Exportation d'A400M aux Emirats Arabes Unis : l'Allemagne encore indécise

Après avoir refusé la vente de l'Eurofighter à l'Arabie saoudite, l'Allemagne hésite à donner un feu vert à l'exportation de l'A400M aux Émirats Arabes Unis, qui souhaitent acquérir six avions de transport tactique. Pour éviter de s'engager sur des projets épineux, Berlin laisse parfois trainer longuement certains dossiers.
Michel Cabirol
L'Allemagne va-t-elle plomber à l'exportation le programme A400M ?
L'Allemagne va-t-elle plomber à l'exportation le programme A400M ? (Crédits : Pascal Rossignol)

Ni oui, ni non : la vente des six avions de transport tactique A400M aux Émirats Arabes Unis (EAU) est toujours en stand-by dans l'attente de la décision de Berlin de permettre l'exportation de cet appareil vers un pays du Moyen Orient en guerre au Yémen. Berlin s'est en revanche expressément opposée à la vente d'avions de combat Typhoon (BAE Systems, Airbus et Leonardo) à l'Arabie Saoudite. Mais c'est aussi une vieille tactique de l'administration allemande que de laisser traîner longuement certains dossiers pour ne pas avoir à répondre officiellement. Mais cela laisse encore un espoir à Airbus. Au sein du constructeur européen, on ne désespère pas d'ailleurs de convaincre la coalition au pouvoir en Allemagne (SPD, Verts, FPD) de lui accorder un feu vert pour une vente aux EAU. Compte tenu de l'évolution positive du conflit yéménite, le constructeur se dit « optimiste quant à l'obtention d'une autorisation pour l'exportation de l'A400M vers les EAU ».

Toutefois, la position de l'Allemagne dans les programmes de défense européens inquiète fortement Airbus créé il y a 25 ans pour justement porter ces programmes en coopération. D'autant que Berlin prépare pour l'automne une nouvelle loi sur le contrôle du commerce des armes que la coalition souhaite transposer au niveau européen. Ce qui donne des sueurs froides aux industriels européens et surtout à de nombreux états, dont la France. Il n'est guère étonnant que les incertitudes et la position de l'Allemagne sur cette question « demeurent préoccupantes », selon Airbus. « Nous devons vivre avec le fait que le gouvernement allemand, après une discussion intense, a accepté de ne pas soutenir les exportations d'Eurofighter vers l'Arabie saoudite », a d'ailleurs précisé Airbus.

« Nous espérons que les discussions au sein du gouvernement et de ses alliés se poursuivront alors que la situation au Yémen s'améliore et que l'Arabie saoudite a contribué à cette amélioration », a souligné Airbus.

L'A400M, un programme en mode survie

Depuis le début du programme, l'A400M, qui a généré provisions sur provisions, a pourri la vie à Airbus et à ses présidents. Et ce n'est pas terminé. Car faute d'export, le programme pourrait rapidement s'arrêter. En interne, Airbus commence d'ailleurs très sérieusement à l'évoquer. Ce qui est à la fois légitime et logique compte tenu des commandes qui restent à livrer. Ainsi, sur 178 commandes engrangées par Airbus depuis le début du programme (dont 53 pour l'Allemagne et 40 livrés), 118 A440M avaient été déjà livrés à fin mai. De son côté, la France, dont l'armée de l'air a reçu le premier exemplaire en 2013, envisage de réduire sa commande. La future loi de programmation militaire évoque un passage de 50 appareils à au moins 35 avions de transport (21 appareils déjà livrés).

Ce programme fait travailler plus de 10.000 personnes en Europe, dont 2.400 en France, et plus de 80 entreprises françaises, dont des PME. D'où l'importance de l'export à l'image de celles récentes en Indonésie (deux appareils) et au Kazakhstan (2) pour cet appareil aujourd'hui en mode survie. Des commandes à l'export pourraient pérenniser à court terme, voire à moyen terme, la production de l'A400M, Airbus ayant été contraint dès 2018 de réduire considérablement les cadences de livraisons de cet appareil (10 appareils livrés en 2022, 8 en 2021, 9 en 2020, 14 en 2019, 17 en 2018, 19 en 2017). Ce qui laisse à Airbus et aux pays partenaires six années de production environ (10 appareils par an) pour trouver une solution pour cet avion de transport militaire, qui est pourtant l'un des rares programmes de ce type à exister au niveau mondial. Tout à l'honneur de l'Europe à condition de le relancer sinon les armées européennes seront à nouveau dépendantes des Etats-Unis...

Michel Cabirol

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Commentaires 21
à écrit le 19/07/2023 à 13:11
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Et dire qu’on s’associe aux Allemands pour le SCAf et les tanks... On va creuser notre propre tombe par souci d’Europe. Nos gouvernants sont irresponsables.

à écrit le 19/07/2023 à 11:17
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Rappelons tout de même qu'un refus d'exportation allemand de l'Eurofighter et probablement de l'A400 M pénalise aussi les entreprises allemande. Airbus avait d'ailleurs critiqué à de nombreuse reprise l'Etat allemand à ce sujet. Néanmoins connaissant...

à écrit le 19/07/2023 à 8:15
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L'hypocrisie allemande est quand même ahurissante : L'Allemagne et sa coalition au pouvoir sécurisent leurs approvisionnements en gaz naturel et diesel avec des accords d'Etat avec les EAU (septembre 2022) mais interdisent pour des raisons politiques...

à écrit le 18/07/2023 à 22:00
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Encore une preuve que l'Allemagne fait cavalier seul. Pendant des années ils ont fait des économies sur le budget de l'armée (et l'énergie car on leur vend toujours de l'électricité nucléaire dont ils ne veulent pas)pour concurrencer ses voisins euro...

à écrit le 18/07/2023 à 21:58
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Encore une preuve que l'Allemagne fait cavalier seul. Pendant des années ils ont fait des économies sur le budget de l'armée (et l'énergie car on leur vend toujours de l'électricité nucléaire dont ils ne veulent pas)pour concurrencer ses voisins euro...

à écrit le 18/07/2023 à 16:14
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Ce qui veut dire que le SCAF ne pourra être vendu qu'à des pays occidentaux, cela limite les possibilités à l'export compte tenu de la domination des américains sur ce marché.

à écrit le 18/07/2023 à 14:13
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Bonjour, Bon l'A400M n'est pas un avion d'attaque... mais un avion de transport de marchandises... Ensuite, je rappelle que cette appareil n'est pas encore une reussite commerciale, ils s'est peux vendu a l'exportation .. Donc un refus serait u...

à écrit le 18/07/2023 à 12:44
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L'Allemagne n'est plus un pays ami. C'est si difficile que ça à comprendre ?

le 18/07/2023 à 13:39
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Cela nous donne l'occasion de redire qu'en politique, il n'y a pas d'amis, il n'y a que des intérêts ...

le 18/07/2023 à 14:03
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L'a-ce déjà été ? Un partenaire quand ça l'arrange (Deutschland First), si ça sert l'industrie allemande. En ne se prononçant pas, ils ne disent pas non (ni oui).

le 18/07/2023 à 14:23
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Discours anti germanique...

le 18/07/2023 à 17:07
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@Rogger : non, discours profrançais !

le 18/07/2023 à 22:00
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Exactement, ils font une guerre économique à leurs voisins européens, les empêche de les concurrencer lorsqu'un pays "ami" pourraient faire de l'ombre à leur industrie...

le 18/07/2023 à 22:00
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Exactement, ils font une guerre économique à leurs voisins européens, les empêche de les concurrencer lorsqu'un pays "ami" pourraient faire de l'ombre à leur industrie...

à écrit le 18/07/2023 à 12:09
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Il est invraisemblable que ce type de situation se produise. Cela doit être traité en amont d’une approche commerciale voir en début de programme. Cela ne peut pas être découvert en fin de programme. Un pays qui dispose d’aussi peu de capacités en in...

le 18/07/2023 à 12:55
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c'est ce qui vas arriver au scaf l'Allemagne avec sa participation empêchera la vente de l'avion et le développement de cette industrie en france le gouvernement francais doit interdire toutes les voitures produites outre rhin de rentrer en fra...

à écrit le 18/07/2023 à 11:24
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L'Allemagne n'est pas un partenaire fiable. La France ferait mieux de développer ses projets d'armements seule ou avec des alliés moins versatiles : Royaume Uni, Espagne ou Italie.

le 18/07/2023 à 12:19
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Bonjour Louis, Le plus marrant c'est que sur les forums militaire allemand, les allemands eux-même préfèreraient aussi travailler avec les britanniques, les italiens ou les espagnoles plutôt qu'avec les francais (qu'ils estiment en partie trop arr...

le 18/07/2023 à 12:52
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Je suis entièrement d'accord. Les échanges récents entre la France et l'Allemagne: bras de fer sur le SCAF très risqué pour Dassault, manœuvres sur le char de combat, mise de côté de la France sur défense antiaérienne (!) additionnés à l'achat de F-3...

le 18/07/2023 à 14:29
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La france n'as pas d'autre choix , s'est l'Allemagne ou personne... L'italie ou l'espagne ne souhaitent pas être liader dans un grand programme de développement militaire.. La GB est totalement au ordre des USA .. La france n'as plus les moyens de...

le 18/07/2023 à 22:25
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Entre 50 et 80 milliards d'euros, c'est le montant que devrait coûter le programme du futur avion de combat européen Scaf, selon un rapport de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées, publié mercredi 15 juillet 2020....

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