SpaceX perd sa fusée Starship mais a réussi à la faire voler plus d'une heure, pour la première fois

C'est le troisième décollage de la fusée de l'entreprise du milliardaire américain. Malheureusement, le vaisseau n'a pas réussi à atterrir sur terre ce jeudi après avoir effectué un vol dans l'espace. SpaceX s'est néanmoins félicitée d'un « jour incroyable » après un vol bien plus long que les deux précédents tests.
L'immense fusée Starship de SpaceX a de nouveau décollé ce jeudi.
L'immense fusée Starship de SpaceX a de nouveau décollé ce jeudi. (Crédits : Reuters)

[Article publié le jeudi 14 mars 2024 à 16h43 et mis à jour à 18h40]Ce n'est pas encore la bonne. Après deux premiers tests achevés dans de spectaculaires explosions, l'immense fusée Starship de SpaceX a de nouveau décollé ce jeudi, pour un vol d'essai comprenant une longue liste d'objectifs, dont un premier retour sur Terre « contrôlé » du vaisseau avec une fin de course dans l'océan Indien.

Mais ce retour contrôlé va devoir attendre puisque le vaisseau a été « perdu » lors de sa rentrée dans l'atmosphère alors qu'il redescendait vers la Terre, a déclaré l'entreprise jeudi, au terme du troisième vol test de sa mégafusée, qui a toutefois volé bien plus longtemps que lors des ses deux précédents tests. Le décollage pour ce vol test a eu lieu depuis la base spatiale « Starbase » de SpaceX, à Boca Chica, dans l'extrême sud du Texas.

 « Le vaisseau a été perdu », a annoncé un commentateur lors du direct vidéo de l'entreprise du milliardaire Elon Musk. « Donc pas d'amerrissage aujourd'hui », a-t-il ajouté.

Le plus long vol jamais réalisé par la fusée

Ce n'est pas la première fois que le vol de la fusée n'aboutit pas. Le dernier vol test de Starship avait eu lieu mi-novembre, soit il y a moins de quatre mois. Les deux étages de la fusée s'étaient séparés avec succès mais avaient ensuite tous deux explosés. Le vaisseau avait toutefois atteint environ 150 km d'altitude, dépassant la frontière de l'espace.

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Cette fois, les deux étages se sont séparés avec succès quelques minutes après le décollage. Mais celui qui devait ensuite retomber en douceur dans le Golfe du Mexique, n'a pas complètement réussi cette manœuvre et a expérimenté un « amerrissage dur », selon un commentateur lors du direct vidéo de l'entreprise.

Surtout, le vaisseau a lui continué sa course durant environ une heure. Il a largement dépassé la frontière de l'espace, atteignant les plus de 200 km d'altitude. Cette fusée n'avait jamais volé « aussi loin et aussi vite », a déclaré une commentatrice lors de la retransmission vidéo de l'entreprise du milliardaire Elon Musk.

« Immenses félicitations à toutes les équipes pour ce jour incroyable », a écrit sur X Gwynne Shotwell, la numéro 2 de SpaceX, en énumérant toutes les étapes franchies durant le vol.

Une fusée réutilisable

Pour rappel, Starship est la fusée la plus grande (121 mètres) et la plus puissante jamais construite. Elle est notamment composée de deux étages : l'étage de propulsion Super Heavy, et au-dessus le vaisseau Starship, qui donne par extension son nom à la fusée entière.

Mais outre sa taille démesurée, la véritable innovation de Starship est qu'elle doit à terme être entièrement réutilisable. Actuellement, seul le premier étage de la fusée Falcon 9 revient se poser après chaque lancement pour être réutilisé.

Pouvoir faire voler de multiples fois les deux étages de Starship permettra des lancements encore plus fréquents, et pour moins cher - un impératif pour pouvoir « coloniser » Mars, selon Elon Musk. Le patron, aux annonces toujours optimistes en termes de calendrier, a même déclaré cette semaine espérer que Starship effectue « six vols de plus cette année ».

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Plusieurs objectifs

Pour ce troisième essai, SpaceX avait donc annoncé vouloir accomplir plusieurs « objectifs ambitieux ». Parmi eux : effectuer « une rentrée contrôlée » du vaisseau, qui devait tomber dans l'océan Indien pour clore le test, au bout d'environ une heure. Selon des documents de la FAA, le vaisseau devait « se désintégrer » au moment de l'impact avec la surface de la mer, et la plupart des débris couler. Le premier étage devait lui aussi retomber dans l'eau, dans le Golfe du Mexique, après sa séparation.

SpaceX voulait également tester l'ouverture de la trappe qui pourra servir à l'avenir à libérer dans l'espace des cargaisons, par exemple des satellites. La société comptait aussi réaliser la « démonstration d'un transfert de carburant » en vol. Selon la presse spécialisée, ce transfert pouvait avoir lieu entre deux réservoirs à l'intérieur du vaisseau.

Mettre au point cette fonction est essentiel, car pour atteindre la Lune, Starship devra se ravitailler en carburant une fois dans l'espace, grâce à un vaisseau préalablement rempli par d'autres, et servant de sorte de station-service spatiale.

Vers la lune et au-delà

En effet, l'entreprise du milliardaire Elon Musk mise sur Starship pour réaliser son but affiché : faire de l'humanité une espèce « multiplanétaire » en l'installant sur Mars. Mais outre mars, son développement est aussi très important pour la Nasa, qui compte sur ce vaisseau pour faire atterrir ses astronautes sur la Lune lors de sa mission Artémis 3, prévue en 2026.

SpaceX constitue désormais l'un des fournisseurs favoris de la Nasa. « La fiabilité dont jouit aujourd'hui SpaceX résulte de nombreuses explosions de fusées en cours de route », a relevé Scott Pace. Des explosions que la Nasa, financée par l'argent public, ne pourrait pas se permettre.

A noter que les véhicules de SpaceX sont actuellement la seule manière pour les astronautes de se rendre dans la Station spatiale internationale (ISS) depuis le sol américain.

Mais d'où vient le succès de l'entreprise du milliardaire ? La méthode de développement de SpaceX est différente de celle des entreprises traditionnelles et des agences spatiales nationales. Contrairement à ces dernières fonctionnant avec l'argent du contribuable, SpaceX utilise ses fonds propres, lui permettant de prendre davantage de risques. Alors que chaque décollage de la navette spatiale coûtait à la Nasa plus de 2 milliards de dollars (ajusté à l'inflation), selon une étude, le coût moyen d'un siège à bord d'une fusée de SpaceX revient à 55 millions de dollars, selon un audit.

L'entreprise revendique en outre une technique de développement par itération, reposant sur des tests successifs enchaînés à une cadence rapide - quitte à ce qu'ils se terminent dans d'impressionnantes boules de feu. Les leçons tirées permettent alors de procéder rapidement à des modifications.

A chaque test, « on apprend quelque chose de nouveau », avait déclaré en janvier Elon Musk dans un discours face à des employés. « C'est toujours mieux de sacrifier du matériel que de sacrifier du temps ». Le développement des fusées Falcon de SpaceX, qui avec 96 missions réussies en 2023 dominent aujourd'hui le marché des lancements américains, s'est aussi appuyé sur de multiples tests ratés.

(Avec AFP)

Commentaires 9
à écrit le 15/03/2024 à 10:44
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Les gens adorent parce que cela fait le buzz, pensez-donc six lancements tests en 2024, tout le monde devant son écran. Ça occupe, comme les séries. Quant à "perdre des matériaux plutôt que du temps", ça ne me parait pas être dans l'air du temps, jus...

le 15/03/2024 à 12:39
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@ben non Vous avez raison, sur l'objectif. Mais savoir qu'il n'y aura pas de retour, ça on le tait...

à écrit le 15/03/2024 à 7:54
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Waouh ! voler 1 heure alors que l'ambition est d'aller sur Mars ...

le 15/03/2024 à 9:11
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Une heure (avec caméra pour suivre les choses, c'était passionnant, en direct hier) au lieu de 1 minute c'est quand même un progrès. La fusée Apollo était un monstre, et n'était pas censée resservir. Hier on a vu quelques tuiles se décrocher, pas bon...

à écrit le 15/03/2024 à 2:29
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Je vois toujours dans la presse française des articles qui essaient de montrer les projets de SpaceX comme des "échecs" parce que leurs véhicules explosent... Mais le vol d'aujourd'hui de Starship a été tout simplement PHENOMENAL!!! Arianespace doit ...

le 15/03/2024 à 8:43
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Vous avez raison, Airbus est peuplé d'aimables rigolos et Boeing est un exemple ;-))

à écrit le 14/03/2024 à 18:10
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Le journaliste de l'AFP ne connais clairement rien au sujet. Cela fait partie de la stratégie de SpaceX de faire des tests et beaucoup erreurs. Combien d'Ariane on était détruites avant la fiabilité qu'on connaît ?

le 15/03/2024 à 8:44
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Justement, fort peu d'Arianes durant toute son histoire....

le 15/03/2024 à 9:31
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Ariane http://www.capcomespace.net/dossiers/espace_europeen/ariane/annexes/annexe8_echecs_ariane.htm Ariane1 2 échecs Ariane 2 1 echec Ariane 3 1 échec Ariane 4 forte présomption de sabotage par un pays 1/3 pour 1. sinon 3 échecs au total Ari...

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