Echec des négociations sur l'emploi des seniors, la convention d'assurance chômage sur la sellette

Les syndicats ont dressé dans la nuit de mardi à mercredi un constat d'échec de trois mois et demi de négociations sur l'emploi des seniors, compromettant la validation par le gouvernement de la convention d'assurance chômage négociée à l'automne.
L'objectif de ce texte était d'augmenter le taux d'emploi des seniors, plus bas en France que dans la plupart des pays européens
L'objectif de ce texte était d'augmenter le taux d'emploi des seniors, plus bas en France que dans la plupart des pays européens (Crédits : Reuters)

Les 48 dernières heures de tractations n'auront pas suffi. Les syndicats et le patronat n'auront pas réussi à trouver des compromis pour faciliter l'emploi des seniors, alors le leur taux d'emploi est plus bas en France que dans la plupart des pays européens. La cinquième et dernière version du texte, qui comportait très peu de modifications sur le fond par rapport aux deux dernières versions précédentes, a été remise par le patronat aux syndicats tard dans la soirée de mardi, sans parvenir à donner satisfaction aux organisations syndicales.

Le texte ne crée « aucun droit nouveau pour les salariés » a regretté le négociateur de la CFDT Yvan Ricordeau, à l'issue des négociations. Un constat partagé par les quatre autres syndicats. « Il n'y a pas de nouveaux droits, il y a moins de destructions (de droits) que prévu, mais surtout des grands manques », a aussi pointé le négociateur de FO Michel Beaugas, qui a réservé la position de son organisation. « On va lister les plus et les moins : il n'y aura pas beaucoup de plus », a expliqué Denis Gravouil pour la CGT. « L'avis que je vais faire passer à nos instances n'est pas favorable », a renchéri Eric Courpotin (CFTC), tandis que Jean-François Foucard (CFE-CGC) a dit qu'il proposerait à son instance dirigeante « de ne pas signer cet accord ».

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Une issue inéluctable

Cette issue semblait déjà inéluctable après les déclarations de Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, mardi matin, sur RTL : « Le patronat n'a pas vraiment compris l'objet de cette négociation » et « nous propose dans son projet d'accord de multiples façons de mieux licencier les seniors, donc on est encore sur un hors-sujet.» Pour lutter contre le chômage des seniors, la CGT propose de « sanctionner les entreprises qui ne jouent pas le jeu en matière d'emploi des seniors » et appelle à « aménager les conditions de travail et les fins de carrière avec un temps partiel seniors payé et cotisé à temps plein ».

Plusieurs syndicats ont souligné le fait qu'une ouverture patronale sur un droit à une retraite progressive aurait pu changer la donne, mais le Medef comme le gouvernement ont argué que la mesure coûtait trop cher. « Le patronat ne voulait pas de cette négociation depuis le départ, il a essayé de la retourner dans son sens » pour mieux l'évacuer, a estimé Yvan Ricordeau. L'adhésion de la CFDT au texte était déterminante pour parvenir à un compromis. FO et la CFDT vont réunir mercredi et jeudi leurs instances dirigeantes pour décider formellement de valider ou non l'accord, mais les déclarations négatives de leurs négociateurs ne laissent guère de doute sur le fait que leur décision sera négative.

Les regrets du Medef

Le négociateur du Medef Hubert Mongon a regretté que les syndicats aient campé sur leurs positions initiales durant toute la durée des négociations. Il a rappelé que son organisation avait voulu « faire en sorte de travailler à l'élévation du taux d'emploi dans le pays », en améliorant avec la qualité de l'environnement de travail, tout en évitant « la désinsertion professionnelle ». Selon lui, le projet d'accord soumis à signature a répondu « à un certain nombre d'aspirations » de plusieurs syndicats.

Comme attendu, le Compte épargne temps universel (Cetu), promu par la CFDT, mais rejeté par le Medef et la CPME, était aussi absent de la version finale du texte. Censé permettre à l'ensemble des actifs de convertir des jours de congé ou de repos non pris en rémunération ou de partir à la retraite de manière anticipée, il devrait toutefois faire l'objet d'une négociation séparée la semaine prochaine -possiblement mardi- à l'initiative de l'Union des entreprises de proximité (U2P), la troisième organisation patronale qui représente artisans, professions libérales et commerçants.

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La main au gouvernement

Cet échec redonne la main au gouvernement sur la suite, lui qui s'était pourtant engagé en cas d'accord à transcrire dans la loi le texte issu des négociations. « C'est d'ailleurs ça qui fait que le patronat n'est pas pressé de conclure un accord à nos conditions, parce que le gouvernement lui a déjà promis monts et merveilles », a aussi dénoncé la secrétaire générale de la CGT

La réunion qui était prévue ce mercredi à l'Unédic, en cas d'accord, pour signer un avenant sur l'indemnisation des seniors, en présence des syndicats signataires de la convention d'assurance chômage de novembre dernier (CFDT, FO et CFTC) et des trois organisations patronales est, elle, « reportée à une date ultérieure dans l'attente de la décision finale des différentes parties », selon le représentant du Medef. Cette signature devait ouvrir la voie à la validation de l'accord paritaire par le gouvernement.

Mais le Premier ministre Gabriel Attal a d'ores et déjà annoncé sa volonté de durcir encore les conditions d'indemnisation des chômeurs pour, justifie-t-il, les inciter davantage à reprendre un emploi. Aussi les partenaires sociaux devraient-ils recevoir au printemps une nouvelle lettre de cadrage pour négocier une nouvelle convention, avec des économies à la clé pour l'assurance chômage, alors que le gouvernement cherche à réduire le déficit public.

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Fin mars, Gabriel Attal a annoncé sur TF1 avoir demandé à la « ministre du Travail de préparer de nouvelles négociations » en vue « d'une vraie réforme, plus globale de l'assurance chômage » cette année, évoquant plusieurs pistes possibles comme réduire la durée d'indemnisation « de plusieurs mois ». Le chef du gouvernement a également évoqué les deux autres « pistes » qui concernent le temps minimal qu'il faut avoir travaillé pour bénéficier du chômage - aujourd'hui six mois lors des deux dernières années - et le « niveau d'indemnisation du chômage ». Un projet de réforme qualifié « d'inacceptable » par la CGT tandis que la CFDT a estimé que ce régime ne pouvait pas être une « variable d'ajustement budgétaire ».

Commentaires 5
à écrit le 10/04/2024 à 15:53
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Le problème de l'emploi des séniors est simple! En tout cas au niveau du diagnostic. Soit vous avez un bon job à 62 ans (mais la question se posera bientôt à 64 ou 65 ans), c'est à dire un job perenne, qui vous plaît, correctement rémunéré avec une p...

le 10/04/2024 à 21:08
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On pourrait ajouter que l'électorat macroniste est essentiellement composé de cols blancs et les partis agrégés dans la Macronie ont acheté leur vote avec des fins de carrières protégées et des retraites précoces (parfois dès 51 ans dans certains gro...

à écrit le 10/04/2024 à 10:49
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Les gouvernements successifs et celui particulièrement n’ est pas crédible , paresseux , enfermé dans ses dogmes de caste et ses certitudes Lemaire- Macron- Attal : il a créé le cadre d un licenciement général des seniors via la rupture conventionne...

le 10/04/2024 à 16:22
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Le champion du monde du blanchiment de recel de fraude fiscale (nom officiel de la Suisse) ne pourra jamais être un modèle pour les autres pays. Souvenez vous de l'or de Belgique volé par le Reich; souvenez-vous aussi du compte suisse du corrompu Ray...

à écrit le 10/04/2024 à 10:33
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Attal : de quel emploi parlez vous ? Quand vous êtes cadre ou ou autre devez vous accepter un emploi de maçon ou de serveur à 58 ans à 80 kms de chez vous sans transport et payé a 50%? Et quid des prêts immobiliers- travaux- voiture dont vous avez ...

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