Énergie : le plan allemand de 200 milliards d'euros fait débat au sein de l'Europe

Le plan massif de soutien énergétique de l'Allemagne suscite critiques et soutiens parmi les responsables européens. Certains pays, dont la France, craignent que cette lourde somme fragilise les économies, et ils plaident pour des actions coordonnées. Le chancelier allemand défend sa stratégie estimant qu'elle est « justifiée ».
Le montant et le caractère non coordonné du plan allemand font craindre à certains pays des distorsions de concurrence.
Le montant et le caractère non coordonné du plan allemand font craindre à certains pays des distorsions de concurrence. (Crédits : Reuters)

Le plan de 200 milliards d'euros annoncé par l'Allemagne la semaine dernière pour plafonner les prix de l'énergie et soulager les consommateurs allemands face à l'inflation galopante ne plaît pas à tout le monde au sein de l'UE. L'Allemagne se voit en effet reprocher un double langage : plaider l'austérité à Bruxelles, tout en dépensant elle-même sans compter. Le montant et le caractère non coordonné de son initiative font craindre à certains pays membres des distorsions de concurrence, car tous les États européens ne peuvent pas débloquer une telle somme pour défendre leurs entreprises.

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« Le sujet éventuellement est sur le caractère massif de ces aides qui peut fragiliser des économies qui ont un espace budgétaire plus faible que le nôtre », a pointé une conseillère d'Emmanuel Macron mercredi 5 octobre. Selon elle, « il faut qu'on trouve le bon mécanisme pour que ce soutien légitime soit compatible avec le fonctionnement de nos économies intégrées ». En somme, il s'agit de « mieux coordonner des plans nationaux qui ne sont pas du tout de même ampleur ».

Un avis partagé par le commissaire européen Thierry Breton. Sur le plateau de BFMTV ce jeudi 6 octobre, il a indiqué qu'il « appelle » depuis « plusieurs semaines, voire mois, » les États à aider les secteurs industriels très dépendants de l'énergie. Notamment, l'acier, le zinc, le papier, la chimie, le verre. Autant de secteurs « très affectés » par la flambée des prix de l'énergie, ce qui « affaiblit notre compétitivité ».

Réagir, comme l'a fait l'Allemagne avec son plan à 200 milliards, est une bonne chose pour le commissaire européen, « mais il faut le faire de manière coordonnée, car le marché intérieur fonctionne parce que nous avons des règles à peu près similaires partout ». « Aucun État n'a le premier euro vaillant pour faire face à cette crise, tout le monde doit emprunter », a-t-il rappelé.

Dans ce climat d'avis différents, la présidence française a néanmoins rejeté tout différend avec le chancelier allemand sur le sujet. « Il n'y a pas de problème avec Berlin », « pas de divergences sur ces sujets », a-t-elle assuré. Et de préciser : « Il est légitime et normal que les États membres cherchent des solutions pour accompagner les ménages et les entreprises face à l'inflation et à la flambée des prix de l'énergie. On le fait nous-mêmes. »

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Compatibilité à l'étude

Thierry Breton, a par ailleurs indiqué être en train de travailler avec la commissaire à la Concurrence, Margrethe Vestager, à « vérifier » que ce plan allemand de 200 milliards d'euros est bien « compatible avec les aides d'État ».

« Il faut que tous les autres pays aient des conditions d'accès à l'emprunt pour faire face à leurs propres besoins identiques », estime le commissaire européen. Et d'insister :

« Il est très important que tous les États aient le même accès à l'endettement, et pas que certains, parce que, soi-disant, ils auraient peut-être une situation fiscale meilleure que d'autres, puissent le faire avant les autres et dans des conditions qui créent de la distorsion sur le marché. »

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 « Le montant [du plan allemand] est très significatif, (...) ça pose la question de l'endettement équitable de chacun des pays », a aussi souligné Thierry Breton.

Berlin se justifie par les mesures similaires "déjà prises ailleurs"

Le chancelier Olaf Scholz avait répondu aux critiques ce mardi. « Les mesures que nous prenons sont (...) justifiées », a-t-il estimé. Alors que certains responsables de l'UE lui reprochent de faire cavalier seul, Berlin fait valoir que ces mesures « ne sont pas isolées, et ont été prises ailleurs », notamment en France et en Espagne.

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Outre les mesures similaires dans d'autres pays européens, Berlin souligne que son plan s'échelonnera sur plusieurs années, ce qui empêchera de trop grandes distorsions. « Ces mesures seront destinées à financer des mesures de soutien en 2023 et en 2024 », s'est ainsi défendu Olaf Scholz.

Scholz refuse de nouveaux instruments d'emprunts communs dans l'UE

Le chancelier a par ailleurs refusé la mise en place au niveau européen de nouveaux instruments d'emprunts communs pour répondre à la crise, à l'instar du plan de relance post-Covid de 2020. Il appelle à utiliser plutôt les sommes débloquées en 2020, dont une grande partie n'a pas encore été dépensée par les États européens.

L'Allemagne dispose du soutien de l'Espagne. Le Premier ministre Pedro Sánchez a affirmé ce mercredi « respecter la décision du gouvernement allemand ». Il faut être « empathiques avec la situation que traverse l'Allemagne, qui voit son économie, son industrie et les foyers allemands davantage affectés par la guerre » en Ukraine, a-t-il jugé.

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(Avec AFP)

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Commentaires 7
à écrit le 07/10/2022 à 16:02
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Malgré ses difficultés énergétiques l'Allemagne est riche de part son Trésor de Guerre de sa balance commerciale (200 milliards) et donc peut se permettre de mettre à profit cette énorme somme pour passer l'hiver, sans se préoccuper de Bruxelles et d...

à écrit le 07/10/2022 à 3:08
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Deutschland uber alles J ai rien a rajouter d autre ..

à écrit le 06/10/2022 à 22:53
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Scholz ne peut pas avouer qu' il suit son maitre américain. La destruction économique de l’Europe la rend absolument dépendante des États-Unis sur le plan économique, politique et militaire, la transformant en un satellite fantôme impuiss...

à écrit le 06/10/2022 à 18:31
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Que de jalousie des pays d'ail quelles ont refuses depuis des annees de reformer. Maintenant vous allez payer le facture, tout seul comme il faut.

à écrit le 06/10/2022 à 15:34
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Nos dirigeant sont pitoyables ils n ont jamais entendu parler du " deutschland uber alles" ??

le 06/10/2022 à 16:59
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Les Allemands défendent simplement leurs intérêts immédiats. Nous devrions faire également la même chose…..

à écrit le 06/10/2022 à 13:48
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pour revenir a egalite avec l'allemagne la france doit revoir ces copie de budjet depuis 1990.. et occulte toute depense militaire et surtout divise par deux ceux concernant les pays d'afrique et reportant l'autre moitie a l'allemagne et une autr...

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