Après l'Allemagne et l'Autriche, c'est au tour de la Pologne de rejeter la demande formulée par Vladimir Poutine de régler les achats de gaz russe en roubles. Le groupe gazier polonais PGNiG a en effet annoncé ce jeudi 24 mars qu'il continuerait à régler ses achats conformément au contrat en cours et refuserait les paiements en roubles réclamés par Moscou.
« On ne voit pas trop une telle possibilité », a dit le président du groupe polonais Pawel Majewski. Et de préciser : « Le contrat, dont je ne peux révéler les détails, fixe le mode de paiement. Il n'est pas prévu qu'une partie puisse le modifier selon son bon vouloir. Nous remplirons ce contrat conformément à nos engagements », a-t-il conclu. Ce contrat en cours, dit « contrat Yamal », expire à la fin de l'année.
La veille, le président russe avait annoncé que la Russie n'accepterait plus de paiements en dollars ou en euros pour les livraisons de gaz à l'UE. « J'ai pris la décision de mettre en œuvre un ensemble de mesures pour passer au paiement en roubles de notre gaz livré aux pays hostiles, et de renoncer dans tous les règlements aux devises qui ont été compromises », a prévenu Vladimir Poutine, expliquant qu'il s'agissait d'une réaction au gel des actifs de la Russie en Occident à cause de son offensive en Ukraine. Il a ainsi demandé à la banque centrale et au gouvernement d'établir « dans un délai d'une semaine » le nouveau système qui doit être « clair, transparent » et implique « l'acquisition de roubles sur le marché » russe des changes.
La Pologne veut « dérussifier » son économie
Le gouvernement polonais a annoncé la semaine dernière vouloir sortir de sa dépendance économique à la Russie. Le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki avait listé une série de mesures dite « bouclier anti-Poutine » destinées selon lui à « dérussifier l'économie polonaise et européenne », mais aussi freiner l'inflation, protéger l'emploi et résister au « chantage gazier » de Moscou.
L'État polonais investira trois milliards de zlotys (636 millions d'euros) dans la société d'État Gaz-System qui construit et exploite les gazoducs ainsi que le terminal gazier du port de Swinoujscie, dans l'ouest du pays. Gaz-System construit notamment le gazoduc Baltic Pipe qui doit amener en Pologne du gaz norvégien avant la fin de l'année et réduire la dépendance du pays du gaz russe.
L'expulsion de diplomates russes attise la colère de Moscou
Par ailleurs, le ministre polonais de l'Intérieur Mariusz Kaminski a annoncé mercredi 23 mars que la Pologne expulsait « 45 espions russes se faisant passer pour des diplomates », dans le contexte de l'offensive russe en Ukraine menée depuis un mois. Ces expulsions suivent de près des mesures similaires prises vendredi dernier par les trois pays baltes et la Bulgarie. La Lituanie, la Lettonie et l'Estonie ont déclaré au total 10 diplomates russes personæ non gratæ, « en solidarité avec l'Ukraine », tandis que la Bulgarie a expulsé le même nombre de membres de l'ambassade russe.
Cette décision est « une mesure à dessein en vue de la destruction définitive des relations » russo-polonaises, a accusé le ministère russe des Affaires étrangères dans un communiqué. « Varsovie a procédé à une escalade dangereuse dans la région, guidée non pas par ses intérêts nationaux, mais par les principes de l'Otan fondés sur une russophobie ouverte élevée au rang de politique officielle », a dénoncé le ministère russe des Affaires étrangères. Il a promis une réponse « qui fera réfléchir les provocateurs polonais et se faire sentir ».
(Avec AFP)