Le président Macron a déjà choisi son adversaire pour 2022

LE POLITISCOPE. Emmanuel Macron, qui veut instaurer pour la prochaine présidentielle un match retour avec Marine Le Pen, a l'habitude de marcher sur les plates-bandes de ses adversaires politiques, pour mieux les étouffer au final. Gare, toutefois, à ce que les Français ne finissent pas par choisir l'original à la copie. Par Marc Endeweld, journaliste (*).
Emmanuel Macron n'a qu'une obsession : imposer son propre tempo, y compris à son équipe la plus proche.
Emmanuel Macron n'a qu'une obsession : imposer son propre tempo, y compris à son équipe la plus proche. (Crédits : Philippe Wojazer/AFP)

Au « Château », l'interview surprise donnée par le chef de l'État à Valeurs actuelles, une première pour un locataire de l'Élysée, a provoqué un émoi certain parmi ses conseillers. Peu importe pour Emmanuel Macron. Lui n'a que faire des états d'âme de ses collaborateurs, et n'a qu'une obsession : imposer son propre tempo, y compris à son équipe la plus proche. Son conseiller en communication, Joseph Zimet, nommé tout récemment en septembre, vient de l'apprendre à ses dépens.

Mauvais signal

En effet, cette interview explosive, centrée sur les questions de l'islam et de l'immigration, a été décidée par le président lui-même, réalisée « entre quat'z'yeux », dans l'avion présidentiel à son retour de voyage à Mayotte et à la Réunion, et relue en catimini. Selon L'Opinion, Zimet a même songé à démissionner après avoir découvert la première version de l'interview, encore plus cash. Une fuite pour le moins étrange, et non démentie, qui laisse penser qu'une telle initiative n'est pas assumée au sein même de l'équipe présidentielle. Un mauvais signal de plus, alors que la publication polémique est intervenue au lendemain de l'attaque de la mosquée de Bayonne. Pour contrer tout mauvais « buzz » sur les réseaux sociaux, l'Élysée se dépêcha de délivrer des éléments de langage (les fameux « EDL ») pour justifier une telle rencontre entre l'hebdomadaire conservateur et le président de la République.

On ne dicte à « Jupiter » ni son tempo, ni sa conduite, et encore moins sa communication. Parti de la présidence au printemps dernier, l'ancien conseiller spécial, Ismaël Emelien, ex-communicant d'Havas, a lui aussi connu, dès le début du quinquennat, cette facilité déconcertante qu'a Macron à court-circuiter certains de ses collaborateurs, à privilégier les canaux directs ou parallèles, ou encore à jouer un conseiller contre un autre.

Lire aussi : À Paris, petits meurtres entre amis pour les candidats LREM

Esprit startup

Ancien porte-parole de la présidence, l'ex-journaliste Bruno Roger-Petit, loin d'être marginalisé dans le dispositif, continue ainsi d'être utilisé par le président pour faire passer des messages à des journalistes, alors qu'il est désormais son « conseiller mémoire ». Lui qui a coorganisé la remise de la légion d'honneur à l'écrivain Michel Houellebecq, connaît d'ailleurs très bien Geoffroy Lejeune, le directeur de la rédaction de Valeurs actuelles. Au cours de la campagne, c'est aussi Roger-Petit, mitterrandiste affirmé, qui souffla l'idée au futur président d'utiliser un pupitre blanc arboré du drapeau tricolore lors de ses discours, comme son illustre prédécesseur.

Bref, adepte de l'esprit startup, Emmanuel Macron n'a que faire des organigrammes. Son intérêt se porte d'abord sur les idées qu'il trouve les plus à même de lui permettre de conserver sa « centralité » dans la vie politique française. En pleine crise des « gilets jaunes », c'est lui seul qui imposa l'idée d'un Grand débat un peu partout en France. Son ex-conseiller parlementaire, le jeune Stéphane Séjourné, l'a récemment avoué sur BFMTV :

« L'idée du Grand débat, c'est d'abord l'idée du président lui-même. Les collaborateurs, eux, n'étaient pas forcément très positifs sur cette idée. »

Allant jusqu'à ajouter : « On voyait mal comment ça allait être organisé, on ne savait pas quel était le débouché politique... Je pensais, personnellement, qu'il n'y aurait personne dans ces grands débats. » On connaît la suite...

Étreindre ses adversaires pour mieux les étouffer

C'est aussi Emmanuel Macron qui imposa la thématique de l'immigration. Par petites touches au départ, puis plus clairement à la rentrée. Lui qui veut instaurer pour 2022 un match retour avec Marine Le Pen, fait tout pour que le débat politico-médiatique s'impose entre les deux leaders. Et pour cela, le président, sans complexe, va jusqu'à étreindre ses adversaires pour mieux les étouffer. Quand Geoffroy Lejeune lui fait remarquer qu'il n'est jamais aussi meilleur que sur « notre terrain, celui de Valeurs actuelles », il répond : « C'est celui qui je préfère. » Dès 2016, il procède de la même manière avec la droite. À l'époque, François Fillon lui avait écrit un mot, s'étonnant du stratagème : « Une nouvelle fois, vous venez sur mes positions. Jusqu'où irez-vous ? » Réponse : « En fait j'y suis déjà sans doute. Je poursuivrai sur ce chemin, car c'est le seul que je connais. Voyons-nous. » Mais à ce jeu-là, Macron ne peut pas tout prévoir, ni tout contrôler, comme l'actualité a pu le démontrer depuis la rentrée. Et dans cette ambiance délétère, certains Français pourraient choisir l'original à la copie. Ce serait une erreur de sous-estimer ce risque.

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NOTE SUR L'AUTEUR

Marc Endeweld, auteur de L'ambigu Monsieur Macron (Éditions Flammarion), et de Le grand manipulateur - Les réseaux secrets de Macron (Éditions Stock), tiendra désormais chaque semaine une chronique politico-économique dans La Tribune intitulée "Politiscope".

Commentaires 22
à écrit le 16/12/2019 à 6:44
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J'espere que MLP lui fera le coup du père François ! : laisser sa place a sa nièce un an avant les élections !

à écrit le 18/11/2019 à 9:55
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Si Marine LP faisait a Macron "le coup du Père François " :laisser sa place a sa nièce quelques temps avant les élections je crois que Macron aurait du souci a se faire car il compte encore sur un vote de rejet de MLP et non pas sur un vote d'adhe...

à écrit le 15/11/2019 à 18:12
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En 2017, les Français ont voté pour un candidat qui n'appartenait à un parti traditionnel. La tendance peut s'amplifier. Pourquoi pas un Villani devenu maire de Paris en 2020?

à écrit le 14/11/2019 à 2:47
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2002 : 82.8%, 2017 : 67% ( malgré ratage impayable ! du débat par Le Pen incohérente en économie réelle ) 2022 : 55% " selon sondage " Elle finira par l'emporter ou 2022 ou 2027. En espérant pour La France, qu'elle apprenne la compétence et le...

le 18/11/2019 à 9:56
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MLP est devenu un boulet pour son parti , c'est trés dommage ! (Melenchon est dans le mème cas ! )

à écrit le 13/11/2019 à 20:24
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. Ce duel prouve à quel point notre personnel politique est médiocre . Les Français se désintéressent de la politique et ne font plus confiance aux institutions . Ce duel annoncé est probable .

à écrit le 13/11/2019 à 16:56
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Il peut se passer bien des choses en deux ans. En 2015 les sondeurs s'interrogeaient pour savoir qui de Hollande, Juppé, Fillon serait le prochain président. En 2011, ils donnaient DSK gagnant sans l'ombre d'un doute. Dans les deux cas, le vainqu...

à écrit le 13/11/2019 à 11:46
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Macron devrait se méfier. Le dernier a avoir tenté de copier le FN, c'est Sarko, et ça ne lui a pas du tout réussi. Macron risque de déplaire à sa base électorale tout en ne récupérant rien du vote RN. Pire, il legitimise la politique proposée par le...

le 13/11/2019 à 12:11
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C' est quoi la politique proposée par le FN ? Rester dans l' UE. Or l' Ue a seule la main sur le hochet de Mlp, le volet immigration! Et ça ne dérange pas ceux qui réfléchissent ou est-ce à dire qu' ils ne réfléchissent pa...

à écrit le 13/11/2019 à 11:39
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On recommence comme en 2017. On promeut Mlp un peu partout en ce moment et bien entendu on la cashe après après sa promotion. Elle fait d' ailleurs elle même la promotion de Lrem et réciproquement. Puisque ça a fonctionné en 2017, autant recommence...

le 13/11/2019 à 12:35
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Lire et c' est reparti en 2022...

à écrit le 13/11/2019 à 11:11
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Le président Macron a déjà choisi son adversaire pour 2022 beeehhhh les Français ils ont déjà choisi les candidats dont ils ne veulent plus du tout, le revirement de situation, c'est déjà demain ..!

le 13/11/2019 à 14:16
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Depuis son arrivée au pouvoir ,Macron tourne dans les sondages autour de 25 à 35% grâce à une classe sociale aisée qui veut conserver le pouvoir ( aile droite du PS + LR, centriste etc..),ce qui lui suffit pour être au deuxieme tour une nouvelle fois...

à écrit le 13/11/2019 à 10:55
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l'énorme surprise serait que MLP se retire au bénéfice de sa nièce , bien plus crédible ! ....et les cartes seraient rebattues pour Macron !

le 13/11/2019 à 12:23
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Elle est européiste comme Macron et comme sa tata, que voulez-vous que ça change puisque que c' est l' UE et l' UE seule qui tire toutes les ficelles ?

le 13/11/2019 à 13:41
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En parlant de sa nièce : L’histoire est à frémir. Tôt samedi matin 9 novembre, les secours ont repêché un homme tombé dans le canal de la Moïka, au centre de Saint-Pétersbourg. Dans son sac à dos, on a retrouvé deux bras de femme, sectionnés au ni...

à écrit le 13/11/2019 à 10:36
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On le comprend car, de connivence, ils ont tous peur du "dégagisme"! Ils veulent tous jouer les "Quisling" pour cet UE de Bruxelles!

à écrit le 13/11/2019 à 10:08
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Ayant une certaine connaissance du francais dans son incapacite a raisonner, je ne serais pas surpris qu'ils reelisent le freluquet bon a brasser de l'air. La fille du borgne ou cet energumene, les francais sont decidement trop betes, voire ruminant...

à écrit le 13/11/2019 à 9:59
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Cela est honteux, j'espère que ni l'un ni l'autre n'atteindra le second tour. Et vu l'état de notre pays après seulement deux ans et demi, j'espère bien que LAREM sera enterré avec la droite et la gauche, après tout politique identique fin identique....

à écrit le 13/11/2019 à 9:08
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Vous vous avancez un peu, je ne sais pas si la fifille lepen sera au second tour, mais la presence de notre Juju au premier, on peut commencer a se poser la question, ne va t il pas comme son joyeux ventripotent predecesseur ne pas être en mesure de ...

le 13/11/2019 à 11:00
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....les français ont une propension aux pertes de mémoire et a se laisser enfumer qui peut permettre au bavasseur d'entrevoir un deuxième mandat ! On a les dirigeants qu'on mérite , De Gaulle l'avait bien compris en se retirant .......

à écrit le 13/11/2019 à 8:33
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Non, là c'est vous qui nous choisissez notre candidat entre seulement deux personnes. Mais bon le journalisme nous a tellement instrumentalisé de la sorte que vous ne devez même plus y prêter attention... Le déclin c'est long, surtout vers la fin...

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