Corse : Emmanuel Macron propose une autonomie, « ni contre l'Etat ni sans l'Etat »

Pour Emmanuel Macron, cette « nouvelle étape institutionnelle » doit permettre d'« ancrer pleinement la Corse dans la République et de reconnaître la singularité de son insularité méditerranéenne et son rapport au monde ». Le chef de l'Etat a octroyé six mois aux groupes politiques corses et à l'Assemblée territoriale pour parvenir à un accord sur un texte avec le gouvernement.
« Nous devons avancer et il faut pour cela l'entrée de la Corse dans notre Constitution », car « le statu quo serait notre échec à tous », a assuré le président de la République.
« Nous devons avancer et il faut pour cela l'entrée de la Corse dans notre Constitution », car « le statu quo serait notre échec à tous », a assuré le président de la République. (Crédits : Reuters)

[Article publié le jeudi 28 septembre 2023 à 13h15 et mis à jour à 15h20] Evoquant un « moment historique », le président Emmanuel Macron a proposé ce jeudi 28 septembre qu'« une nouvelle étape soit franchie » avec « l'entrée de la Corse » dans la Constitution française et « une autonomie » pour l'île, qui ne soit « ni contre l'Etat, ni sans l'Etat ».

« Nous devons avancer et il faut pour cela l'entrée de la Corse dans notre Constitution », car « le statu quo serait notre échec à tous », a assuré le président de la République, s'exprimant à Ajaccio devant l'Assemblée de Corse, contrôlée par les nationalistes.

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« Ayons l'audace de bâtir une autonomie à la Corse dans la République », a-t-il dit aux élus insulaires, appelant à « bâtir un référentiel qui soit pleinement corse », mais sans désengagement de l'Etat : « Ce ne sera pas une autonomie contre l'Etat ni une autonomie sans l'Etat ».

Pour lui, cette « nouvelle étape institutionnelle » doit permettre d'« ancrer pleinement la Corse dans la République et de reconnaître la singularité de son insularité méditerranéenne et son rapport au monde ».

« La Corse doit rester la Corse »

Le chef de l'Etat a répondu, souvent indirectement, aux principales demandes fondamentales exposées par les nationalistes dans une résolution adoptée par 75% des voix de l'Assemblée de Corse le 5 juillet dernier. A la demande de co-officialité de la langue corse, le président a seulement précisé qu'il souhaitait que celle-ci « puisse être mieux enseignée et placée au cœur de la vie de chaque Corse », via la création d'un « service public de l'enseignement du bilinguisme ».

Sur le souhait d'un « statut de résident », pour lutter contre la dépossession foncière, Emmanuel Macron a reconnu qu'il y avait une « situation immobilière et foncière insoutenable », appelant à l'établissement de « dispositifs, notamment fiscaux », pour lutter contre la spéculation immobilière. Mais ce « tout en respectant notre droit européen », a-t-il ajouté. Concernant la volonté nationaliste de voir la notion de « peuple corse » inscrite dans la Constitution, il a seulement proposé qu'une « communauté insulaire, historique, linguistique et culturelle » y soit reconnue.

Enfin, sur le souhait de confier un pouvoir législatif à l'Assemblée de Corse, le chef de l'Etat a appelé à « rendre plus simple et plus effectif le droit d'adaptation et le droit d'habilitation », se déclarant « favorable » à ce que l'île puisse « définir des normes sur des matières transférées ». Mais cela « sous l'autorité du conseil d'Etat », a-t-il spécifié.

Côté calendrier, le président Emmanuel Macron a donné « six mois » aux groupes politiques corses et à l'Assemblée territoriale corse pour arriver à un « accord » avec le gouvernement sur un « texte constitutionnel et organique » qui permettra de modifier le statut de la Corse. Et le chef de l'Etat d'insister au passage sur le fait qu'« il n'y a pas de ligne rouge, il y a l'idéal de la République ».

« La Corse retient son souffle », lui avait lancé juste avant la présidente autonomiste de l'Assemblée de Corse, Marie-Antoinette Maupertuis : « La Corse doit rester la Corse et devenir le territoire autonome qu'elle doit être », avait-elle exhorté, soulignant notamment le « ressenti de dépossession immense » de la jeunesse dans l'île.

Plusieurs points encore en suspens

« Le statut d'autonomie que nous appelons de nos vœux s'inscrit au sein de la République française », a promis de son côté Gilles Simeoni, président autonomiste de l'exécutif de Corse, citant « cinq enjeux », « historique de reconnaissance », « sociétal », « économique et social » et « démocratique avec le refus de toute logique de pression ou de dérive mafieuse ».

A l'issue du discours présidentiel, le député de Haute-Corse, Jean-Félix Acquaviva (Liot) a estimé qu'« Emmanuel Macron a quand même ouvert le jeu ». « Cela veut dire que l'histoire continue, nous ne sommes pas à la fin de l'histoire : il faudra rediscuter d'un contenu (...), des compétences transférées et du statut réel de la langue », a-t-il insisté au micro de Corse-Matin.

"Nous avons un président de la République qui a quand même ouvert le jeu" : la réaction de Jean-Félix Acquaviva après le discours d'Emmanuel Macron pic.twitter.com/BvL5TXGVwE

— Corse-Matin (@Corse_Matin) September 28, 2023

« Je pense que les messages sont passés et que le travail a été réalisé », a salué député de Corse-du-Sud, Laurent Marcangeli (Horizons).

Moins enthousiaste, Paul-Félix Benedetti, leader des élus du parti indépendantiste Core in Fronte, a estimé lui sur X (ex-Twitter) qu'Emmanuel Macron « n'a pas eu de mots forts » : « S'il considère qu'il n'y a plus de lignes rouges, il doit aller vers la délibération du 05/07 ». Jean-Martin Mondoloni, chef de file de l'opposition régionale de droite, a lui estimé auprès de l'AFP que « le président a su trouver les mots justes ».

Clap de fin de 18 mois de discussions

Dans les faits, ce discours présidentiel a permis de clôturer des mois de discussions entre le gouvernement et les responsables politiques locaux, ponctués mercredi par un dîner à la préfecture d'Ajaccio, où chacun a mis ses dernières cartes sur la table. Pour rappel, ces discussions avaient débuté après une explosion de violences insulaires en 2022. La mort du militant indépendantiste Yvan Colonna, agressé à la prison d'Arles, où il purgeait une peine de perpétuité pour l'assassinat en 1998 du préfet de Corse Claude Erignac à Ajaccio, avait alors déclenché de virulentes manifestations.

A la sortie du dîner mercredi, la tonalité était plutôt positive. Les participants avaient évoqué un « très bon état esprit », une « impression d'ouverture » et un possible « moment de bascule » avec le discours présidentiel. Jean-Félix Acquaviva, député autonomiste de Haute-Corse du parti de Gilles Simeoni, avait évoqué « une volonté de converger pour trouver des points d'équilibre suffisamment forts qui permettent de dire que demain nous serons dans un moment important voire historique ».

Les nationalistes, qui contrôlent l'Assemblée de Corse, réclamaient un pouvoir législatif propre, un statut de résident corse, la co-officialité de la langue corse et l'inscription de la notion de peuple corse dans la Constitution. La droite, à l'inverse, se disait seulement favorable à une « adaptation » des lois de la République aux spécificités corses.

Emmanuel Macron se rendra dans l'après-midi ce jeudi à Bastia, pour une prise d'armes en présence d'unités militaires dont l'histoire est liée à la libération de la Corse, et pour une visite au Musée de Bastia. Il décorera aussi le dernier tirailleur marocain encore en vie, Salah Ben El Hadj, âgé de 104 ans. Le chef de l'Etat finira ensuite sa journée à Bonifacio, dans l'extrême-sud de l'île. Il y dévoilera une plaque en hommage au résistant Albert Ferracci au collège qui porte désormais son nom.

La Corse avait été le premier territoire français libéré, le 4 octobre 1943, grâce à une insurrection populaire et l'aide des troupes françaises d'Afrique. Elle avait été envahie en novembre 1942 par plus de 80.000 soldats italiens et une brigade SS, à laquelle s'était jointe une division de Panzers à l'été 1943.

(Avec AFP)

Commentaires 9
à écrit le 29/09/2023 à 4:00
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This is a risc that Corse may join Italy or Russia. Army, money and projects may leave Corse in France.

à écrit le 28/09/2023 à 16:54
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Donc si je comprends bien, la nation bretonne doit tout casser pour se faire entendre?

à écrit le 28/09/2023 à 16:53
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Quel est l'avenir de ce porte avions à l'ancre dont le seul moteur est le tourisme.... à part le marché de la Drogue?

à écrit le 28/09/2023 à 16:15
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On peux admettre que le changement de ton de Mr Macron sur le peuple Corse est verbalisé. A t’il changé sur les peuples de France comme les Bretons, les basques ou les alsaciens , attendons de voir! Mon opinion est qu’il s‘agit d‘un: „je vous ai comp...

à écrit le 28/09/2023 à 15:29
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C'est du blabla , Macron n'aura pas la majorité pour faire voter ce projet.

à écrit le 28/09/2023 à 15:24
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Mr Raymond BART avait la solution 's'ils veulent l'indépendance OK mais pas avec l'argent des contribuables Mais surtout pas les propositions de mr Macron qui couteront une fortune à la metropole

le 28/09/2023 à 16:58
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M. Raymond BARRE est l'orthographe correcte du nom de l'ancien ministre.

à écrit le 28/09/2023 à 14:11
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Après Mayotte pour Sarkozy, Mr Macron décide sans référendum ce qui est bon pour l avenir des français.

le 28/09/2023 à 14:39
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Comme il l'avait fait en tant que Ministre de Hollande en étant le seul ministre a avoir mis les Français dans la rue ce qui lui a valu de perdre son poste et comme il le fait aussi depuis sa première élection en 2017. Que voulez vous les citoyens fr...

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