Énergies renouvelables : malgré une hausse des capacités en 2023, les efforts sont encore insuffisants dans le monde

Le monde a installé l'an dernier 50% de capacités électriques renouvelables en plus par rapport à 2022, selon l'Agence internationale de l'énergie. Et ce ne serait que le début puisqu’elle anticipe un rythme inédit dans les années à venir. Reste qu’avec 507 gigawatts mis en service, les efforts sont encore loin d’être suffisants puisqu’il faudrait atteindre le triple chaque année d’ici 2030 pour tenir les objectifs fixés pour lutter contre le réchauffement climatique.
L'objectif de triplement des énergies renouvelables d'ici 2030 revient à passer de 3.600 GW de capacités à fin 2022 à 11.000 GW à la fin de la décennie.
L'objectif de triplement des énergies renouvelables d'ici 2030 revient à passer de 3.600 GW de capacités à fin 2022 à 11.000 GW à la fin de la décennie. (Crédits : Reuters)

Les énergies renouvelables gagnent du terrain de par le monde. Quelque 507 gigawatts (GW) ont été mis en service en 2023, soit 50% de plus que l'année précédente, selon le rapport Renouvelables 2023 publié ce jeudi 11 janvier par l'Agence internationale de l'énergie (AIE).

Les trois quarts de ces installations nouvelles de 2023 ont été dans le solaire photovoltaïque. Et c'est la Chine qui a de nouveau été le grand moteur de cette croissance (+66% d'éoliennes sur un an par exemple). Mais Europe, États-Unis, Brésil ont aussi atteint des niveaux inédits.

« La capacité de production d'électricité renouvelable ne s'est jamais étendue aussi rapidement en 30 ans, ce qui donne une vraie chance d'atteindre l'objectif que les gouvernements se sont fixé à la COP28 de tripler la capacité mondiale d'ici 2030 », souligne l'AIE.

Lire aussiCOP28 : tripler les capacités des énergies renouvelables d'ici à 2030, un objectif en trompe-l'œil ?

Des progrès, encore insuffisants

Une « chance », sans assurance d'y parvenir néanmoins. L'agence pointe d'ailleurs que ce rythme ne suffirait pas.

« Dans les conditions de marché et en l'état des politiques actuelles, la capacité mondiale serait multipliée par 2,5 d'ici 2030. Ce n'est pas encore assez pour atteindre l'objectif de triplement de la COP28, mais on s'en approche, et les gouvernements ont les outils nécessaires pour combler la différence », résume le directeur de l'AIE Fatih Birol.

D'après le think tank britannique Ember, pour arriver à cet objectif, « cela signifie que la planète doit installer environ 7.000 gigawatts (GW) de nouvelles capacités en sept ans », afin de passer de 3.600 GW de capacités à fin 2022 à 11.000 GW en 2030, d'après une note publiée en novembre. Donc d'atteindre un rythme d'au moins 1.500 GW de capacités additionnelles annuelles à l'horizon 2030, soit quasiment le triple des résultats de 2023. Cela permettrait d'éviter l'émission de 7 milliards de tonnes de CO2 d'ici à 2030, estime l'AIE.

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Le pari est donc encore colossal mais pas insurmontable. « Le niveau atteint en 2023 montre qu'un triplement est complètement réalisable », commente ce jeudi Dave Jones, membre de ce think tank. Un avis partagé par Thibaud Voïta, chercheur associé au Centre énergie et climat de l'Institut français des relations internationales (Ifri) : « C'est un objectif qui est assez consensuel et compte tenu de l'augmentation prodigieuse d'installation des renouvelables, il n'apparaît pas du tout utopique », indiquait-il fin novembre.

Des installations plus accessibles

Le contexte actuel est favorable aux énergies renouvelables, relève l'AIE. « L'éolien terrestre et le photovoltaïque sont meilleur marché aujourd'hui que les nouvelles centrales à combustibles fossiles presque partout, et moins chers que les centrales déjà installées dans la plupart des pays », souligne Fatih Birol. Les prix des modules photovoltaïques ont par exemple baissé de près de 50% sur un an en 2023, et ce mouvement devrait se poursuivre avec la montée observée des capacités manufacturières, relève l'agence.

La situation est plus délicate pour l'industrie éolienne hors Chine. Notamment en Europe où elle est affectée par la hausse des coûts de production, des taux d'intérêt et par la longueur des procédures d'obtention de permis. Si bien que les coûts de certains projets ont explosé. L'AIE a par ailleurs douché ce jeudi les espoirs d'un essor massif prochain pour l'hydrogène vert, estimant que seuls 7% des projets annoncés devraient entrer en service d'ici 2030, faute d'investissements et de demande suffisamment soutenue.

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Des pays qui doivent être moteurs

Reste un élément clé pour que cet objectif puisse être atteint : une réelle volonté politique des États. Du côté des pays riches et des gros émergents, l'AIE souligne la nécessité de mettre un terme aux hésitations dans les politiques nationales, de réduire les délais et les complications administratives et d'investir dans la modernisation et l'adaptation des réseaux.

Sur ce dernier point, l'agence mettait déjà en garde mi-octobre dans un précédent rapport sur un « manque d'ambition et d'attention » qui « risque de faire des réseaux électriques le maillon faible des transitions énergétiques propres ». Selon elle, il faudrait rénover ou ajouter l'équivalent de 80 millions de kilomètres de réseaux dans le monde en moins de deux décennies pour supporter l'augmentation de la production d'énergie électrique à partir des renouvelables.

Quant aux autres pays, ceux en développement, l'accès à des financements et la mise en place de cadres de régulation robustes seront déterminants, ajoute l'AIE. Ainsi que la fixation d'objectifs d'installation de renouvelables, objectifs encore absents dans certains pays. Un avis partagé par l'Agence internationale pour les énergies renouvelables (Irena).

Dans un rapport fin octobre, celle-ci plaidait pour une « réforme » de l'architecture financière mondiale, qui permettrait de soutenir la transition énergétique des pays de l'hémisphère sud. « Les financements liés au climat provenant des banques de développement doivent être accrus » et les capitaux publics « redirigés du secteur des combustibles fossiles vers les énergies renouvelables », estimaient les auteurs du rapport.

Record de production à partir de renouvelables dans les grands pays européens

2023 a été synonyme de fort développement des énergies renouvelables dans plusieurs pays d'Europe. Notamment l'Allemagne où leur production a atteint une hausse de 6% sur un an : la part de l'électricité produite à partir des renouvelables s'est établie à 55% du bouquet électrique national contre 48,42% en 2022. Si bien que les sources d'énergies propres ont « couvert 52% de la consommation d'électricité en 2023 » du pays, soit cinq points de plus que l'an dernier, a indiqué la semaine dernière la BDEW, l'organisation commerciale allemande de l'industrie de l'énergie et de l'eau.

L'augmentation a été encore plus marquée en Espagne. La production d'électricité renouvelable a grimpé de 8% par rapport à 2022, passant d'une part de 42,2% du bouquet électrique national à 50,4% (soit près de 135.000 gigawatts/heure de capacités).

Record aussi du côté du Portugal. Le pays a annoncé début janvier que la production d'énergies renouvelables a fourni 61% de l'électricité consommée dans le pays ibérique.

Aucun chiffre n'a encore été dévoilé pour la France. Le pays se retrouve en tout cas souvent pointé du doigt pour son retard dans le développement des énergies renouvelables. Dans un rapport sorti fin décembre, Greenpeace jugeait ainsi que l'Hexagone est « à la traîne » par rapport à ses voisins européens en matière d'ambition pour les années à venir.

(Avec AFP)

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Commentaires 5
à écrit le 11/01/2024 à 19:37
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Merci Georges Tout est dit! Et bien dit , avec des faits et des preuves , bien loin des affirmations simplistes des vendeurs de vent qui ont de plus en plus de mal à contrer les evidences. Je vous inviter. à regarder votre facture d'électricité , 5...

à écrit le 11/01/2024 à 14:29
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je ne dis pas qu'il ne faut pas en mettre mais qui me donne l'efficacité réelle de ces énergies renouvelables? leur ROI? je circule beaucoup et vois les éoliennes la plupart du temps à l'arrét. de qu'elles aides (et donc NOS IMPOTS) bénéficient ce s...

à écrit le 11/01/2024 à 11:23
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"Record de production à partir de renouvelables dans les grands pays européens", notamment en Allemagne : mais cette dernière continue à émettre énormément de CO2 par MWh produit. La démonstration à grande échelle de l'inadéquation de cet outil pour ...

le 11/01/2024 à 12:46
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Georges, comme il est ecrit dans l article, l eolien et surtout le photovoltaique sont moins cher que le fossile (charbon, ect) et que le nucleaire. D autre part, il faut aller vite et tripler l installation de centrales jusqu en 2030. Le nucleaire ,...

le 11/01/2024 à 14:50
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@Michel - D'une part, les renouvelables intermittents ne sont pas moins chers, car la valeur d'un MWh d'électricité produit de façon aléatoire par une source intermittente n'est pas du tout la même que celle d'un MWh produit au moment où on en a beso...

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