L’Assemblée du Conseil de l’Europe tend la main à Moscou

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(Crédits : Vincent Kessler)

STRASBOURG (Reuters) - Un projet de modification du règlement de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE) sera soumis aux voix en octobre à Strasbourg en vue de trouver une solution à la crise ouverte depuis quatre ans entre l'organisation et la Russie, a-t-on appris auprès d'un porte-parole de l'Assemblée.

Le texte proposé, qui a été adopté jeudi à Paris par la commission du règlement, durcirait les critères formels permettant d'adopter des sanctions contre une délégation nationale, faisant notamment passer la majorité requise aux deux tiers des membres contre une majorité simple actuellement.

Privée de ses droits de vote en avril 2014, en réaction à l'annexion de la Crimée par la Russie, la délégation russe auprès de l'APCE a cessé de se présenter à Strasbourg après que les sanctions eurent été reconduites en janvier 2015.

La crise politique a dégénéré en crise financière et juridique.

La Russie, grand contributeur au budget de l'organisation de défense de la démocratie et des droits de l'homme, auquel elle participe à hauteur de 10%, a cessé de payer son écot, en juin 2017, en arguant de l'absence de sa délégation parlementaire.

Elle menace en outre le Conseil de l'Europe, pour les mêmes raisons, de recours juridiques contre les élections, par l'APCE, des juges à la Cour des droits de l'homme, du Commissaire aux droits de l'homme et du secrétaire général du Conseil dont le mandat sera renouvelé l'an prochain.

RISQUES DE PARALYSIE

Face au risque d'une paralysie de l'organisation, les pressions et invitations à trouver une solution se sont multipliées ces derniers mois auprès de l'APCE, émanant tant de certains pays que du secrétaire général, le Norvégien Thorbjorn Jagland.

"Je voudrais comparer notre rôle avec celui de la Croix-Rouge (...) qui doit éviter d'être entraînée dans les conflits", avait-il affirmé en janvier dernier à l'APCE en l'invitant à solder la crise avec Moscou.

Outre la majorité qualifiée qui serait requise pour le vote de sanctions, le projet de modification du règlement prévoit qu'une contestation des pouvoirs d'une délégation ne puisse être introduite que par un sixième des 324 parlementaires, contre trente membres actuellement. Les demandeurs devraient, comme aujourd'hui, appartenir à cinq délégations nationales.

Il n'est pas sûr, cependant, qu'une telle réforme satisfasse Moscou. Les Russes demandent, depuis 2016, que le mécanisme de sanctions soit purement aboli.

Il n'est pas sûr non plus que cette réforme soit adoptée, l'Ukraine, dépossédée de la Crimée, ainsi que certains pays d'Europe orientale comme la Pologne, mais aussi le Royaume-Uni, étant peu disposés à faire des concessions aux Russes, selon des sources diplomatiques et au sein de l'APCE.

Le temps presse. C'est en janvier à Strasbourg que les délégations parlementaires soumettent leur pouvoir à ratification pour l'année entière.

Or, si les Russes poursuivent leur politique de la chaise vide, les 46 autres Etats membres devront envisager des sanctions contre Moscou au bout de deux ans de non-paiement de sa contribution budgétaire. Nous serons alors en juillet 2019, sous présidence française.

(Gilbert Reilhac, édité par Yves Clarisse)