Les séquelles de la pandémie sur l'économie mondiale seront profondes et durables. Selon les dernières perspectives économiques publiées par l'organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) publiées ce mercredi 10 juin, la croissance du produit intérieur brut (PIB) planétaire devrait reculer de 6% en 2020 avant de rebondir à 5,2% en 2021 selon son scénario optimiste.
Dans une hypothèse plus sombre avec un double choc, la croissance globale pourrait chuter de 7,6% en 2020 et repartir l'année prochaine à 2,8%. Pour l'institution internationale, "le coronavirus est la pire crise sanitaire et économique depuis la seconde guerre mondiale [...] le rebond sera lent et la crise aura des effets de long terme, affectant de manière disproportionnelle les personnes les plus vulnérables".
L'Europe en première ligne
Parmi les pays développés, la zone euro devrait terminer l'année 2020 dans le rouge. Les statisticiens prévoient que la croissance va se replier de 9,1% cette année avant de repartir à 6,5% en 2021. La France (-11,4%) et l'Italie (-11,3%) sont en première ligne. Les deux économies devraient terriblement souffrir avant de rebondir à 7,7% l'année prochaine. Dans la péninsule, la Lombardie et d'autres régions du Nord, principaux poumons économiques, sont restés longtemps paralysés pendant des semaines affichant un bilan humain et sanitaire catastrophique avec des hôpitaux saturés et des milliers de morts.
En France, les pertes économiques pour les huit semaines sont faramineuses. Si beaucoup de mesures de restriction ont été levées, de nombreux secteurs comme la restauration, les brasseries, les bars restent encore pénalisés dans certaines zones géographiques.
En Allemagne où la diffusion de l'épidémie a été relativement mieux contrôlée, les répercussions économiques sont moindres. Les économistes de l'institution basée à Paris s'attendent à une chute de la valeur ajoutée de 6,2% en 2020 et une embellie de 5,8% l'année prochaine. Il reste que l'industrie, qui pèse près de 25% du PIB outre-Rhin, risque de souffrir durablement de la crise. En effet, l'appareil productif allemand est fortement exposé aux dérèglements du commerce mondial et très dépendant de fournisseurs asiatiques. Ce qui risque de lui porter préjudice dans les mois à venir. Au Royaume-Uni, la pandémie a plongé l'économie dans une violente récession. Le PIB devrait reculer de 11,3% en 2020 avant de redémarrer à 7,7% l'année prochaine.
L'économie en lambeaux aux Etats-Unis, la Chine souffre
L'économie américaine traverse une récession brutale. Les principaux indicateurs économiques et financiers sont dans le rouge. L'OCDE prévoit que la croissance étatsunienne devrait s'infléchir de 7,3% cette année avant de rebondir à 4,1% l'année prochaine. La soudaine montée du chômage en mars et avril a précipité des milliers de personnes dans une situation financière très dégradée. En outre, cette crise sanitaire risque d'accroître les inégalités qui minent déjà la société outre-Atlantique. La perspective de l'élection présidentielle américaine à l'automne prochain pourrait rebattre les cartes dans le contexte de ce marasme économique et sanitaire.
La Chine, qui est devenue le principal point de départ de la diffusion du virus, devrait connaître une récession moindre, estimée à 2,6% cette année par les experts de l'OCDE. Ces derniers prévoient que le PIB va rebondir à 6,8% en 2021 dans un contexte de fortes incertitudes. Compte tenu du poids des puissances chinoise et américaine dans l'économie mondiale, de nombreuses régions, en Asie notamment, risquent de pâtir lourdement de cette récession historique.
Une explosion du chômage
Cette récession risque de faire des dégâts colossaux sur le marché du travail. Les économistes de l'OCDE s'attendent à une très forte hausse du chômage en 2020 au sens du bureau international du travail(BIT) passant de 5,4% à 9,2%. Si de nombreux pays développés, en Europe notamment, ont mis en place des mesures de chômage partiel qui permettent d'amortir le choc économique, beaucoup d'autres pays n'ont pas les moyens de mettre en oeuvre ce type de mécanisme. Beaucoup de travailleurs se retrouvant sur le carreau dans les pays en développement risquent de tomber dans une grande précarité.
Le commerce mondial en berne
La fermeture administrative des frontières, le blocage des ports et des aéroports a profondément bouleversé le fret aérien et maritime. Selon les simulations opérées par les experts de l'OCDE, la croissance du commerce mondial devrait s'effondrer en 2020 de 11,4% avant de retrouver des couleurs à partir de 2021 (+2,5%).
L'hypermondialisation des échanges de biens et services risque d'être affectée sur le long terme par cette pandémie planétaire. Au pic de la période de confinement, beaucoup de pays ont montré leur extrême vulnérabilité et leur dépendance à l'égard des économies à bas coût. Cette crise pourrait rebattre les cartes dans des secteurs jugés stratégiques par les Etats dans le domaine de la santé ou de l'énergie par exemple.