[Article mis à jour à 18h25]
« Un monde sans financement du charbon » : c'est le nouveau slogan d'Axa, après le « No New Coal » (pas de nouveau charbon, pas de nouvelle centrale) martelé par le patron Thomas Buberl au One Planet Summit de 2017. L'assureur français, numéro deux européen, a dévoilé ce mercredi 27 novembre une nouvelle phase de sa stratégie climat et l'engagement d'une sortie complète du secteur d'ici à 2030 dans les pays de l'OCDE et 2040 dans le reste du monde. Un calendrier soutenu par les ONG et défenseurs de l'environnement.
Axa va durcir sa politique de désinvestissement, en excluant les entreprises qui prévoient de nouvelles mines et centrales de charbon et celles ayant plus de 10 gigawatts (GW) de capacités charbon (ce qui pourrait concerner Engie), et sa politique de souscription, en n'assurant plus les entreprises les plus exposées au charbon (plus de 30% de leur chiffre d'affaires ou de leur production d'électricité liée au charbon, et plus de 20 millions de tonnes de charbon produites par an. Il invite aussi ses clients concernés à publier un plan de sortie du charbon d'ici à 2021.
« Axa se dote de la meilleure politique jamais adoptée par un acteur financier, la seule alignée avec la science climatique », a applaudi l'ONG Les Amis de la Terre, dans un communiqué commun avec l'ONG allemande Urgewald et la coalition d'ONG réunies dans la campagne Europe Unfriend Coal.
Les associations de défense de l'environnement se félicitent que le groupe s'engage à la fois en tant qu'investisseur (634 milliards d'euros d'actifs pour compte propre) et en tant qu'assureur à exclure les entreprises prévoyant de nouvelles capacités en charbon. Il a abaissé son seuil de désinvestissement aux entreprises ayant des projets de développement d'une capacité supérieure à 300 mégawatts (contre 3 gigawatts auparavant).
« La politique d'Axa n'a pas d'angle mort et même Engie et EDF sont appelées à adopter un plan de sortie du charbon d'ici 2021 », se réjouit Lucie Pinson, référente en finance privée des Amis de la Terre France et coordinatrice de la campagne Unfriend Coal.
Il y a deux semaines, les ONG avaient critiqué le fait qu'Axa ait comme client Adani Mining, filiale australienne du conglomérat indien Adani, qui construit le projet gigantesque et controversé de mine Carmichael - pour assurer la ligne de chemin de fer desservant la mine. Dans le cadre de la nouvelle politique, Adani serait exclu. En attendant, les contrats en cours continuent jusqu'à leur échéance.
Des "obligations de transition"
Axa a également annoncé le doublement de son objectif d'investissement vert, porté à 24 milliards d'euros d'ici à 2023. Il investira aussi dans un nouveau type de produit financier, les "transition bonds", qu'il présente comme "une classe d'actifs innovante". Ce type d'emprunts obligataires moins verts et moins contraignants que les "green bonds", tout comme les récents "Sustainable development goals bonds", des obligations à usage général alignées sur les objectifs de développement durable de l'ONU sans fléchage précis des projets financés, soulève des critiques chez les spécialistes de l'investissement responsable, qu'ils considèrent comme un dévoiement de la finance durable.
"Pour être sincères, ces obligations de transition doivent aller à des entreprises qui s'engagent à aligner progressivement leurs activités sur une trajectoire 1,5°C, adoptent des objectifs de décarbonation de court, moyen et long terme fondés sur la science comprenant notamment un plan de sortie des énergies fossiles" analyse l'association Les Amis de la Terre.
Crédit Agricole CIB a émis ce mercredi 27 novembre "la première obligation de transition émise par une banque commerciale", d'un montant de 100 millions d'euros, souscrite en intégralité par Axa, via un placement privé. La banque de financement et d'investissement du groupe Crédit Agricole estime poser ainsi "un jalon important pour le développement du marché des obligations de transition, un outil de finance durable conçu pour accompagner le financement de la transition environnementale des secteurs à forte intensité de gaz à effet de serre." Les fonds levés serviront à financer notamment des projets de conversion de navires propulsés au gaz naturel liquéfié dans le transport maritime et le développement de centrales à gaz dans des pays émergents dépendant fortement du charbon.
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