Lagos, la mégapole du Nigeria, mise à l'arrêt par le coronavirus

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Lagos mise a l'arret par le coronavirus[reuters.com]
(Crédits : Temilade Adelaja)

par Angela Ukomadu et Alexis Akwagyiram

LAGOS (Reuters) - Lagos, la mégapole nigériane aux 20 millions d'habitants au moins, s'est arrêtée mardi alors qu'entraient en vigueur pour une durée minimale de deux semaines les mesures de confinement décrétées pour enrayer la propagation du coronavirus.

La riposte du Nigeria à l'épidémie s'applique aussi à Abuja, la capitale administrative du pays le plus peuplé d'Afrique, et à l'Etat d'Ogun.

D'après les dernières données disponibles, le Nigeria compte 131 cas confirmés de contamination au SARS-CoV-2, dont deux cas mortels. A l'échelle du continent africain, le bilan de l'épidémie ressortait mardi matin à 5.300 cas confirmés pour quelque 170 décès.

L'arrêt de la circulation ordonné par le président nigérian Muhammadu Buhari "pour une période initiale de 14 jours" est entré en vigueur lundi soir.

"Tous les habitants de ces régions doivent rester chez eux. Les déplacements vers ou en provenance d'autres Etats devront être repoussés. Toutes les entreprises et bureaux situés dans ces lieux devront être totalement fermés durant cette période", a précisé le chef de l'Etat lors d'une allocution télévisée dimanche soir, sa première adresse à la nation depuis l'apparition d'un premier cas de coronavirus fin février dans le pays.

"Nous avons pleinement conscience que ces mesures seront une épreuve et une gêne pour de nombreux habitants, mais c'est une question de vie ou de mort", a-t-il ajouté.

Mardi à Lagos, les rues traditionnellement bloquées par d'interminables embouteillages sur fond de concert de klaxons étaient quasiment désertées, hormis les ambulances et les véhicules de police.

CONFUSION

De nombreux barrages routiers ont été établis dans la plus grande ville d'Afrique, que les voitures ne franchissent qu'au compte-gouttes.

Une certaine confusion régnait également. Muhammadu Buhari a indiqué que les magasins alimentaires et les infrastructures de santé pourraient rester ouverts mais il n'a pas précisé si la population pourrait sortir de chez elle à titre de dérogation pour s'y rendre.

L'absence de transports en commun dans cette ville tentaculaire complique aussi les déplacements des personnels de santé. Onolapo Adebayo, rencontré peu avant 09h00 à un arrêt de bus, explique qu'il travaille dans la santé. "On m'a appelé pour aller au bureau, mais il n'y a aucun véhicule", dit-il.

Dans un pays où la majorité de la population vit avec moins de deux dollars par jour, difficile aussi de constituer des stocks pour tenir le temps du confinement.

Les autorités de l'Etat de Lagos ont mis en place ce mardi des distributions de rations alimentaires à destination de 200.000 foyers, soit 1,2 million de personnes.

Le gouvernement fédéral a décidé pour sa part de transférer directement de l'argent aux Nigérians les plus pauvres pour les aider à traverser la crise.

Et les conditions de vie de nombreux habitants de Lagos annoncent un confinement compliqué.

Adejokun, qui réside à Iwaya, un bidonville sur les bords de la lagune, explique qu'elle vit dans une seule pièce avec son mari, leurs trois enfants et sa belle-mère. Un panneau en bois divise vaguement l'espace entre une chambre et un petit salon.

Elle partage une seule salle d'eau et toilettes avec une vingtaine d'autres familles qui vivent dans les mêmes conditions qu'elle.

"Nous prions pour que le gouvernement puisse nous trouver à manger", disait-elle lundi, avant l'entrée en vigueur des mesures de confinement.

(version française Henri-Pierre André)