens ou les rachats d'actions. Des pistes qui pourraient rapporter relativement peu au regard des maigres résultats obtenus par les prélèvements opérés en 2023 et estimés à 600 millions d'euros contre 12 milliards d'euros espérés. « Il est inacceptable que le rendement soit aussi faible que prévu », avait d'ailleurs lancé Bruno Le Maire lors d'une réunion avec des journalistes fin mars.

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Programme de stabilité : le carton rouge du Haut conseil des finances publiques

Le FMI n'est pas le seul à tirer à boulets rouges sur les prévisions du gouvernement. Dans un avis sévère rendu public ce mercredi 17 avril, le Haut conseil des finances publiques considère que la prévision de ramener le déficit en dessous de 3% du PIB en 2027 « manque de crédibilité » face à une situation des finances publiques « préoccupante ». La juridiction estime que la documentation de cette trajectoire est « lacunaire ». Auditionné par la Commission des finances de l'Assemblée ce mercredi 17 avril, Pierre Moscovici, président de la Cour des comptes, a une nouvelle fois tiré la sonnette d'alarme. « 2023 a été une année noire. Le déficit de l'année 2023 atteint presque le record de l'année 2020 », a-t-il déclaré.

Les experts du HCFP pointent également le manque de « cohérence » sur les projections de croissance jugées « optimistes ». « La mise en œuvre de l'ajustement structurel prévu pèsera nécessairement, au moins à court terme, sur l'activité économique », soulignent les auteurs de l'avis.

Le Haut conseil rappelle notamment que « la prévision de croissance en France du gouvernement pour 2024 (1,0 %) est supérieure à celle de la moyenne des prévisionnistes interrogés en avril par le Consensus Forecasts (0,7 %) et à celles du FMI (0,7 %) et de l'OCDE (0,6 %) ». De quoi fragiliser le scénario du gouvernement.

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Agences de notation : un verdict très attendu

A quelques jours du verdict des agences de notation, les avertissements du FMI et du Haut conseil des finances publiques sont de mauvaise augure. Le 26 avril, deux agences vont actualiser leur note: Fitch, qui a déjà dégradé la France en avril 2023 et ne devrait pas recommencer; et Moody's qui juge désormais « improbable » que la France tienne son objectif de réduire le déficit public à 2,9% d'ici 2027. Elle pourrait abaisser la perspective de la note, prélude à une baisse, ou la baisser immédiatement.

Grégoire Normand
Commentaires 31
à écrit le 18/04/2024 à 17:13
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La fessée nous attend, et ce n'est pas le monde des politiciens mais le vulgum pecus qui tendra les fesses. Comme d'habitude!

à écrit le 18/04/2024 à 12:09
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La seule question, c'est "est ce que le FMI évalue à situation géopolitique constante ?". Car si la Chine disait au septuagénaire illuminé de Moscou : "ça suffit !", leurs critères seraient bouleversés.

à écrit le 18/04/2024 à 10:05
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@Adieu BCE. Vous auriez pu aussi rajouter : ne touchons pas aux dépenses pour la sécurité int et ext, la justice, la transition énergétique, auxquelles nous aurions déjà dû ajouter plus de moyens financiers dans le passé, comme dans la construction d...

le 18/04/2024 à 19:49
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@Raymond : les aides aux entreprises sont le troisième poste de dépenses publiques après les retraites des boomers et les soins des boomers. Quant au libertarianisme, c'est une idéologie de fanfarons, comme ces diplômés d'école de commerce partis tra...

le 20/04/2024 à 16:41
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@o Faux. L'aide publique aux entreprises est le premier poste de dépenses publiques (i.e Statista).

à écrit le 18/04/2024 à 9:40
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La politique française n'est pas crédible. L’objectif de réduire le déficit public français à 3 % d’ici 2027 n’est qu’un vœu pieux. Le ministre français des Finances le sait également. C'est pourquoi la France exhorte ses partenaires européens à acce...

le 18/04/2024 à 9:48
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Oui, l'objectif est intenable sauf à convaincre l'électorat de Macron à se suicider collectivement au nom de la bonne tenue des finances publiques, mais cette électorat s'aime bien trop pour ça...

à écrit le 18/04/2024 à 9:02
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Tant que l'on aura des comptes à rendre à des administrations extérieures en lieu et place des plus concernés que sont les français, nous ne nous en sortirons pas !

le 18/04/2024 à 12:17
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J'ai bien peur que ces "administrations extérieures" soient aussi nos créanciers et que ce ne soient des gens peu ouverts à la compréhension....

à écrit le 18/04/2024 à 8:48
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Tant de règles en France qu'il est impossible d'innover et de créer de la richesse. Comment appauvrir un pays riche ...

le 18/04/2024 à 13:30
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ça c'est le discours de ceux qui veulent gratter le pognon de l'état ! car il n'y a que ceux qui n'ont jamais fait de développement pour le dire ! Non, car si l'on regarde actuellement la question, ce n'est pas une question d'argent mais de compéte...

à écrit le 18/04/2024 à 7:40
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Le FMI quelle crédibilité ? De la dictature financière et c'est tout. Bon ya pire ya l'UE certes mais celle-ci est pire que tout c'est trop facile.

le 18/04/2024 à 8:28
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Pas difficile d'être plus crédible que notre Bruno Le Maire national :-D

le 18/04/2024 à 9:05
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Les dirigeants sont nuls.

le 18/04/2024 à 11:13
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Nos dirigeant ont volé les contribuables du futur avec le consentement des électeurs durant des décennies. Quand on laisse le pouvoir à des escrocs et que on a des élections qui sont une course aux mensonges on a besoin que la discipline soit imposé...

le 19/04/2024 à 9:21
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"avec le consentement des électeurs durant des décennies." Qui a voté contre le traité de Lisbonne ? Pour moi les seuls représentants politiques dignes de diriger la France les autres devraient retourner vivre dans leur pays favori, l'Allemagne.

à écrit le 18/04/2024 à 5:48
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Le pire dans cette affaire le ridicule de nos ministres et les muets le premier ministre et le président. Pour ce qui est de nos pieds nickelés de Bercy leurs données fantaisistes et cela depuis des années leur positionnement met en question leur ...

à écrit le 17/04/2024 à 23:00
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Tout le monde est d’accord. Nous sommes dirigés par des menteurs!

le 18/04/2024 à 8:30
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C'est connu, qui gouverne ment ;-))))

le 18/04/2024 à 13:24
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c'est un métier ! et en plus, zéro risques ! Lorsque le système politique contrôle la justice, ce n'est pas difficile de constater que personne n'est responsable et c'est aussi pourquoi nous serons attaqué sur la dette ! il n'y a aucune raison pour q...

à écrit le 17/04/2024 à 21:15
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Le FMI et le HCFIP ne seraient-ils pas manipulés par les... Russes? :) :) :)

le 18/04/2024 à 13:20
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oui pourquoi pas, Non a mon avis, c'est alkaida qui manipule le fmi ! a n'en pas douter ! ah ah ah ah ah ah

à écrit le 17/04/2024 à 21:03
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C'est assez prévisible dans la mesure où on a la pire configuration qui soit, démographie d'un pays anglo-saxon, la culture économique de l'Italie du sud et une bourgeoisie changeant d'allégeance comme de chemise, américaine un jour, japonaise le len...

à écrit le 17/04/2024 à 19:22
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a u moment faut revenir a la realite!!!!!!!!!!! un pays incapable d'economiser un euro et qui compte sur les rectetes futures incertaines pour boucher le trou qui continue de s'agrandir, ca fait sourire tout lmonde.jusqu'au jour ou ca va sauter.........

à écrit le 17/04/2024 à 19:22
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La chétive pécore s'enfla si bien qu'elle creva. Je souhaite qu'à l'automne le Conseil Constitutionnel, pour la 1ère fois de la Ve République, censure le budget de l'Etat pour insincérité.

à écrit le 17/04/2024 à 18:58
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En affirmant que " Nous n' avons pas un problème de DÉPENSES EXCESSIVES mais un problème de MOINDRES RECETTES Emmanuel Macron ne semble pas faire ... RECETTE ... auprès des " censeurs " du F.M.I. ! On répètait à l' envi dans les cercles économiq...

à écrit le 17/04/2024 à 18:14
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⚠️☠️ L'ÉTAT A MASSACRÉ NOTRE POUVOIR D'ACHAT 🤬🔥‼️ Un français payé au SMIC est 2.2 FOIS PLUS PAUVRE qu'en 2000, par l'inflation monétaire générée pour financer les déficits publics (planche à billets, argent magique)‼️ La valeur de l'euro a été dilué...

à écrit le 17/04/2024 à 18:09
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Non c'est juste l'insincérité des gouvernants français ! mentir est a présent un métier, qui 'ajoute a l'incompétence, du coup cela montre surtout l'objectif derrière, celui de ruiner l'état pour ensuite permettre aux amis de payer a vil prix la ric...

à écrit le 17/04/2024 à 18:05
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L'état-ogre doit maigrir. Nous sommes les plus mauvais d'Europe sur presque tous les plans à cause de nos excès de dirigisme, bureaucratisme, étatisme, planification et assistanat. Les dépenses publiques consacrées à la protection sociale s’élevaien...

le 17/04/2024 à 19:11
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@Adieu BCE. Oui, il est indéniable que "l'État-ogre doit maigrir à cause de nos excès de dirigisme, bureaucratisme, étatisme, planification et assistanat". Oui, "ne touchons pas les dépenses de santé, éducation (sauf administration) et recherche", en...

le 17/04/2024 à 19:44
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Absolument, notre démocratie est un parasitage du pays par la génération née autour de 1950 et qu'il n'est pas exagéré de qualifier de bagage oublié de l'occupant allemand et donc l'Etat doit acheter la modération des jeunes avant qu'ils ne se metten...

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