
La Tribune l'avait rencontré en 2019, à l'occasion de la sortie de son livre "L'intelligence artificielle n'existe pas" (First Éditions). Dans son ouvrage, loin d'être passé inaperçu à l'époque, Luc Julia a souhaité éteindre les discours alarmistes et anxiogènes de l'époque autour d'une potentielle machine qui prendrait le pouvoir sur l'homme.
"Comme tout outil, l'IA comporte des dangers et on peut se servir des outils d'une mauvaise façon. De même, comme pour tout outil, c'est nous, les humains, qui l'utilisons, et donc qui décidons comment l'utiliser", avait notamment déclaré à La Tribune Luc Julia, préférant ainsi le terme d'"intelligence augmentée" plutôt qu'artificielle.
Né à Toulouse, cet ingénieur et informaticien de 55 ans est totalement légitime pour apporter son opinion dans le débat. Dans sa carrière, qui s'est principalement déroulée à San Francisco jusqu'à aujourd'hui, l'homme a participé notamment à la création de Nuance Communications, aujourd'hui leader mondial de la reconnaissance vocale. Luc Julia a ensuite enchaîné les postes prestigieux dans la Silicon Valley. En 2010, il est devenu directeur technique chez Hewlett-Packard, avant de rejoindre Apple en 2011 pour diriger les équipes de développement de Siri (application informatique de commande vocale). Il est d'ailleurs aujourd'hui comme son co-créateur. Puis l'inventeur a intégré en 2012 les rangs Samsung en tant que vice-président Innovation. Mais surprise, Renault a annoncé dans un communiqué, jeudi 22 avril, le recrutement de l'ingénieur français comme "directeur scientifique" du groupe.
Après une dizaine d'années chez Samsung
Selon des informations de l'hebdomadaire Challenges, Luc Julia n'a pas apprécié la volonté de Samsung de vouloir centraliser ses forces de recherche et développement à Séoul. Grâce à un accord à l'amiable, le Français a pu quitter le groupe sud-coréen dans de bonnes circonstances avant de s'engager avec le constructeur automobile français.
"Son parcours exceptionnel (...) sera clé pour accélérer le déploiement de notre stratégie et devenir une entreprise tech qui intègre des véhicules", s'est ainsi félicité Luca de Meo, le PDG du groupe Renault qui vient de présenter des résultats trimestriels mitigés pour la marque au losange. "Ensemble, en nous appuyant sur mon expertise en matière d'interface homme-machine et d'objets connectés, nous développerons de nouvelles expériences uniques pour nos clients à bord et hors de leurs véhicules", a notamment réagi la nouvelle recrue.
Concrètement, Luc Julia devra appliquer la feuille de route de son nouvel employeur (le premier en France sur son CV) portant sur "l'innovation" et les "technologies clés", pour mettre en oeuvre la mobilité de demain.
"À ce titre, il assurera le rôle d'expert dans des domaines aussi divers que l'intelligence artificielle, les interfaces homme-machine, la connectivité et les logiciels. Il supervisera la recherche et développement sur ces technologies et innovations en vue de leur intégration dans le plan produits et services du groupe", précise Renault dans son communiqué.
Futur homme fort de Renault ?
Dans cette mission aussi bien large que majeure, Luc Julia va semble-t-il devenir un maillon essentiel du constructeur automobile français en raison de la stratégie impulsée par Luca de Meo. Selon ce dernier, la clé du succès sera la capacité de Renault à se positionner sur les services connectés.
Luca de Meo a ainsi annoncé récemment le lancement d'un écosystème d'applications dédiées à l'automobile appelé "Software République", en partenariat avec notamment Atos, Dassault Systèmes, STMicroelectronics et Thales. Au sein de ce cluster, chaque acteur va apporter son expertise dans l'intelligence artificielle, le big data, la cybersécurité, la connectivité et la mobilité afin de concevoir de nouveaux produits et services. "Il assurera aussi l'interface avec les acteurs et partenaires clefs du secteur, notamment dans le cadre de la Software République", précise d'ailleurs l'entreprise. Plusieurs éléments qui laissent penser que le recrutement de Luc Julia est un marqueur fort de la nouvelle stratégie de Renault et de son dirigeant.
Sujets les + commentés