Finances publiques : le carton rouge de la Cour des comptes

Dans son dernier rapport rendu public ce mardi, la Cour des comptes juge que "le redressement des finances publiques, déjà très graduel au cours des dernières années, est aujourd’hui quasiment à l’arrêt".
Grégoire Normand
Le taux des prélèvements obligatoires devrait nettement baisser entre 2018 et 2019 passant de 45% en 2018 à 44% en 2019.
Le taux des prélèvements obligatoires devrait nettement baisser entre 2018 et 2019 passant de 45% en 2018 à 44% en 2019. (Crédits : © Christian Hartmann / Reuters)

C'est un nouvel avertissement pour le gouvernement. Le dernier rapport de la Cour des comptes publié ce mardi 25 février note que "le redressement des finances publiques, déjà très graduel au cours des dernières années, est aujourd'hui quasiment à l'arrêt". Malgré ce jugement relativement sévère, le gouvernement a peu de marges de manoeuvre. La croissance économique a été révisée à la baisse en 2019 et devrait s'établir à 1,2%. À la grande surprise des conjoncturistes, le PIB s'est contracté au dernier trimestre à -0,1%, contre +0,3% au troisième trimestre. Ce qui devrait affecter l'activité en ce début d'année. En outre, l'économie mondiale, déjà plombée par les tensions commerciales, devrait pâtir du coup de frein de la Chine actuellement paralysée par l'épidémie de Coronavirus.

>Lire aussi : Coronavirus : l'économie chinoise asphyxiée, l'activité mondiale menacée

Un redressement des finances publiques limité

Le redressement des finances publiques reste réduit. Avec la multiplication des mesures exceptionnelles et temporaires, l'examen plus approfondi du solde structurel permet de mieux mesurer l'évolution sous-jacente des finances publiques. En 2019, l'amélioration du solde structurel serait "limitée", à -2,2% du PIB en 2019 contre -2,3% en 2018 et -2,4% en 2017. À la fin de l'année 2019, la dette publique devrait atteindre 98,8 points de PIB, soit environ 2.385 milliards d'euros. "Compte tenu de la révision à la hausse du déficit et du ralentissement de l'activité, la baisse de la dette rapportée au PIB espérée lors du dépôt du projet de loi de finances en octobre 2018 ne s'est pas matérialisée" soulignent les experts. De son côté, le solde effectif est passé de -2,8% en 2017 à -2,5% en 2018 et -3,1% en 2019. Pour 2020, le solde des comptes publiques devrait s'établir à - 2,2% du PIB selon les prévisions de l'exécutif.

La transformation du CICE a pesé sur les finances publiques en 2019

Pour 2019, la dégradation des finances publiques n'est pas vraiment une surprise. La transformation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) en baisse pérenne de cotisations sociales a pu gonfler de manière temporaire le déficit. L'année dernière, les entreprises ont bénéficié du dispositif décidé sous le quinquennat de François Hollande au titre des salaires de 2018 et l'allègement de cotisations sur les salaires de 2019. "Ce cumul de pertes de recettes publiques en 2019 conduit le gouvernement à classer en mesure exceptionnelle et temporaire un montant de 20,1 milliards d'euros au titre du CICE, soit 0,8 point de PIB" explique la juridiction financière.

Des mesures "gilets jaunes" non compensées

À la suite du mouvement des "gilets jaunes" et du grand débat au printemps 2019, le gouvernement avait annoncé une batterie de mesures destinées à redonner du pouvoir d'achat aux ménages modestes et aux salariés. La pause de la hausse sur la taxe carbone (-4 milliards de recettes en 2019 et -6,8 milliards en 2020), la défiscalisation et la désocialisation des heures supplémentaires (-2,4 milliards en 2019 et -2,1 milliards en 2020), la hausse de la prime d'activité (-3,8 milliards en 2019 et -4,2 milliards en 2020) ont pu représenter un manque à gagner pour les finances publiques. Pour tenter de compenser ces pertes de recettes, le gouvernement avait adopté une série de mesures comme le report de la baisse de l'impôt sur les sociétés pour certaines entreprises. D'après les calculs de la Cour des comptes, ces décisions sont loin de compenser le manque à gagner pour l'Etat.

"Le montant de certaines mesures de financement adoptées en compensation a été revu en baisse par rapport aux annonces du gouvernement. Il avait notamment inscrit dans le programme de stabilité d'avril 2019 une diminution de 1,5 milliard de la norme de dépense pilotable en 2019, baisse qui été ramenée à 1 milliard en loi de finances rectificative (LFR). Le coût net des mesures est croissant au-delà de 2019 pour atteindre plus de 17 milliards d'euros en 2020. De plus, le gouvernement considère que l'exonération d'impôt et de cotisations sociales de la prime exceptionnelle de 1.000 euros, dont les modalités sont plus restrictives en 2020, n'a pas de coût pour les finances publiques, ce qui est une hypothèse optimiste", comme l'a déjà souligné la Cour.

Une baisse notable des prélèvements obligatoires

La réduction des prélèvements obligatoires est relativement marquée entre 2018 et 2019, avec un taux passant de 45% à 44%. Le gouvernement a en effet pris des décisions pour réduire la fiscalité sur les ménages et les entreprises, et les cotisations. La deuxième tranche de suppression de la taxe d'habitation (3,7 milliards d'euros), l'effet en année pleine de la baisse de cotisations salariales (4 milliards), l'annulation de la hausse de la CSG pour les retraités modestes (1,6 milliard) et la défiscalisation des heures supplémentaires (3 milliards) ont contribué a réduire les prélèvements obligatoires des Français.

En outre, certaines mesures décidées pour 2020 devraient affecter les prélèvements obligatoires. Chez les ménages, il s'agit de la baisse de l'impôt sur le revenu (-5 milliards) et le dégrèvement de la taxe d'habitation pour 80% des ménages (-3,7 milliards). Pour les entreprises, la baisse du taux de l'impôt sur les sociétés (-2,5 milliards), la suppression de certaines niches fiscales et sociales (+ 600 millions d'euros) ou la suppression du crédit d'impôt sur la taxe sur les salaires (+ 600 millions) sont les principales mesures soulignées dans le rapport.

Une hausse de la dépense publique modérée

Les dépenses publiques ont augmenté de manière "modérée" entre 2018 et 2019 selon les auteurs du rapport, après avoir été bien contenues en 2018. Pour l'institution publique, cette évolution "a été facilitée par la forte diminution des charges d'intérêts, dont le gouvernement n'a pas la maîtrise directe". Cette progression reste malgré tout inférieure à celle du produit intérieur brut (PIB). En effet, la dépense publique aurait augmenté de 1,7% en valeur en 2019, soit environ 22 milliards d'euros alors que le PIB en valeur a progressé de 2,7% dans le même temps. Elle représente tout de même 54% du produit intérieur. Ce haut niveau par rapport à ces voisins européens s'explique en grande partie par un rôle prépondérant de la protection sociale et une montée en puissance du rôle des collectivités locales dans l'économie française. D'après des chiffres rapportés par l'observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), la France consacrait 24,3 points de PIB à la protection sociale (hors santé), contre 19,4 points en Allemagne par exemple.

Les administrations publiques locales ont vu leurs dépenses s'accroître ces dernières décennies après les multiples vagues de décentralisation entamées dans les années 80. Les collectivités locales s'occupent bien souvent de l'entretien des infrastructures, du réseau routier, des bâtiments scolaires alors que les dotations de l'Etat baissent dans le même temps.

Grégoire Normand
Commentaires 39
à écrit le 26/02/2020 à 18:30
Signaler
Dépensez, dépensez, il y en restera toujours quelque chose: des dettes.

à écrit le 26/02/2020 à 13:08
Signaler
Pendant ce temps: Une étourderie ou une courtoisie ? Le Canard enchaîné rapporte ce mercredi 26 février que le Sénat, contrairement à l'Assemblée nationale, ne s'est pas constitué partie civile au procès Fillon. Pourtant, deux des enfants de l'an...

le 27/02/2020 à 11:33
Signaler
Ce n’est qu’une bagatelle sachant qu’un fonctionnaire PS -UMP( soutenu par le sénat et tribunal constitutionnel)a pondu un décret pour spolier des milliers de veuves et veufs sous le gvt de M. Sarkozy ( 2002) de leur droit à leurs pensions de réversi...

à écrit le 26/02/2020 à 11:52
Signaler
Depuis les années , que dis-je les décennies , que la Cour des comptes délivre ses rapports toujours critiques et JAMAIS suivi d' actions ; il est permis de se demander à quoi ça sert et quel retour sur investissement ? ça ferait de belles économies ...

à écrit le 26/02/2020 à 8:26
Signaler
Toujours le même constat, il n’y a de volonté de réduction de la dépense publique, on a besoin d’une profonde réforme de l’état et des collectivités territoriales mais avec la redistribution massive des revenus vers une majorité de foyers payée par u...

à écrit le 26/02/2020 à 5:50
Signaler
Si ce pays etait correctement gere, ca se saurait. Vivre a credit va couter cher aux generations a venir et cerise sur le gateau, du boulot il n'y en a plus.

à écrit le 25/02/2020 à 20:00
Signaler
La transformation du CICE a pesé sur les finances publiques en 2019 C'est donner de l'oseille commun a des gens ! c'est fantastique! forcément l'état étant une entreprise, elle verse des dividendes! Et comme depuis un moment, les boites versen...

le 25/02/2020 à 21:30
Signaler
Et il ne vous a pas effleuré l'esprit que cette transformation (passer d'une mesure différée d'un an, le CICE, à une mesure immédiate, la baisse pérenne de charge), a soutenu la conjoncture et l'emploi ?

à écrit le 25/02/2020 à 18:18
Signaler
Nos gouvernants travaillent avec passion à la faillite de notre pays. Ils ne font rien pour réduire la dette du pays. Pas grave, les petits trinqueront.

à écrit le 25/02/2020 à 18:18
Signaler
Les entreprises privées participent largement à ces deficit. IL a fallut prendre les pertes des banques privées comme Ghosn faisait passer sa mauvaise gestion personnelle et ses pertes en résultant sur les comptes de Nissan. Les SSII françaises c...

à écrit le 25/02/2020 à 17:48
Signaler
" La transformation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) en baisse pérenne de cotisations sociales a pu gonfler de manière temporaire le déficit". Que veut dire pérenne : Qui dure longtemps, qui est perpétuel. Donc ,ce défi...

à écrit le 25/02/2020 à 17:35
Signaler
un exemple de gaspillage .Macron avait promis de reduire les elus ,un referendum etait rapide à faire . mais non, en septembre POUR LA DEUxIEME FOIS DU MANDAT MACRON nous allons réélire des senateurs pour 9 ANS ,,,,,,,

le 25/02/2020 à 17:59
Signaler
Macron voulait faire voter par les2chambres mais les sénateurs LR se sont opposés à cette réforme.

à écrit le 25/02/2020 à 17:02
Signaler
whaou ils decouvrent ce que tout le monde sait ils vont bientot decouvrir que la baisse des depenses punliques de hollande ca correspond juste..... a la baisse des frais financiers liee au QE de la BCE.... quand ca va remonter, ca va faire tres t...

à écrit le 25/02/2020 à 17:00
Signaler
Tout ces hypocrites grassement payé qui au départ adhère a la politique de macron de suppression de l'état providence et qui se rendent compte qu'il transfert la richesse collective vers la richesse individuelle. Alors comme ils savaient bien la c...

à écrit le 25/02/2020 à 16:42
Signaler
Digne de Coluche : les inspecteurs des Finances de Bercy recevant des remarques et des appréciations des inspecteurs des Finances de la Cour des Comptes ....Donc ils n'ont pas eu les mêmes professeurs !!!! Quelle mascarade , Quel Hypocrisie ....

à écrit le 25/02/2020 à 15:57
Signaler
" La transformation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) en baisse pérenne de cotisations sociales a pu gonfler de manière temporaire le déficit". Cela ne peut être temporaire ,puisque perenne veut dire : Qui dure longtemps, ...

à écrit le 25/02/2020 à 15:15
Signaler
Mr Macron a comme les autres depuis Sarkozy, laissé au vestiaire ses intentions de réduction de la dépense publique et des 3% de déficit , puisque l'euro permet de faire n'importe quoi . Les allemands n'osent rien faire ou dire depuis que les anglais...

le 25/02/2020 à 19:35
Signaler
Merci de rappeler les faits, car a la fin personne n'est comptable de ces actions. Et lorsque l'on sait que la Libye fut le point de clef de tout ce qui a suivit et finalement l’Allemagne a assumé par intérêt mais aussi il faut dire la capacité d'...

à écrit le 25/02/2020 à 14:53
Signaler
A l election de la cour des comptes toujours les mêmes vieux avides de pouvoir et de salaires

à écrit le 25/02/2020 à 13:21
Signaler
Décidément ils nous coûtent beaucoup trop cher nos riches.

le 25/02/2020 à 15:15
Signaler
En effet, le constat que 24,3% du PIB est destiné aux mesures sociales, c'est sans doute la preuve que les riches coutent cher. Pas que notre pays se désindustrialise parce que nos décideurs préfèrent une politique de soupoudrage social pour acheter ...

le 25/02/2020 à 18:04
Signaler
La suppression de la taxe d'habitation et l'augmentation de la prime pour l'emploi s'adressent aux classes modestes. Votre mauvaise foi est évidente.

à écrit le 25/02/2020 à 13:12
Signaler
Experts en tout ! Y compris en boites postales et tournées de facteurs. si si ! Nos futés de la rue Cambon ont levé un loup avec la Poste. Il y a de plus en plus de boites postales et de moins en moins de lettres.. Scandale et perte de productivi...

le 25/02/2020 à 15:19
Signaler
Cela dit, cela existe dans d'autres pays sans problème. Au Canada, il y a au bout de chaque rue (ou dans des bâtiments/commerces) des rangées de cases postales les unes à coté des autres. Chacun vient y prendre son courrier. Pour les colis, pas de pr...

le 25/02/2020 à 16:00
Signaler
@multiplepseudos Pas besoin d'aller au canada , cela existe aussi ici dans des immeubles pour les colis ou dans des zones pavillonnaires plutôt récentes.

à écrit le 25/02/2020 à 13:10
Signaler
Tant qui aura des senateur

à écrit le 25/02/2020 à 12:28
Signaler
Question éminemment politique dont le principal responsable qui est à l'Elysée se torche comme d'une première couche. Il n'a rien fait, et ne fera rien préférant sacrifier l'avenir de la France sur l'autel de ses ambitions électorales. Macron est un ...

à écrit le 25/02/2020 à 11:18
Signaler
La cour des comptes devrait disposer d'un budget communication envers le public, car année après année ce sont les mêmes constats, que tous ceux qui suivent l'actualité économique connaissent.. Il reste à envoyer le message sur les ronds-points, qui ...

à écrit le 25/02/2020 à 11:15
Signaler
En anticipation de la chute du gouvernement Phillipe, dont Macron va demander la démission sitôt la réforme imposée par le 49.3, et les municipales passées, c'est Lelloubet qui est pressentie pour prendre la tête de la Cour des Comptes. Si la CC d...

à écrit le 25/02/2020 à 10:57
Signaler
Payer des impôts confiscatoires pour être géré par des branquignoles, c'est désespérant. N'importe qui ayant un découvert bancaire est obligé de rectifier le tir mais pas nos gouvernants. Le pire , c'est que ce gouvernement avec sa réforme mal ficel...

à écrit le 25/02/2020 à 10:33
Signaler
Augmentation des salaires des enseignants du publics malgré la faible productivité avec un classement international sur la transmission du savoir au fond du trou, un absentéisme culturel, maintien des avantages es et privilèges comme les retraites de...

le 25/02/2020 à 10:50
Signaler
Presque tout ce que vous écrivez est factuellement faux. Effectivement vous devriez intenter un procès à vos professeurs d'économie! Leur travail est scandaleux!

le 25/02/2020 à 11:05
Signaler
Pourquoi toujours taper sur les fonctionnaires?Ne peut on pas plutot diminuer un peu les dividendes versés aux riches par le CAC 40?

le 25/02/2020 à 15:26
Signaler
Les dividendes sont taxées à la source à un taux de 30%. Ce qui finance les services de l'état. À ma compréhension, a cela s'ajoute l'impot sur les sociétés. La société fait des bénéfice et est imposée (env. 28%), puis si elle décide de transférer so...

le 25/02/2020 à 19:37
Signaler
Le problème c'est que vous 'raisonnez' en élu du PS, donc idéologiquement et sans aucune connaissance de la fiscalité: les dividendes sont déjà taxés 2 fois, une fois à l'impot sur els sociétés, une seconde fois à la flat tax (30%). Cherchez pas, c'e...

le 25/02/2020 à 21:15
Signaler
Votre raisonnement ne tient pas. Tout d'abord les entreprises ne payent pas autant d'IS (les taux effectifs sont plus près de 10% pour les sociétés cotées). Pour faire un calcul juste il faudrait intégrer l'amortissement (qui est une mesure fiscale ...

le 26/02/2020 à 9:18
Signaler
Tout ce que vous dites est exact, contrairement à vos détracteurs ci-dessous. Et il va falloir arrêter la méthode d'enfumage employée à satiété par la haute fonction public et les politiciens au pouvoir pour faire croire que les problèmes de ce pays ...

le 26/02/2020 à 17:56
Signaler
Il suffit de modifier les statuts (passe en cdi) pour réduire le nombre de fonctionnaires. Il suffit de faire de l'externalisation auprès de sociétés prestataires pour réduire le nombre d'emplois publics. Ces mesures ne font faire aucune économie...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.