Les chiffres sur le chômage en Europe donnent le tournis. Selon la dernière livraison des services statistiques (Eurostat) de la Commission européenne publiée ce vendredi 24 avril, le taux de chômage dans l'UE à 27 variait de 1,3% à 30,1% à la fin de l'année 2019. La crise du coronavirus pourrait amplifier ces écarts déjà vertigineux. La plupart des instituts de statistiques et organisations internationales s'attendent à une récession violente et brutale cette année sur le Vieux continent.
Les économistes du Fonds monétaire international, dans leurs dernières perspectives, anticipent un recul du PIB de 7,5% en 2020 avant un rebond de 4,7% l'année prochaine. A ce stade, il est encore difficile d'anticiper les dégâts sur le marché du travail mais beaucoup d'Etats redoutent une montée inquiétante du chômage dans des régions déjà fragilisées par la crise de 2008 et les mesures d'austérité qui ont suivi.
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Des écarts de 1% à 30% entre Nord et le Sud
Les indicateurs régionaux sur le chômage en Europe mettent en avant les disparités profondes en Europe. Si quelques régions au Nord connaissent le plein emploi, d'autres zones, situées plutôt dans le Sud de l'Europe sont frappées par un chômage historique. Ainsi, les taux les plus bas ont été recensés dans quatre régions de la République Tchèque. Il s'agit de Prague et la Bohême centrale (1,3% chacune), Sud-Ouest (1,5%) et Nord-Ouest (1,7%), suivies de la région Transdanubie occidentale (1,8%) en Hongrie. Certaines Länder allemands enregistrent également un chômage très faible entre Haute-Bavière et Tübingen ainsi qu'une autre région de la République Tchèque, Sud-Est (1,9% chacune).
A l'opposé, certaines régions sont plongées dans un chômage de masse. Il s'agit de Mayotte (30,1%), Melilla (27,0%) et Ceuta (25,8%), deux villes autonomes espagnoles souvent médiatisées lors des crises migratoires, et dans les deux régions grecques de Macédoine occidentale (24,6%) et Grèce occidentale (24,1%) expliquent les statisticiens européens.
La crise risque d'accentuer les disparités Nord-Sud
La crise sanitaire qui sévit partout en Europe risque d'accroître ces phénomènes de chômage dans les prochains mois. Pour l'instant, assez peu de chiffres ont été publiés pour l'ensemble du premier trimestre sur le chômage en Europe. Les derniers indicateurs communiqués par Eurostat signalent que le taux de chômage en zone euro avait atteint en février son plus bas niveau depuis la crise financière.
Un mois avant la mise en oeuvre des mesures de confinement dans la majeure partie des 19 pays ayant adopté la monnaie unique en raison de la pandémie de Covid-19, le chômage a reculé à 7,3% en février. Les projections du Fonds monétaire internationale sont particulièrement assombries. Les économistes de l'institution basée à Washington anticipent une accélération du chômage, passant de 7,6% à 10,4% entre 2019 et 2020, avant de redescendre à 8,9% en 2021 pour la zone euro. La crise économique et sociale pourrait faire des ravages dans les zone les plus pauvres situées dans les régions au sud de l'Europe.
L'Espagne et l'Italie en première ligne
L'économie espagnole pourrait être frappée de plein fouet par un chômage massif dans les prochaines semaines. Les économistes du fonds prévoient un boom du taux de chômage passant de de 14,1% à 20,8% entre 2019 et 2020 avec des craintes pour les plus jeunes et les plus précaires. L'Italie, en première ligne également pendant cette crise sanitaire, devrait également enregistrer une augmentation historique du nombre de chômeurs passant de 10% à 12,7%.
Avec un recul du PIB de 7,2% en 2020, l'économie française pourrait connaître une forte hausse du nombre de demandeurs d'emploi avec un chômage à 10,4% cette année contre 8,5% l'année dernière. En Allemagne, les chiffres sont moins significatifs. Le FMI annonce une hausse de 0,7 point du chômage, passant de 3,2% de la population active en 2019 à 3,9% en 2020. La première économie de la zone euro pourrait néanmoins souffrir amplement. En effet, son industrie traversait déjà de grandes difficultés avant la pandémie et le taux de pauvreté outre-Rhin est relativement élevé par rapport à la richesse du pays (16,8% contre 13,4% en France en 2018 selon Eurostat).