Le patriarche et ses enfants terribles

Le Parti populaire européen (PPE) tenait la semaine dernière son congrès à Madrid avec un objectif : ajuster son offre politique pour endiguer la montée du populisme et en faire si possible une force centripète.
« Ce que je ressens au niveau du parti et de la famille, c'est l'envie de discuter », a expliqué Joseph Daul, président du PPE

Ce serait comme une grande réunion de famille... qui se tiendrait en public. On se dit des choses... mais pas tout. On s'engueule et on s'encourage. On règle des comptes, mais cela n'empêche pas de faire des projets ensemble.

Puis finalement, chacun, réconforté d'appartenir au même clan, repart à ses affaires. Le congrès du PPE n'a pas fait exception à la règle.

Son patriarche se nomme Joseph Daul

Peu connu du public français, cet Alsacien a siégé sept ans au Parlement européen, avant de prendre la présidence du PPE, où il vient de se faire réélire avec un score stalinien de 96 %. C'est lui qui tient « la maison », rappelle à l'ordre ses « enfants terribles », comme il dit, tout en veillant à ne pas empiéter sur la liberté des chefs de clan nationaux.

Ceux-ci se nomment Angela Merkel, Mariano Rajoy, le Premier ministre espagnol, Enda Kenny, son homologue d'Irlande. À Bruxelles, ses relais sont puissants : 14 membres de la Commission sur 28, dont le président Jean-Claude Juncker et le président du Conseil Donald Tusk. Autant dire que cette famille-là domine la scène politique européenne. Pour combien de temps ?

« Ce que je ressens au niveau du parti et de la famille, c'est l'envie de discuter. C'est notre différence avec les populistes. Si nous ne restons pas sur nos valeurs, sur nos bases, nous allons perdre notre électorat », a expliqué le président du parti, Joseph Daul.

Viktor Orban a expliqué que la crise des migrants était en réalité une « crise de l'immigration incontrôlée », due à la pression démographique du Sud, non pas le fruit temporaire de la guerre en Syrie.

« L'Europe est pour l'instant riche et faible. C'est le mélange le plus explosif possible », a expliqué le Premier ministre hongrois.

Sur ce point, le chef de la famille ne lui donne pas tort. « Nous devons gérer cette immigration et expliquer qu'elle ne va pas s'arrêter demain matin », estime Joseph Daul, qui ne ménage pas ses efforts pour éviter sa marginalisation.

« Viktor Orban est régulièrement dans mon bureau. Lui peut me dire combien [de migrants] entrent en Hongrie. Mais combien entrent en Grèce ou en Italie ? », deux pays dirigés par la gauche, interroge le président du PPE.

La famille doit être un refuge

Ceux qui ont perdu le pouvoir y gardent leur place. Fidèle à lui-même, l'ancien président français Nicolas Sarkozy est venu ajouter une touche dramatique au tableau.

« Le projet européen a vieilli... Les Européens que nous sommes doivent porter le changement, sinon, il nous sera imposé par ceux qui n'aiment pas l'Europe... Le vieux Schengen est dépassé, il croule de tous les côtés », a expliqué le président de LR.

On n'en est pas là. Mais le PPE, qui parle désormais d'un risque de « mort de Schengen », selon les termes de Joseph Daul, n'a jamais été aussi près d'embrasser le dessein sarkozien d'une « politique de migration européenne », comme le montre une résolution adoptée la semaine dernière. « Il y a encore un mois, nous n'aurions jamais pu obtenir cela », dit-il.

En ce moment, c'est Mariano Rajoy, favori aux élections du 20 décembre, qui porte les espoirs du clan. S'il réussit, la preuve sera administrée que les programmes d'austérité pilotés par Bruxelles dans le sud de l'Europe étaient pertinents... et non le fruit d'un intégrisme budgétaire inspiré par Berlin. Angela Merkel n'a pas eu de mots assez tendres et encourageants pour lui... Le populisme ne fleurira sur la crise migratoire que si la crise économique s'aggrave, voulait-on croire à Madrid.

Difficile équation.

« Comment le monde peut-il régler les problèmes dont nous avons parlé ?, a demandé la commissaire au Budget, la Bulgare Kristalena Georgieva. Il y a deux solutions : la première, réaliste, et la seconde, fantasmatique. La première serait que des aliens débarquent sur Terre et résolvent le problème. La seconde, que les humains trouvent un moyen de résoudre ces crises ».

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