En récession, l'Allemagne voit sa production industrielle continuer à s'affaiblir en juin

L'Allemagne continue à souffrir d'une demande atone et de coûts élevés de l'énergie. Résultat, en juin, et pour le deuxième mois consécutif, la production industrielle a baissé de 1,5% sur un mois, et de 1,7% sur un an, révèle l'office de statistique allemand ce lundi.
Les commandes passées à l'industrie allemande ont fortement grimpé en juin pour le deuxième mois consécutif (Photo d'illustration).
Les commandes passées à l'industrie allemande ont fortement grimpé en juin pour le deuxième mois consécutif (Photo d'illustration). (Crédits : Wolfgang Rattay)

Article mis à jour à 12h55

La production industrielle en Allemagne a plongé en juin, pour le deuxième mois consécutif, sur fond de coûts élevés de l'énergie et de demande atone pour le secteur, qui plombent depuis plusieurs mois la première économie européenne. Dans le détail, elle a baissé de 1,5% sur un mois en données corrigées des variations saisonnières et des jours ouvrables, après une baisse révisée de 0,1% en mai, a indiqué ce lundi 7 août l'office de statistique Destatis dans un communiqué.

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Le recul est beaucoup plus fort qu'attendu par les experts de l'outil d'analyse financière Factset, qui tablaient sur une baisse de 0,5%. Sur un an, la production recule de 1,7%, toujours selon Destatis. Dans le détail, la production de biens d'équipement a diminué de 3,9%. Une baisse qui n'est pas compensée par la hausse de la demande pour les biens de consommation (+1,8 %) et de biens intermédiaires (+0,4 %), selon Destatis. L'automobile voit sa production reculer de 3,5% sur un mois.

Les prix de l'énergie restent élevés

L'industrie allemande, pilier de la première économie européenne, souffre depuis plusieurs mois. Elle est plombée par une nette chute de la demande intérieure, en raison de l'inflation, et par les hausses de taux menées tambour battant par la Banque centrale européenne (BCE). Les prix de l'énergie restent en outre relativement élevés pour la branche. Par ailleurs, certaines activités les plus énergivores, comme la chimie, peinent à retrouver leur niveau de production d'avant la guerre en Ukraine.

« La crise énergétique a probablement causé une perte permanente de capacité dans ces secteurs », explique Franziska Palmas, experte pour Capital Economist.

Les exportations, essentielles pour le secteur, sont moins dynamiques, sur fond de ralentissement de la demande en produits allemands en Chine et aux États-Unis, deux marchés cruciaux pour le secteur.

La publication de ces chiffres intervient alors que, les commandes passées à l'industrie allemande ont fortement grimpé en juin pour le deuxième mois consécutif, avec de gros contrats, notamment dans l'aéronautique. Cet indicateur clef pour le secteur manufacturier, pilier de l'économie allemande, a progressé de 7% sur un mois, après 6,2% en mai, selon les chiffres publiés vendredi 4 août par l'institut national des statistiques.

Des commandes en hausse dans l'industrie

L'indicateur a de nouveau dépassé son niveau d'avant mars, lorsqu'il avait subi un recul de 10,9%, la plus forte baisse mensuelle depuis le pic de la pandémie de Covid-19 en avril 2020. Ce rebond redonne une lueur d'espoir à l'industrie allemande, affaiblie par la crise énergétique, l'inflation, et la hausse des taux d'intérêts qui ont provoqué une baisse de la demande.

« Encore une surprise. Nous pourrions entamer le second semestre de façon plus sereine si les autres indicateurs n'étaient pas aussi faibles », a tempéré Jens Oliver Niklash, analyste pour LBBW.

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Cette hausse a d'ailleurs « été dans l'ensemble permise par plusieurs grosses commandes », a commenté le ministère de l'Economie. Sans ces dernières, l'indicateur aurait « baissé de 2,6% ». C'est particulièrement « une commande dans le domaine de l'aéronautique » de la part « d'un pays de la zone euro », qui a stimulé l'indicateur, a indiqué Destatis dans son communiqué, sans préciser de quel ordre il s'agit. Le secteur des machines-outils a également porté l'indicateur, avec une hausse de 5,1% sur un mois. Pour l'automobile, en revanche, la chute se poursuit, avec une baisse de 7,3% des ordres. Et les commandes en Allemagne ont baissé de 2%, illustrant la conjoncture toujours atone dans le pays.

Une croissance atone

La première économie européenne est entrée en récession au premier trimestre, avec deux trimestres consécutifs de recul du PIB (produit intérieur brut), dont une baisse de 0,4% entre janvier et mars. Pour le deuxième trimestre, Destatis a fait état d'un PIB en stagnation (+0,0%), mais ces chiffres provisoires peuvent encore changer. Les dépenses de consommation des ménages privés « se sont stabilisées au deuxième trimestre 2023 après le faible semestre d'hiver », avait détaillé Destatis à la fin du mois de juillet. Cela s'explique par un marché du travail qui demeure solide, des salaires qui ont fortement augmenté et une tendance au recul de l'inflation.

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Selon de précédents indicateurs, l'industrie et le bâtiment n'ont en revanche pas été en mesure d'augmenter leur production par rapport au trimestre précédent, bien que les difficultés d'approvisionnement se soient réduites et qu'elles aient bénéficié d'un important carnet de commandes. La hausse des coûts de financement a freiné la demande intérieure, et l'industrie a été ralentie en outre par la baisse de la demande étrangère.

Des prévisions abaissées pour l'année 2023 ?

Si le PIB allemand a peu ou prou laissé derrière lui la récession technique - soit deux trimestres d'affilée en recul - traversée cet hiver, cela ne pourrait être qu'une parenthèse : l'indice des directeurs d'achats (PMI) de juillet, en repli, a pointé vers une nouvelle baisse du PIB lors du trimestre en cours, à moins que les mois d'août et de septembre n'affichent un net renversement de tendance.

« Compte tenu de la faiblesse du sentiment dans un contexte de déstockage et de réduction des carnets de commandes, des hausses de taux de la BCE qui continuent de se répercuter sur l'économie et des banques centrales d'autres pays qui anticipent un maintien des taux d'intérêt à des niveaux élevés dans les mois à venir, nous pensons que les perspectives de la demande sont modérées. La situation pourrait cependant se retourner vers la fin de l'année, lorsque la baisse de l'inflation et une certaine inertie dans la croissance des salaires nominaux se seront combinées pour permettre un rattrapage notable des salaires réels des ménages tandis que le cycle des stocks se sera probablement inversé », commente pour sa part Mateusz Urban, économiste, chez Oxford Economics.

Aussi l'économie allemande pourrait finir l'année au global dans le rouge, en queue de peloton des pays de la zone euro. Les principaux instituts économiques s'attendent désormais à un recul estimé entre 0,2 et 0,4%, le FMI tablant de son côté sur -0,3%. Le gouvernement d'Olaf Scholz voit encore la croissance du PIB afficher 0,4%, mais cette prévision d'avril a de bonnes chances d'être abaissée à l'automne.

La situation allemande dénote par rapport à ses voisins européens. La croissance en France a atteint 0,5% au deuxième trimestre, bien plus que prévu, tirée par les exportations qui ont compensé une consommation des ménages en berne, a annoncé vendredi l'Insee. En Espagne, la croissance a légèrement ralenti au deuxième trimestre tout en restant robuste (+0,4%), grâce à une forte consommation des ménages, selon l'Institut national des statistiques (INE).

(Avec AFP)

Commentaires 12
à écrit le 09/08/2023 à 14:19
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La force d'une nation, ou d'un ensemble de nation, se fonde notamment sur son accès à une énergie bon marché et en quantité. En Europe, depuis 3 décennies, on explique partout qu'il faut décroitre et qu'il faut refuser le nucléaire et allumer sa lumi...

à écrit le 09/08/2023 à 8:22
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Les croissances françaises et espagnoles sont tirés par la dette et la consommation, l'Allemagne par l'offre et l'exportation donc bien plus saine, la preuve avec le commerce extérieur français toujours déficitaire.

à écrit le 08/08/2023 à 7:33
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Non mais c'est pas grave puisqu'ils vont devenir champion des micros processeurs ! Si si... ^^

à écrit le 07/08/2023 à 11:59
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Bonjour, ils est claire que l'énergie chère pénalité les industries... L'Allemagne vas devoir se faire a la situation ... Maintenant, l'union européenne favoriser une cohérence énergétique entre les États de l'union... Maintenant , tant qu'ils ...

le 07/08/2023 à 13:30
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@ Rogger...toi y en a vouloir dire quoi?

à écrit le 07/08/2023 à 11:38
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J imagine la joie des grecs. La roue tourne... même pour ma 1ère économie européenne.

à écrit le 07/08/2023 à 11:20
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Étonnant ! La Chine n’achète plus de voitures premium et de machines-outils allemandes?

le 07/08/2023 à 17:04
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Avec la production chinoise de Volvo, Tesla, DS Stellantis ou Volkswagen, la Chine est sur le podium de la qualité automobile. La Chine répond aux besoins de son marché domestique et aussi de plus en plus mondial.

à écrit le 07/08/2023 à 10:52
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Celui qui detient l'energie, reste le maitre du jeu. Europe, pas d'energie, certes des idees, pour la plupart mauvaises, la Russie, qui regorge de gaz, de petrole, d'or, etc... nous allons mettre l'economie russe a genoux. Vous allez bientot etre a p...

à écrit le 07/08/2023 à 9:49
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C'est pas l'économie russe que l'on devait effondrer? :)

à écrit le 07/08/2023 à 9:31
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Un écologiste antinucléaire ministre de l'économie. On voit vite le résultat. Les allemands peuvent dire merci à Robert Habeck.

le 07/08/2023 à 9:57
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Ils peuvent surtout dire merci aux politiques allemands français néerlandais et anglais neo libéralisme Schroder, Merkel, Fillon, Bojo, qui ont fricoté avec les mafieux Russes rendant leurs pays très dépendant des énergies Russes et des caprices dû ...

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