Nouvelle victoire pour EDF face aux fournisseurs alternatifs. Vendredi 17 avril, le Conseil d'Etat a rejeté le recours en référé déposé par les concurrents de l'énergéticien historique. Déjà déboutés le mois dernier par la Commission de régulation de l'énergie (CRE), ces derniers réclamaient l'activation de la clause de "force majeure" pour suspendre les contrats Arenh, qui se traduisent, en période de baisse de la consommation en raison de la propagation de l'épidémie de coronavirus, par d'importantes pertes financières.
Revente à prix cassé
Mis en place en 2010 pour favoriser la concurrence, les contrats Arenh (pour accès régulé à l'électricité nucléaire historique) permettent aux fournisseurs alternatifs de racheter chaque année 100 TWh d'électricité auprès d'EDF, soit près d'un quart de la production nucléaire française. Le prix est fixé à 42 euros le mégawattheure, ce qui est, en temps normal, inférieur au prix de marché. Les rivaux d'EDF plébiscitent le dispositif: en décembre, les demandes d'Arenh s'étaient élevées à 147 TWh, forçant la CRE à instaurer un mécanisme de rationnement.
Problème: depuis le début du confinement, la demande d'électricité recule fortement en France, notamment en raison de l'arrêt d'une grande partie de l'activité industrielle. Or, les fournisseurs alternatifs doivent contractuellement continuer d'acquérir de l'électricité nucléaire, toujours au prix de 42 euros. Comme ils ne peuvent pas ajuster le volume d'achat pour tenir compte du repli de leurs besoins, ils se retrouvent avec un surplus qu'il ne peuvent pas conserver. Et qu'ils doivent donc revendre à prix cassé sur le marché - autour de 20 euros actuellement.
Des millions d'euros de pertes
Ces sociétés, qui représentent près de 40% de la consommation électrique française, se retrouvent ainsi prises au piège de l'Arenh. Accusant des pertes qui se chiffrent en millions d'euros, elles se sont d'abord retournées vers EDF pour réclamer l'activation de la clause de "force majeure" prévue dans les accords d'approvisionnement. Et ainsi pouvoir acheter l'électricité dont elles ont besoin directement sur les marchés, à un prix beaucoup plus compétitif. Mais l'électricien a rejeté leur demande. Les fournisseurs alternatifs ont ensuite saisi la CRE, sans obtenir gain de cause.
Dans une délibération datée du 26 mars, la CRE avait estimé que les conditions n'étaient pas réunies. Et elle soulignait aussi que la suspension des contrats Arenh aurait des conséquences "disproportionnées" et qu'elle "créerait un effet d'aubaine pour les fournisseurs au détriment d'EDF qui irait à l'encontre des principes de fonctionnement du dispositif qui reposent sur un engagement ferme des parties sur une période d'un an". Certes, le régulateur n'écarte pas la suspension des contrat Arenh, mais seulement "si l'acheteur parvenait à démontrer que sa situation économique rendait totalement impossible l'exécution de l'obligation de paiement".
Face aux "circonstances exceptionnelles actuelles", la CRE propose simplement des délais de paiement des factures Arenh, ainsi qu'une suppression des pénalités normalement infligées aux fournisseurs qui ont acheté trop d'électricité via ce mécanisme au cours d'une année. Elle demandait aussi à EDF d'accorder des facilités de paiement, notamment pour les acteurs de petites tailles. Pas de quoi satisfaire les contestataires, qui assuraient que le régulateur n'a pas l'autorité pour définir si la crise sanitaire constitue une "force majeure". Un argument qui n'a pas convaincu le Conseil d'Etat.
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