L'OCDE, les reformes et la peur du changement

L'OCDE montre à quel point la France s'écarte des performances des pays plus libéraux. Pourtant, les chances de la France ne sont pas nulles, à condition sortir de l'endoctrinement anti-libéral. Par Marc Guyot et Radu Vranceanu, Professeurs à l'Essec

L'OCDE vient de publier son Rapport Economique 2015 sur la France. (1) Le verdict est sans appel, le pays est à la traîne du groupe des pays riches, acculé sous une chape de régulations, normes, taxes - qui souvent se contredisent et aboutissent à des effets opposés aux bonnes intentions qui les ont amenées. Le rapport ne le dit pas clairement, mais les Français payent depuis une vingtaine d'années le prix de l'endoctrinement anti-libéral de leurs dirigeants, dans un monde de plus en plus interconnecté, dynamique, concurrentiel, où seuls les peuples et les gouvernements qui font confiance au marché et à l'initiative individuelle se développent et s'enrichissent.

Une leçon trop dure à apprendre

Cela ressemble à une leçon trop dure à apprendre, mais elle a pourtant été intégrée par nos grands voisins, l'Italie et l'Espagne, qui n'étaient pas moins interventionnistes, et qui viennent de mettre en place des reformes structurelles ambitieuses, visant à faciliter la vie des entreprises. En France, persiste toujours l'idée qu'il suffit de dépenser plus, recruter plus de fonctionnaires, construire de nouveaux ponts et lignes de TGV pour que l'activité reparte. Cette conviction repose sur une large méfiance des citoyens envers l'entreprise et le marché, méfiance relayée par l'éducation nationale et les media.

L'écart de performance entre pays libéraux et interventionnistes

Les principales leçons du rapport de l'OCDE portent sur l'écart de performance entre pays libéraux et pays plus interventionnistes. Sur la période 1994-2014, en matière de taux de croissance moyen, la France et l'Italie sont les derniers pays de l'OCDE avec une croissance inférieure à 1% par an. Contrairement aux idées reçues, l'inégalité des revenus après impôts et transferts est supérieure en France à celle des pays nordiques et à celle de l'Allemagne et est similaire à celle de la Corée du Sud. Le taux de chômage est très important (10%) et touche fortement les jeunes. L'investissement est très faible comparé à l'Allemagne et aux États-Unis. La balance commerciale demeure négative depuis 10 ans et la France continue de perdre de la compétitivité. Enfin, le niveau des dépenses publiques en proportion du PIB est le second le plus élevé parmi les pays de l'OCDE, après la Finlande avec 57%.

L'OCDE veut croire aux chances de la France, si elle se réforme

Malgré ce diagnostic accablant des performances macroéconomiques de la France, l'OCDE demeure confiante dans le potentiel de croissance de l'économie française, à condition que le pays se décide à adopter des vraies reformes. La plus importante serait la flexibilisation du marché du travail qui est l'un des plus rigides au monde selon l'OCDE. Une autre mesure urgente serait de réduire la part de l'Etat dans l'économie, en transférant plus d'activités vers le secteur privé et en diminuant la dépense publique. Une réorganisation de l'Etat pourrait alors permettre d'alléger la pression fiscale considérable qui pèse sur les personnes et les entreprises. Actuellement le « coin fiscal », ou la différence entre le salaire net et le coût du travail pour l'entreprise, est colossal et décourage l'emploi. Une suggestion simple de l'OCDE est de transférer une partie de la fiscalité sur les activités polluantes. Enfin, le rapport propose de supprimer les trop nombreuses contraintes administratives pesant sur l'activité et l'initiative, en rappelant la difficulté de créer une entreprise en France où les barrières administratives sont parmi les plus élevés de l'OCDE.

Le protectionnisme, le repli, des stratégies de peur

La France ne peut plus se contenter de politiques basées sur des idéologies qui ne fonctionnent plus dans un monde interconnecté. Le protectionnisme, l'enfermement, le repli sur soi sont des stratégies de peur, qui ne devraient pas avoir cours dans un pays comme la France du fait de ses atouts en matière de base industrielle, de capital humain et de savoir-faire spécifiques dans de nombreux domaines. Néanmoins ces atouts ne dispensent pas d'une nécessité d'adaptation continue aux défis de la mondialisation et d'une obligation d'acceptation du changement et de la remise en cause, dans tous les secteurs où le reste du monde ira plus vite que nous. Il est grand temps que le gouvernement dise la vérité aux Français sur les défis de la mondialisation et sur la façon avec laquelle le pays doit se réorganiser pour en tirer le meilleur parti.

 https://www.oecd-ilibrary.org/economics/oecd-economic-surveys-france-2015_eco_surveys-fra-2015-en

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 5
à écrit le 07/04/2015 à 12:44
Signaler
Nos deux compères devrait nous parler de la note n°6 du conseil d'analyse économique. Tout y est expliqué.

à écrit le 07/04/2015 à 12:39
Signaler
suite. Cela correspond au financement des retraites par une taxe sur l'énergie; mais tout le monde est contre. Réfléchissez bien.

à écrit le 07/04/2015 à 12:35
Signaler
Il est bien écrit: transférer une partie de la fiscalité sur les activités polluantes. Qu'est-ce qu'on attend pour le faire?

à écrit le 07/04/2015 à 10:23
Signaler
Cela me fait toujours rire... l’expression "La peur du changement"; C'est ce que dise, ceux qui veulent imposer leur façon de voir sans être convaincu des finalités!

le 09/04/2015 à 17:26
Signaler
@Bah Tout à fait d'accord. A lire l'article on comprend tout de suite qui cherche à faire peur en s'appuyant sur des approximations (inégalités, investissement,...). Une critique à charge exclusivement relève d'une manipulation intellectuelle. Mê...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.