Quel cadeau de Noël offrir à l'homme le plus riche du monde? La fortune personnelle de William Henry III Gates, qui préfère le diminutif plus simple et familier de Bill, dépasse les 50 milliards de dollars. Il a tout, même ce qui ne peut s'acheter: de grandes qualités de coeur. Sa générosité, au travers de la Fondation Gates, lui vaut d'être, avec son épouse, Melinda, le premier philanthrope du monde. Ce jeune quinquagénaire aurait donné tout au long de sa vie plus de 27 milliards de dollars de ses deniers personnels.

Mais l'homme n'est pas pour autant blasé ni prodigue. Il s'est offert en début d'année un petit cadeau, un bien rare, donc cher. Quelques dizaines d'actions Berkshire Hattaway, la société de Warren Buffet, le deuxième homme le plus riche du monde et le deuxième plus grand philanthrope américain.

Provocation, acte de rivalité entre habitués des têtes de classement? Ce serait plutôt un geste de politesse entre gens de bonne compagnie. Les deux hommes sont amis et partenaires de bridge. Gates est administrateur de Berkshire Hattaway depuis un an, ayant hérité du siège de feue Madame Buffet. Il lui en a coûté quelque 6 millions de dollars pour s'offrir seulement 70 actions Berkshire Hattaway, ces dernières étant les plus chères de Wall Street. Il ne s'agit pas des multiples boursiers vertigineux de Google mais du prix facial des actions: plus de 90.000 dollars l'unité!

A sept reprises depuis la fin décembre, Gates a ramassé des titres Berkshire, dont il était déjà actionnaire. Il en possède désormais 4.350, d'une valeur proche de 400 millions de dollars. La holding de Buffet capitalise en effet 138 milliards de dollars, ce qui en fait la 25ème plus grosse société cotée dans le monde: elle détient de nombreuses participations dans l'assurance et quelques fleurons de Corporate America, Wal-Mart, Gillette, récemment absorbé par Procter & Gamble, ou Coca-Cola. Mais aucune action Microsoft, qui pointe pourtant au troisième rang des "Blue Chips" américaines et mondiales, et pèse plus de 286 milliards de dollars.

Celui que l'on appelle "l'oracle d'Omaha", dans le Nebraska, pour l'acuité de ses pronostics et de ses décisions d'investissement, a beau jouer au bridge en ligne, il est un technophobe dès qu'il s'agit de placements. Quitte à rater de formidables plus-values en se privant des stars du Nasdaq, Apple ou Google. Quand ces dernières grimpaient de plus de 100%, les actions Microsoft et Berkshire Hattaway ont stagné l'an dernier. Au point que Google capitalise presque autant, désormais, que l'affaire de Buffet. On imagine mal cependant Bill Gates investir dans le célèbre moteur de recherche, qui est devenu le pire cauchemar de Microsoft. L'amitié ne s'achète pas, même si elle peut s'avérer un investissement des plus rentables.