Nouvel accord sur le Brexit, incertitudes sur le vote samedi

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Brexit: un accord a ete conclu, annoncent juncker et jonhson[reuters.com]
(Crédits : Henry Nicholls)

par Marine Pennetier

BRUXELLES (Reuters) - A deux semaines de la sortie annoncée du Royaume-Uni de l'Union européenne, Londres et Bruxelles ont annoncé jeudi un accord sur le Brexit, validé dans la foulée par le Conseil européen, mais l'incertitude demeure quant à son approbation à la Chambre des communes.

"Nous sommes très proches de la fin du processus", a estimé le président du Conseil européen Donald Tusk, se réjouissant de voir s'éloigner le spectre du "chaos" qu'aurait entraîné un "no deal" le 31 octobre.

"Nous attendons maintenant le vote des deux Parlements", britannique et européen, a-t-il ajouté lors d'une conférence de presse avant le dîner prévu à Bruxelles entre les 28 chefs d'Etat et de gouvernement.

Parlant d'un "excellent nouvel accord", le Premier ministre britannique Boris Johnson a de son côté exprimé sa "confiance" de voir les députés britanniques "voter" en faveur du texte lors de la session parlementaire exceptionnelle samedi à Londres.

La marge de manoeuvre du locataire du 10 Downing Street s'annonce toutefois très étroite et l'équation compliquée. Au moins 318 voix sont en effet nécessaires pour que le texte soit ratifié aux Communes, qui ont rejeté par trois fois un précédent accord conclu en novembre 2018. [nL5N2725K4]

Signe des difficultés à venir, le Parti unioniste démocrate (DUP), modeste formation nord-irlandaise qui permet à Boris Johnson de disposer d'une majorité parlementaire, a prévenu qu'il ne pourrait pas "en l'état actuel des choses" voter l'accord.

"Nous ne pouvons pas soutenir ce qui est suggéré concernant les questions de douane et de consentement et il y a un manque de clarté sur la TVA", a prévenu le parti, qui compte 10 députés, dans un communiqué. "Nous continuerons à travailler avec le gouvernement pour tenter de parvenir à un accord raisonnable qui fonctionne pour l'Irlande du Nord et protège l'intégrité économique et constitutionnelle du Royaume-Uni".

"SÉCURITE JURIDIQUE"

Même opposition dans les rangs des travaillistes - où le chef de file du principal parti d'opposition Jeremy Corbyn a déclaré ne pas être en mesure de soutenir cet accord - du Scottish National Party et du Parti du Brexit de Nigel Farage.

L'accord obtenu jeudi après une série d'ultimes négociations portant notamment sur la question de la frontière avec l'Irlande et la relation future entre Londres et le bloc est le deuxième conclu entre les deux parties depuis le référendum du 23 juin 2016 qui a conduit au Brexit.

Le nouvel accord, qui devra également être approuvé par le Parlement européen puis être ratifié par les Vingt-Sept, ne prévoit plus de "backstop" - clause censée empêcher le rétablissement de contrôles douaniers entre la République d'Irlande et la province britannique d'Irlande du Nord - point rejeté par Boris Johnson.

La nouvelle version propose le maintien de l'Ulster dans la zone douanière du Royaume-Uni et l'instauration de droits de douane pour les marchandises transitant de l'île britannique vers la province si elles doivent passer par la suite dans le marché unique via l'Irlande.

Pour le négociateur en chef de l'UE, Michel Barnier, la nouvelle version "permet d'apporter de la sécurité juridique, de la certitude partout où le Brexit crée, comme toute séparation, de l'incertitude et, d'abord, pour les citoyens".

"Grâce à cet accord, leurs droits seront enfin garantis dans la durée", a-t-il souligné, assurant que les "engagements financiers pris à 28 seront bien respectés à 28 et honorés".

"Cette proposition comprend la période de transition qui avait été demandée par le gouvernement britannique et qui durera jusqu'à la fin 2020 et peut-être deux années de plus en cas d'accord conjoint de l'UE et du gouvernement britannique", a précisé le négociateur.

PRUDENCE

A leur arrivée à Bruxelles, les dirigeants des 28 Etats membres oscillaient entre satisfaction et prudence.

"Cet accord apparaît aujourd'hui comme un bon compromis", a estimé le chef de l'Etat français Emmanuel Macron. "Maintenant, il convient de passer les prochaines étapes et instruits par le passé, il faut rester raisonnablement prudents".

L'accord conclu est "bon pour l'Irlande et l'Irlande du Nord" et "respecte une Histoire et une géographie uniques", s'est réjoui le Premier ministre irlandais Leo Varadkar. "Pas de frontière physique. L'économie de l'île dans son intégralité et Est-Ouest peut continuer à prospérer. Le marché unique est protégé, comme notre place en son sein", a-t-il dit sur Twitter.

Quant à la présidente élue de la Commission européenne Ursula Von Der Leyen, elle a estimé que c'était un "bon point de départ pour les futures négociations et la relation future entre le Royaume-Uni et l'Union européenne".

L'annonce de l'accord a été saluée par les Bourses européennes qui ont accru leur progression jeudi matin. La livre sterling a quant à elle grimpé à un plus haut de cinq mois face au dollar.

(Avec le bureau de Bruxelles et Jean-Philippe Lefief à Paris, édité par Sophie Louet)