EDF : La production nucléaire française vers un plus bas depuis 30 ans

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Edf revoit en forte baisse sa prevision de production d'electricite nucleaire[reuters.com]
(Crédits : Vincent Kessler)

PARIS (Reuters) - EDF a annoncé jeudi que la production française d'électricité d'origine nucléaire devrait s'établir en 2020 à son plus bas niveau depuis trente ans en raison de l'impact de l'épidémie de coronavirus.

L'électricien public, qui a fortement révisé à la baisse ses estimations, a précisé dans un communiqué qu'il tablait sur une production d'environ 300 térawatts-heure (TWh) contre 375 à 390 TWh précédemment. A capacités comparables, le niveau de 300 TWh constituerait un plus bas historique pour la production nucléaire française.

La crise sanitaire liée au virus perturbe les opérations de maintenance des centrales - et donc leur capacité de production - et a entraîné une baisse de la consommation d'électricité pouvant atteindre 20% par rapport aux niveaux habituels, conduisant le groupe à diminuer l'utilisation de son parc, a expliqué EDF dans un communiqué.

"Dans ce contexte, EDF est en train d'adapter son programme d'arrêts pour maintenance afin d'ajuster au mieux ses capacités de production", a-t-il ajouté.

Le groupe, en liaison avec le gestionnaire des lignes à haute tension françaises RTE, a aussi indiqué qu'il souhaitait contribuer "à la sécurisation de l'approvisionnement en électricité pendant l'hiver 2020-2021" et que la production de plusieurs réacteurs "pourrait être suspendue cet été et cet automne, afin d'économiser le combustible de ces unités".

EDF, qui dispose aujourd'hui de 57 réacteurs en France après la fermeture de l'unité n°1 de Fessenheim (Haut-Rhin) et avant celle de l'unité n°2 prévue le 30 juin, estime en outre que sa production nucléaire annuelle française sera comprise entre 330 et 360 TWh chaque année en 2021 et en 2022.

Même si les investisseurs s'attendaient à une chute de cette production en 2020, le nouvel objectif d'EDF est plus faible que prévu et les prévisions pour 2021 et 2022 sont aussi négatives, ont commenté dans une note les analystes de Barclays.

A la Bourse de Paris, le titre EDF reculait de 4,73% à 7,276 euros vers 14h15, accusant la plus forte baisse du SBF 120 (+0,11%).

DES MESURES EN FAVEUR DES CLIENTS

"Il faut revoir tous les arrêts de tranche qui étaient envisagés dans le cadre du grand carénage ainsi que la gestion du combustible, ce qui n'est pas simple", a expliqué à Reuters une source proche de la direction.

"Notre objectif, c'est de faire en sorte que les centrales soient capables de tourner l'hiver prochain. Mais si le virus revient à ce moment-là, la situation sera catastrophique", a ajouté cette source.

Selon Yves Marignac, responsable du pôle nucléaire au sein de négaWatt et porte-parole de l'association, qui promeut les économies d'énergie et les renouvelables, les contraintes liées au coronavirus conduisent EDF "à devoir se projeter dans une situation potentielle de conflit entre la bonne réalisation des opérations de surveillance et de maintenance et la disponibilité des réacteurs sous l'angle de la sécurité d'approvisionnement".

"On verra comment l'exploitant et l'autorité de sûreté gèrent cette situation, mais on peut d'ores et déjà anticiper que les répercussions du gel d'une partie des opérations de maintenance actuelles mettent le système en tension et génèrent des risques supplémentaires vis-à-vis de la sûreté dans les mois qui viennent. Donc il faudra être d'autant plus vigilant sur ce point", a-t-il ajouté.

EDF, dont l'Etat détient 83,6% du capital, exploite les 19 centrales nucléaires du parc français, qui ont assuré 71% de la production d'électricité du pays en 2019.

Après avoir supprimé le solde du dividende qu'il envisageait de verser au titre de 2019, le groupe a annoncé mardi qu'il renonçait à ses objectifs financiers pour 2020 et 2021.

EDF a par ailleurs décidé jeudi de "garantir la fourniture d'énergie à l'ensemble de ses clients particuliers en suspendant, jusqu'au 1er septembre 2020, toute réduction ou interruption de la fourniture d'électricité et de gaz ainsi que les pénalités de retard pour tous ses clients particuliers".

Pour ses clients en difficulté, le groupe s'est en outre engagé à "assouplir ses modalités et échéanciers de paiement".

(Bertrand Boucey, Blandine Hénault et Benjamin Mallet)