Etats-Unis : le scandale des saisies immobilières menace la reprise du marché

En septembre, plus de 100.000 logements ont été saisis outre-Atlantique. Un record. Mais le scandale sur les conditions dans lesquelles ont été menées des dizaines de milliers de saisies prend de l'ampleur.

Des coiffeurs, des vendeurs de Wal-Mart, des adolescents... Voila les "experts" en saisies immobilières de certaines banques et organismes de prêts hypothécaires américains. Le scandale qui couve depuis plusieurs jours a encore pris de l'ampleur mercredi après la publication pour Peter Ticktin, un avocat floridien, de plusieurs témoignages de salariés de Bank of America, de JPMorgan et d'une filiale de Goldman Sachs.

Dans leurs dépositions, nombreux sont ceux qui ont expliqué ne pas vraiment savoir ce qu'était un prêt hypothécaire. Leur travail ne consistait qu'à signer les documents qu'ils recevaient. Le recours à ces "robo-signers" (signataires automatiques) se serait très vite généralisé devant l'avalanche de dossiers, provoquée par la crise des subprimes, ces prêts hypothécaires à risques accordés à des ménages incapables de les rembourser.

Autre exemple relaté dans le Financial Times: une employée de Wells Fargo a raconté devant un tribunal qu'elle signait jusqu'à 500 documents de saisie par jour au nom de la banque californienne et qu'elle se contentait de vérifier que son nom et son titre apparaissaient correctement sur le dossier. Le New York Times rapporte quant à lui que le traitement des dossiers de Citigroup et de GMAC avait été délocalisé à Guam et aux Philippines et que très nombreux documents finissaient directement à la poubelle.

En réponse à ces saisies immobilières douteuses, qui font la Une de la presse américaine, plusieurs établissements ont déjà décidé de suspendre les procédures en cours, à l'image de Bank of America, le numéro un des crédits immobiliers aux Etats-Unis, et de JPMorgan. Plusieurs élus démocrates, dont l'influent Harry Reid, ont demandé un moratoire sur les saisies. Mesure rejetée par l'administration Obama.

"Un moratoire plus large comporte toute une série de conséquences indésirables", a répondu Robert Gibbs, le porte-parole de la Maison blanche. "Nous voulons prendre les mesures justes et nécessaires pour faire en sorte que la procédure se poursuit légalement", a-t-il poursuivi. "Dans le même temps, nous ne voulons pas que le marché immobilier et la reprise de l'immobilier en pâtissent".

Des experts du marché immobilier, dont l'agence Standard & Poor's, estiment qu'une suspension des saisies se traduirait par des pertes pour les établissements de crédit, par un relèvement des taux des prêts et par l'augmentation des stocks de logements invendus, qui pèserait sur les prix. Cela pourrait encore ralentir la reprise du marché immobilier américain.

L'ampleur prise par ce scandale a poussé les 50 Etats américains à ouvrir une enquête commune. "Nous avons récemment appris qu'un certain nombre d'organismes de prêts hypothécaires avaient fourni des déclarations ou signé des documents dans le cadre de saisies (...) qui semblaient comporter des défauts de procédures", a indiqué ce mercredi l'association américaine des ministres de la Justice.

"En particulier, il semble que des déclarations et documents aient été signés par des personnes n'ayant pas personnellement pris connaissance des faits consignés dans ces documents". L'utilisation de ces "signataires automatiques" peut "constituer un acte de tromperie et/ou une pratique inéquitable" en violation de la loi, poursuit le communiqué.

En attendant, les saisies immobilières se poursuivent dans le pays. En septembre, elles ont même dépassé pour la première fois la barre des 100.000. Selon les chiffres du cabinet spécialisé RealtyTrac publiés ce jeudi, 102.134 logements ont ainsi été saisis le mois dernier. Ce qui porte à 816.000 le nombre de reprises de possession depuis le début de l'année.

RealtyTrace estime que les saisies baisseront "au quatrième trimestre dans la mesure où plusieurs prêteurs de premier plan ont cessé dans certains Etats les ventes aux enchères de logements dont les propriétaires font défaut sur leur emprunt". Mais le cabinet prévient également qu'elles repartiront en forte hausse une fois que ces problèmes seront réglés.

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