Turquie : la gouverneure de la banque centrale démissionne, remplacée par un ancien d'Amazon

En poste depuis moins d'un an, Hafize Gaye Erkan était confrontée à un scandale impliquant sa famille. Vendredi, elle a présenté sa démission, et a été remplacée dans la foulée par le vice-gouverneur de la Banque centrale de Turquie, l'ancien économiste d'Amazon Fatih Karahan, né en 1982.
(Photo d'illustration).
(Photo d'illustration). (Crédits : BRENDAN MCDERMID)

Hafize Gaye Erkan a finalement cédé son siège. La gouverneure de la Banque centrale de Turquie a annoncé vendredi sa démission dans un communiqué posté sur les réseaux sociaux, à la suite d'un scandale impliquant sa famille. Dans les faits, elle a été accusée, dans la presse, par une ex-employée de l'établissement d'avoir accordé des avantages à sa famille au sein de l'institution. Des accusations qu'elle a niées.

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Pour rappel, la gouverneure âgée de 44 ans, première femme à ce poste et réputée pour son expertise aux Etats-Unis, avait pris ses fonctions début juin après la réélection du président Erdogan. Elle a expliqué dans son communiqué avoir demandé au président Erdogan d'être « libérée de (ses) fonctions, qu'elle a remplies avec honneur depuis le premier jour ».

« Une campagne visant à ruiner ma réputation a été organisée contre moi », a-t-elle expliqué dans son communiqué. Elle a ajouté avoir pris la décision de démissionner pour « protéger (sa) famille et (son) bébé innocent, âgé de moins de 18 mois ».

Une politique monétaire confortée en Turquie

« Je ne pense pas que la démission de la gouverneure de la Banque centrale aura un impact négatif », a nuancé Fatih Ozatay, professeur à l'Université d'économie et de technologie TOBB d'Ankara. « En outre, c'est un développement qui va alléger la pression sur la Banque centrale ».

Dans la foulée de sa démission, le président turc Recep Tayyip Erdogan l'a remplacée par le vice-gouverneur, l'ancien économiste d'Amazon Fatih Karahan, né en 1982. Ce dernier a commencé sa carrière d'économiste à la Réserve fédérale de New York en 2012. Il avait ensuite rejoint Amazon en 2022, et la Banque centrale turque en juillet dernier.

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Que faut-il déduire de ce profil ? Cette nomination semble confirmer l'orientation pro-marché de Recep Tayyip Erdogan, après des années de crise économique, et alors que les prix à la consommation restent très élevés. Preuve en est, le ministre des Finances Mehmet Simsek a qualifié la décision de Hafize Gaye Erkan de « totalement personnelle ».

« Notre programme économique, mené sous le leadership de notre président Recep Tayyip Erdogan, se poursuit résolument et sans interruption », a assuré le ministre dans un communiqué. « Nous continuerons de prendre des mesures fermes pour arriver à notre objectif de stabilité des prix ».

Poussée vers la sortie ?

Amorcée après la réélection du dirigeant de la Turquie, et fondateur de l'AKP, cette nouvelle stratégie économique avait été saluée. Elle s'était en effet concrétisée par plusieurs hausses successives des taux d'intérêt, permettant de stabiliser la lire en déroute, et surtout de maîtriser davantage la flambée du coût de la vie. En 2022, l'inflation a atteint 85%. En 2023, elle avait été évaluée à 65%, tout de même.

L'ex-gouverneure a toutefois été percutée de plein fouet par un scandale médiatique. Elle est notamment accusée d'avoir permis à son père de prendre en toute illégalité des décisions au sein de la Banque centrale. Un bureau, une voiture de fonction et des gardes de corps auraient été accordés à son père Erol Erkan, aux ordres duquel « personne n'ose s'opposer », ont rapporté les journaux turcs, suscitant de virulentes critiques sur les réseaux sociaux.

Ses prises de position l'auraient aussi desservie. Selon des observateurs, elle se serait attiré les foudres du président lorsqu'elle a raconté en décembre à un quotidien turc qu'elle était contrainte de retourner vivre chez ses parents, avec ses enfants et son mari, à cause de l'inflation et de la flambée de l'immobilier en Turquie.

Les attaques visant la banquière, très appréciée des milieux économiques, inquiètent les investisseurs et soulèvent la question sur le long terme de la loyauté du chef de l'Etat à l'égard de ses collaborateurs.

Les taux maintenus à un niveau inédit

Hafize Gaye Erkan vivait depuis deux décennies aux Etats-Unis où elle a étudié avant de prendre ses fonctions à Ankara au sein d'une équipe d'économistes respectés, formés notamment à Wall Street, chargés de sortir la Turquie de la crise. Leurs réformes ont permis de faire revenir les investisseurs étrangers et sauvé le pays d'une potentielle crise bancaire.

Sa démission intervient une semaine après la fin d'une série de hausses historiques des taux d'intérêt, qui ont vu le taux de base passer de 8,5% à 45%.

« Compte tenu des effets différés du resserrement monétaire, le Conseil (de politique monétaire, ndlr) estime que le niveau de resserrement monétaire requis pour établir la désinflation a été atteint », avait écrit l'institution.

« Ce niveau sera maintenu aussi longtemps que nécessaire », avait précisé la Banque centrale, soulignant cependant que de nouvelles hausses pourraient intervenir « en cas de risques importants (...) sur les perspectives d'inflation ».

(Avec AFP)

Commentaires 3
à écrit le 04/02/2024 à 7:47
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Plein de privés pour s'occuper de l'argent public !: LOOOOOOOOOOOL !!! ^^ Le casse permanent.

à écrit le 03/02/2024 à 21:14
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Chez nous ils viennent de chez Mac Kinsey.

à écrit le 03/02/2024 à 18:20
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Quelqu'un sait où elle va crêcher? Elle n'avait pas trouvé de logement comme patronne de la banque centrale.

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