Leçon diplomatique pour Obama

Par Sophie Gherardi, directrice adjointe de la rédaction de La Tribune.

Toute la difficulté de la posture diplomatique d?Obama a éclaté au grand jour lors de sa première tournée internationale, qui se poursuit aujourd?hui en Turquie. Le jeune président américain rêve d?un monde sans armes nucléaires et l?a montré par plusieurs gestes importants. Il a proposé à la Russie de négocier un nouvel accord de réduction des arsenaux stratégiques ; il s?est engagé hier à ratifier le traité d?interdiction complète des essais nucléaires (il lui faudra pour cela convaincre le Congrès) ; il veut un nouveau traité international pour mettre fin "de manière vérifiable" à la production de matériaux fissiles à fins militaires ; enfin, il souhaite la tenue "dans le courant de l?année à venir" d?un sommet mondial contre leur prolifération.

"Les Etats-Unis, en tant que seule puissance nucléaire à avoir jamais utilisé une arme nucléaire, ont la responsabilité morale d?agir", a-t-il déclaré devant une foule tchèque enthousiaste, avec cette manière tellement à lui d?inscrire son action dans le grand tableau de l?histoire américaine. Malheureusement, la dureté du monde s?est rappelée à lui sans ménagements.

Peu avant l?aube, heure européenne, la Corée du Nord a tiré une fusée de longue portée, officiellement pour mettre en orbite un satellite, violant au passage l?espace aérien japonais et foulant aux pieds la résolution 1718 de l?ONU qui, en 2006, lui avait enjoint de "s?abstenir de tout nouvel essai nucléaire ou tir de missile balistique". "Provocation", a grondé le président Obama qui a réclamé aussitôt une réunion du Conseil de sécurité de l?ONU. On imagine le réveil qu?il a dû avoir, et le communiqué rédigé à la hâte entre le café et le grand discours sur son désir d??uvrer "pour la paix et la sécurité d?un monde sans armes nucléaires" !

Kim Jong-il, en faisant irruption telle la fée Carabosse, a gâché le baptême diplomatique de Barack Obama, qui semblait couvert de tous les dons et promis à tous les succès. Sa fusée a fait plouf, mais son coup d?éclat a immédiatement séparé la Chine et la Russie, enclines à l?indulgence envers le dictateur communiste, de tous les alliés de l?Amérique. Obama a aussi compris que tendre la main à l?Iran ne suffisait pas à éclaircir l?avenir stratégique. Et découvert que tous ses amis de la veille ou l?avant-veille - Medvedev, Hu Jintao, et même Sarkozy dès que l?entrée de la Turquie dans l?Union européenne a été évoquée - pouvaient en un instant devenir de coriaces adversaires. Rien que pour cette leçon, il ne devrait pas trop en vouloir au leader nord-coréen.

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Commentaires 2
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Obama, passé politique : sénateur de l?Illinois pendant 4 ans, autant dire, rien à l?échelle du monde, et son siège vendu au plus offrant par le gouverneur de l?Illinois, pas rassurant quant à son accession au poste?même Ségolène a plus d?expérience ...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Gouverner à partir de la Nudge attitude et du paternalisme libertarien de Sunstein et Thaler est sûrement une bonne idée concernant la politique intérieure, dans l?action sociale, justement, mais il n?est pas évident que ce le soit dans le maintien d...

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