Vignobles en Bretagne : l’objectif d’un premier vin commercialisé en 2023

Dossier. Depuis la libéralisation par l’Europe, en 2016, des droits à planter de la vigne, dix-huit vignobles professionnels se sont installés en Bretagne. La filière s’organise et cinquante projets sont à l’étude. Le vin blanc pétillant des Longues Vignes près de Saint-Malo pourrait être le premier commercialisé, en 2023.
Situé en bord de Rance près de Saint-Malo, le vignoble Les Longues Vignes devrait commercialiser son vin blanc, bio et pétillant, dès 2023. Il sera le premier d'une cuvée bretonne plus fournie attendue à horizon 2026. Dix-huit vignobles professionnels sont actuellement exploités.
Situé en bord de Rance près de Saint-Malo, le vignoble Les Longues Vignes devrait commercialiser son vin blanc, bio et pétillant, dès 2023. Il sera le premier d'une cuvée bretonne plus fournie attendue à horizon 2026. Dix-huit vignobles professionnels sont actuellement exploités. (Crédits : Longues Vignes)

Édouard Cazals croit en sa bonne étoile. En 2023, il devrait être le premier à commercialiser du vin produit en Bretagne. Ce vigneron trentenaire vient de lancer les précommandes sur la plateforme WineFunding auprès d'investisseurs (cavistes, restaurants et distribution classique...) qui s'engageront à acheter son vin blanc, bio et pétillant, pendant cinq ans, à raison de trois à douze bouteilles par an.

Mélange de cépages précoces champenois (pinot noir, chardonnay) et angevin (grolleau), le futur vin est cultivé aux Longues Vignes, vignoble situé dans la vallée de la Rance, à Saint-Jouan-des-Guérets près de Saint-Malo (Ille-et-Vilaine), où le vigneron s'est installé en 2018.

Ancien salarié de grandes exploitations de Saint-Émilion et du Bordelais, Édouard Cazals cherchait à s'installer dans une région où le foncier était plus abordable. Études climatiques en main, il a trouvé aux Longues Vignes deux hectares « sur un coteau en pente, plein Sud et situé sur un sous-sol de quartz et de schiste ancien ». L'exploitation bénéficie aussi du miroir d'eau de la Rance.

Diversification

« Nous prévoyons de produire 10.000 bouteilles par an, vendues 17 euros, 24 euros ou 50 euros la bouteille, puis 25.000 à horizon 2025-2026, une fois que nous aurons planté deux autres hectares supplémentaires l'an prochain », précise le jeune vigneron qui, en parallèle, est assistant-maître de chais dans une cidrerie.

Si tout se passe bien, les premières vendanges de 2022 devraient permettre à Édouard Cazals de commencer à rentabiliser un investissement qui s'élève à 400.000 euros pour un total de cinq hectares (20.000 euros par hectare supplémentaire à planter, 300.000 euros pour les cuves et le matériel), desquels sont déduits globalement 100.00 euros d'aides diverses. Le vigneron envisage aussi de diversifier sa production de vin en plantant un hectare de verger.

18 vignes exploitées, 50 projets, des vins sous deux à trois ans

La Bretagne, où les vignobles réapparaissent, représente-t-elle un nouvel eldorado pour les viticulteurs ? Édouard Cazals fait partie des nouveaux exploitants bretons qui ont profité de la libéralisation par l'Europe des droits à plantation de la vigne, en 2016, pour envisager un projet d'installation. Outre les soixante-dix vignes patrimoniales, privées ou associatives, qui produisent du vin à usage personnel, dix-huit vignobles professionnels sont exploités dans la région.

« C'est neuf fois plus qu'il y a cinq ans », calcule Rémy Ferrand, secrétaire général de l'Association pour la reconnaissance du vin breton (ARVB).

« D'une surface d'un à six hectares, les vignes existantes sont installées sur les quatre départements, avec une concentration, en raison d'un climat plus chaud et ensoleillé, en Morbihan, en Finistère Sud et en Ille-et-Vilaine où se situent des vignobles historiques (Rance, Redon, Presqu'île de Rhuys)Nous recensons aussi 50 projets, bio pour la plupart, dont 19 en Morbihan et 12 en Finistère. Certains projets vont vite entrer en exploitation. »

De premières vendanges ont eu lieu en 2020, mais aucun vin n'a été commercialisé à ce jour. « Il faut trois ans après la plantation pour obtenir les premières grappes. La phase de commercialisation arrivera sous deux à trois ans, mais compte-tenu des surfaces exploitées, la production sera minime », ajoute Rémy Ferrand, qui estime à un peu plus de 300 hectares la totalité des exploitations en cours ou en projet.

A Belle-Ile, Christian Latouche, PDG du groupe d'expertise comptable Fiducial, investit dans un projet de vignes bio installé sur douze hectares, qui pourrait devenir le plus important de Bretagne. Controversé et cible d'une pétition pour atteinte à la biodiversité, le domaine des Vignes de Kerdonis sera fixé prochainement sur son sort par le préfet du Morbihan.

La filière s'organise mais la nature commande

Pour l'heure, les viticulteurs professionnels qui, comme Édouard Cazals, affichent un cursus viticole, sont adossés à des structures pour les études du sol, s'organisent au sein de l'Association des vignerons bretons (AVB). La création de la structure sera officialisée cet automne.

Les vignes bretonnes exploitées ainsi que les projets mettent en avant une très grande diversité des cépages, plutôt précoces (chenin, chardonnay, pinot noir et blanc, gamay, sauvignon...) et une dominante en vin blanc effervescent.

Le sol breton permet de planter mais c'est toute une filière qui reste à bâtir dans les dix ans à venir. À Auray, le lycée agricole de Kerplouz a ouvert cet automne les deux premières formations professionnalisantes. Rien n'est gagné pour autant. Aujourd'hui, la plupart des professionnels bretons possèdent un second emploi faute de pouvoir vivre de leur vigne.

Dans ce métier où la nature commande, certains vignerons accumulent les aléas, en raison de pluies, du gel, de dégâts causés par les taupes ou les maladies comme le mildiou. Le réchauffement climatique devrait toutefois rendre le climat breton de plus en plus propice à la culture de la vigne, notamment en Morbihan. De manière générale, les exploitations en bord de mer ont presque l'assurance de ne pas geler.

Les terres profondes du centre et du Finistère Nord demeurent en revanche plus difficilement des terres à vignes. « Si le climat d'Ille-et-Vilaine reste comme il est, c'est bien. S'il change, on s'orientera peut-être vers des vins secs », assure, optimiste, Édouard Cazals.

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